Les seigneurs du Karpatt

Les seigneurs du Karpatt

Karpatt est un groupe de jazz-manouche. Trio à formation variable, ce combo délirant peut fêter la joie des bistrots et des verres de l’amitié lancés biens haut dans des gargotes enfumées mais aussi jouer, sur d’autres titres, des airs mélancoliquement tendres et poétiques. ’Léon’ étant dans ce contexte la preuve par quatre qu’il y a du génie dans ce groupe. D’une chanson similaire au patronyme de ’Jeff’, d’une gouaille protestataire sétoise, ils mêlent les références de prestiges pour ne parler qu’une seule langue : celle de la chanson populaire es’qualité !

1. Votre nom de Karpatt est-il un moyen de vampiriser l’attention en faisant référence au plus grand comte des Balkans ?

Karpatt : « Au départ Karpatt vient d’un jeu de mots entre nous qui signifie « carpette ». Ce néologisme on l’utilisait du temps du lycée. Nous avons voulu, par nostalgie de ces années de rigolade, le garder au moment de créer un groupe. »

1. (bis) Que s’est il passée entre votre premier album en 2001 jusqu’à ce « Dans le Caillou » ?

Karpatt : « On a commencé à faire de la route ! A la sortie du premier album nous jouions exclusivement sur Paris. Ensuite nous avons voulu le faire écouter un peu partout en France en partant de bars en bars et de routes nationale en départemental. Ce qui a bien comblé le temps entre les deux albums. »

2. Pourquoi ce titre énigmatique « Dans le caillou » ?

Karpatt : « Car l’album a été enregistré à coté de Blois dans des grottes troglodyte. Le premier album on l’avait baptisé ’A l’Ombre du Ficus’ à cause du ficus qui se trouvait dans ma salle à manger. Avec celui-là, on a voulu garder le clin d’œil au lieu de naissance. »

3. Votre nouvel album est axé sur ce fameux style ’jazz-manouche’, comment qualifieriez vous tout d’abord ce style et ensuite votre second opus ?

Karpatt : « Le Jazz-Manouche est l’une de nos influences effectivement mais elle n’est pas la seule touche présente sur cet album. Notre palette est plus varié. Je pense qu’il y a surtout « des couleurs » de cette musique qui jalonne ce disque. Ce n’est pas du pur Jazz Manouche avec des prouesses techniques à la clef comme les puristes peuvent l’entendre. Karpatt essaye de faire des chansons avec des musiques qui permettent d’écouter nos textes. Le jazz-manouche permet justement d’installer une dynamique qui met en avant les mots. »

4. Justement vos chansons sont des tableaux populaires, des histoires proche de chacun ?

Karpatt : « J’écris les textes du groupe au quotidien, en fonction de ce qui nous arrive, de ce que je vois. Je pense que les gens sont sensibles à des histoires ou ils pourront se reconnaître. Après si l’on peut essayer d’y glisser de la poésie c’est encore mieux. »

5. L’album se décompose particulièrement en deux parties, d’un coté une rythmique festives et puis soudain avec l’arrivée de certains instruments comme la flûte vous devenez plus nostalgique, voir humaniste ?

Karpatt : « J’aimerais bien avoir tous ces musiciens en concert avec nous continuellement mais comme ce n’est pas possible on se fait plaisir en studio. Musicalement notre musique leur permet de s’intégrer facilement, on invite donc généralement des potes pour jouer du piano ou de l’accordéon. »

6. Vous évoquez souvent la solitude qui enferme les êtres humains en numéros anonymes n’ayant plus la possibilité de se rencontrer qu’à travers des animaux de compagnies ?

Karpatt : « Tu sais, dans le groupe on est tous des exilés habitant à Paris ! C’est vachement impressionnant dans cette ville de voir que l’on peut facilement être chacun dans son appartement sans connaître son voisin de palier. C’est un sujet récurant qui nous obsède car nous le vivons quotidiennement. Notre chance c’est de pouvoir sortir de cette vie de fou pour aller faire nos concerts à droite ou à gauche. Du coup on se reprend cette impression de solitude dans la gueule dès qu’on rentre !(rire) »

7. Le meilleur moyen d’éviter l’isolement dont beaucoup souffrent, c’est de venir se rapprocher dans vos concerts ?

Karpatt : « En allant dans nos concerts mais aussi dans des lieux de vie comme les bistrots par exemple ! »

8. Vous les adorez ces petits bistrots si sympathique que vous chantez. D’où vous vient ce goût du zinc ?

Karpatt : « On adore ce coté populaire qui est un espace de vie humaine ! Les gens ne se parlent plus mais dans ces guinguettes on continue d’entendre de belles choses… alors essayons de les préserver le plus longtemps possible. J’aime assez le coté Gaulois qui résiste au romain anonyme et froid. »

9. Vous avez la faculté de venir jouer aussi bien dans des bistrots que de faire la première partie de chanteurs abonnés aux Zéniths ?

Karpatt : « C’est un truc qui nous a posé beaucoup de questions. On pensait ne pas être à notre place face au gigantisme des salles de ces chanteurs comme Cabrel ou Pagny. Mais en essayant deux-trois fois on s’est aperçu que cela fonctionnait aussi dans ces lieux. Les grandes salles peuvent très bien rentrer dans notre univers. Sans faire de compromis, avec le même spectacle que d’ordinaire, on s’aperçoit que tout se passe très bien. Il y a un coté trublion qui vient foutre son grain de sel dans ce gros ensemble bien réglé et ça c’est génial. »

10. Les jeux olympiques qui viennent de se dérouler m’oblige à vous demander si comme dans votre reprise de Tachan, vous n’êtes pas très friand de ces joutes nationalistes ?

Karpatt : « On accepte de chanter haut et fort la chanson de Tachan qui se fout de la gueule de ces petits drapeaux et de ces nationalistes qui mettent en avant leur modèle social. »

11. « La chose qui dort dans mon lit » est une chanson sur la personne qui occupe votre chambre mais c’est surtout l’anti Vincent Delerm ou Benabar qui ont tendance eux à résumer la femmes à des superficialités bourgeoises ?

Karpatt : « Ca me plait bien cette façon de voir. J’aurais peut être pas osé le dire mais venant de ta part j’accepte. Surtout que « bourgeois bohème » c’est bien trop facile . Je trouve que le leitmotiv actuel des chanteurs réalistes avec leur discours décalé sur les choses est d’une pédanterie par forcement agréable. »

13. Il y a par contre un chanteur réaliste populaire avec qui vous avez noué une amitié très forte c’est Mano-Solo ?

Karpatt : « C’est un chouette contact. Un très bel ami. On a eu l’occasion de faire une de ses premières parties, cela s’est tellement bien déroulé que c’est devenu un concert collectif ou nous chantions ses chansons et vice-versa pendant toute la soirée. De là, on a monté un spectacle ensemble où l’on mélangeait la peinture et la musique. Il est ensuite venu amicalement nous aider en studio et poser de ci de là sa voix sur certaines chansons pour ce nouvel album. Pour finir on va partir faire la première partie de ses concerts à venir avec l’Olympia en janvier 2005. »

14. « Dans le Caillou » est très typé visuellement sur un univers proche de Tim Burton et son petit enfant huître ?

Karpatt : « Sébastien, le dessinateur de notre livret, est venu voir des amis à lui dans le studio pendant qu’on enregistrait nous dans notre coin. Voyant ses planches qu’il avait sous le bras et réfléchissant à la pochette à venir, on a tenté l’aventure ensemble en mettant un petit livret de ses dessins et de nos textes. Il va venir aussi sur certains concerts pour faire des performances sur de grandes toiles derrières nous. Notamment pour les deux soirs à la Maroquinerie. »

15. Apparemment, si mes sources sont justes, Vous recherchiez un Traffic pour sillonner la route, je voulais savoir si vous avez trouvé votre bonheur ?

Karpatt : « On a trouvé ! Ce sera pas un Traffic mais un Espace de 12 ans. Apparemment le mec m’a dit qu’il roulait encore (rire). »