Trois jours à tuer, Louis Lanher

Trois jours à tuer, Louis Lanher

Il est fort ce Louis Lanher ! Il peut se vanter de m’avoir entraîner dans un livre qui a priori avait tout pour que je le déteste cordialement car je ne suis pas fan des road movie, ne m’intéressant pas aux belles voitures, et encore moins aux beaux châssis en dehors de ceux qui ont de longues jambes galbées. Et pourtant, force est de constater, qu’on ne peut que s’incliner devant ce livre noir en forme de thriller moderne et inventif, ultra léché et mis en scène dans une mécanique profondément littéraire, érudite et maîtrisée.

Le pitch est simple et efficace comme annoncé sur la quatrième de couverture. I est attractif, mené, tambour-battant comme une course terrible envers soi-même : "L’Ultimate Race : 3000 kilomètres de bitume entre Paris et Marrakech, les pilotes les plus rapides, les bolides les plus affûtés, trois jours d’adénaline. Mais pour Maximillion Copper, trois en chute libre à la poursuite de son identité."

Habile, Louis Lanher a construit son livre comme un roman haletant et chronométré pour nous emmener dans une mécanique fluide, la quête personnelle d’un héros pas comme les autres, étrange et attachant. Il a surtout fait de son thriller, à la fois un bel hommage à la langue et à l’écriture tout en ayant enfanté, de ses dix doigts, une œuvre parfaitement formatée pour la Bande dessinée ou le Cinéma, pleine de découpages qui font mouches et qui appellent des images fortes, implacables.

Il y a un style Lanher, drôle et distancier à la fois, une sorte d’humour froid et flegmatique, très bien dosé qui produit des passages jubilatoires : "Il existe des métiers qu’on exerce toute sa vie, sans que cela ne serve jamais à rien. Femme politique d’extrême gauche, astrologue, expert en communication extraterrestre ou chercheur en astrophysique au CNRS ne sont que des exemples". ou encore cet autre qui m’a fait hurlé de rire par son impeccable cynisme : "Etretrat est le lieu de suicide le plus visité par les familles nombreuses. (....) La curiosité morbide se concentre sur les falaises à pic d’Etretat. les enfants encouragés par leurs parents trottinent dans la gadoue au bord du précipice , ils se penchent encore un peu et montrent du doigt la plage de galets creusée par les impacts de corps sans vie."

Finalement c’est pour cela qu’il est intéressant Louis Lanher. Dans ce talent à nous parler avec une grande acuité des comportements humains au sein d’un roman parfaitement construit dans un genre qui d’ordinaire laisse peu de place à ce genre de constats sociologico-caricaturales vifs, délirants ou pas tant que cela.

Vous l’aurez compris, cette course improbable mais réaliste, décrite avec beaucoup de savoir-regarder est le merveilleux prétexte artistique d’un récit complet, original et très créatif de la part d’un auteur qui a une écriture et un regard uniques sur le monde. C’est là tout ce qu’on demande à un écrivain digne de ce nom.

Il a bien trouvé sa place dans le milieu littéraire, Louis Lanher, il fait des livres qui lui ressemblent et qui réussissent même à passionner un type comme moi qui confond une R4 avec une Citroën, je vous l’ai dit, au début, il est fort ce Louis Lanher. Achetez son livre !

Trois jours à tuer, Louis Lanher, Le Diable Vauvert, 18 euros.