L’AFFAIRE DOMINICI : récit d’un conflit sur fond de meurtres !

L'AFFAIRE DOMINICI : récit d'un conflit sur fond de meurtres !

Vous connaissez tous ce fait divers terrible, où une famille anglaise a été assassiné pas loin de la ferme des Dominici. Même si le patriarche a été condamné pour le triple meurtre, la question demeure toujours sur le présumé assassin, pourquoi ces meurtres. Entrez à nouveau dans l’enquête de l’Affaire Dominici !

Le 5 août 1953, Forcalquier, la gendarmerie est alertée : une voiture est à l’arrêt près de la Durance, sur un chemin, trois cadavres : une famille anglaise, les Drumond, un homme, une femme, et une fille, Élisabeth âgée de 13 ans. Le commissaire Sébeille se voit confier l’enquête, avec une pression du résultat. Mais le temps d’arriver, pour le flic marseillais, le lieu du crime a été largement piétiné, changé, et ça va être le cas. Avant son arrivée, Gaston Dominici, un gardien de chèvre dont la ferme se situe à quelques pas du lieu du crime, s’impose parmi les gendarmes, en recouvrant le corps de la fille. Dès l’arrivée de Sébeille, la confrontation avec Gaston Dominici commence, et elle va s’accroitre le long de l’enquête. Gustave Dominici est le premier suspecté, il passera même par la garde à vue, en prison préventive, puis libéré. Sébeille traque la famille Dominici : en plus du fils Gustave, le premier soupçonné, il a surtout le patriarche de la famille , Gaston.
Le papi fait sa loi au sein de la famille, voir même du village. Il y fait régner un climat presque de terreur. C’est un fort de caractère, il ne supporte pas la présence de la police, surtout celle de Sébeille, un commissaire qui lui tiendra tête, à lui et sa famille tout au long de l’enquête. Le policier met la pression, avec sa cigarette, il s’impose même dans les repas de famille, et applique ses convictions, sans sourciller, en étudiant les pistes les plus sures. Il écarte entre autre, celle où Drumond aurait eu un vieux conflit d’argent avec Dominici. Le corbeau perd de ses plumes.
Jusqu’au procès, le conflit entre Gaston Dominici et Sébeille ne cessera pas. Le patriarche veut tout mener pendant les débats, il hurle, il pointe du doigt, même les membres de sa famille. Il a pourtant une faiblesse, la nuit, le corps de la petite Élisabeth Drumond lui apparaît, le désignant coupable. Mais la résistance est dure face à la reconstitution, où rien ne semble tenir debout. La vérité a du mal à sortir, même si Clovis et Gustave sont sur le point de craquer, mais le papi couvre leur témoignage d’une forte voix, d’un physique très sur. Gaston Dominici mènera de front ce procès de sa redoutable puissance, y compris face au juge, à la justice de la république.

Dans ce point de vue de l’affaire, Pascal Bresson, le scénariste s’est appuyé sur le choc entre Sébeille et Gaston Dominici. Il montre aussi le côté d’un coin de la France, presque à l’abandon, la France profonde du Sud, où personne ne va vraiment, à part les bergers et fermiers du coin, où il n’y a pas de règles de la république, comme une autarcie, le coup de fusil est une des sentences. Personne ne porte plainte, pas de police, pas de justice, ce qui donne un grand nombre de secrets dans ces contrées. Des secrets qui restent muets jusque dans la tombe, confiés d’une génération à l’autre, avec cette promesse de ne rien dire.

Pour le dessin, le ton est donné par René Follet, sur du noir et blanc, avec ses nuances de gris, avec l’encre de chine, de la plume aux pinceaux, à la mine de plomb, dans un style réaliste, poussé par des clairs, des obscurs, très proche de ces illustrations de revues de détectives, des couvertures des romans « pulp » américains. Follet organise des mises en scène, avec un œil qui n’hésite pas à plonger, à naviguer d’un point à l’autre d’une pièce, d’un lieu, d’un personnage, à discerner les traits, les expressions, les gestes. Il respecte une certaine réalité des faits, précision du placement des protagonistes. Il aborde chaque dessin comme une illustration, comme ceux visibles lors des procès. Vous pouvez en découvrir plus, via un exceptionnel carnet de 8 pages sur des recherches de dessins, de planches, des couvertures (parfois bien meilleure que celle choisie) sur cet album.

L’affaire Dominici rassemble un point de vue nouveau, efficace, avec de grandes tensions, sans tomber dans le tragique, ou le dramatique, mais plus dans un univers sombre du Sud de la France, vers la Durance, la ferme des Dominici. L’album décline clairement une position sur la culpabilité de Gaston Dominici et ses fils, un complot familial mené par le patriarche, face à l’efficacité du commissaire Sébeille, qui ne lâchera rien des détails essentiels de ces meurtres. Une manière originale et efficace pour vous replonger dans un des faits-divers, dont la vérité restera toujours cachée.

L’AFFAIRE DOMINICI / Pascal Bresson (scénario) et René Follet (dessin) / Glénat