Electronic City

Electronic City

« J’ai toujours la sensation d’arriver jamais de partir, je voyage mais je ne bouge pas », murmure Tom dans Electronic City (2002), texte écrit par l’Allemand Falk Richter. Mise en scène par Cyril Teste et le collectif MxM, cette pièce, sombre et plutôt confuse - qui se déroule en partie dans un aéroport -, ne convainc guère…

D’emblée Electronic City nous introduit dans un univers dépressif, flottant dans la solitude du travail et surfant dans la sensation de la perte du réel. Tom et Joy, les deux principaux personnages – joués par Pascal Rénéric et Servane Ducorps -, vivent une relation compliquée due à leur éloignement. Tom est trader. Joy travaille pour une chaîne d’aéroport qui l’envoie d’un sushi-bar à l’autre aux quatre coins du monde.

Pour ressusciter le climat tourmenté du texte de Falk Richter, Cyril Teste et le collectif MxM jouent abondamment sur les sensations visuelles et auditives : gros plans de Tom et Joy filmés sur écran géant – suggérant leur désarroi existentiel -, inquiétantes voix off, images vidéo subliminales, chamailleries technologiques de bug avec couinements lugubres… Un plateau au design glacial et des tapis roulants accentuent la crudité de ce lieu déshumanisé. Les personnages d’Electronic City y défilent, maussades, nous plongeant progressivement dans un oppressant Big Brother virtuel aux relents de réalité.

Le texte de Richter paraît surtout suggérer l’incohérence de la vie quotidienne de ces deux êtres [Tom et Joy], bouffés par le déracinement, soumis chacun différemment - mais tout aussi intensément - à une aliénation sociale, ici symboliquement exprimée par des sonorités technologiques familières : stridence de l’aéroport, clics d’ordinateur, sonneries de portables…

Cela nous vaut quelques scènes presque drôles comme celle de la vacataire paniquée, employée « stand by » qui doit affronter la colère d’une vingtaine d’hommes d’affaires après le bug de sa caisse enregistreuse. L’accent mis sur la torpeur provoquée par la fréquentation de lieux impersonnels (chambres d’hôtel de luxe au design minimaliste, business lounge d’aéroports) et quelques allusions aux séries télévisuelles à la mode (Urgences, Sex & The City) offrent également une certaine diversion.

Hélas, le texte de Richter insuffle le plus souvent l’ennui. En fait, Electronic City semble surtout prétexte à de fastidueux monologues sur des thèmes certes passionnants mais tellement rebattus, comme la manipulation des images, la tyrannie des réseaux de communications, la mondialisation de l’économie et de l’industrie du spectacle ou encore la peur diffuse face à la technologie envahissante. Du coup, les comédiens d’Electronic City, talentueux mais rivés à leur fonction de simples clones totalement désincarnés lisant de façon monocorde un texte plutôt moralisateur, prétentieux et sans humour, ont beaucoup de mal à nous convaincre.

Au final, Electronic City, pièce plus confuse que percutante, nous apparaît davantage comme une… Soporific City !

durée : 1 h 20

Electronic City, de Falk Richter, traduction d’Anne Monfort

Mise en scène de Cyril Teste avec le collectif MxM

du 31 mars au 11 avril 2010, à 20 h 30 sauf jeudi à 19 h et dimanche à 16 h, relâche lundi et mardi

Le Montfort Théâtre
106, rue Brancion 75015 Paris
Métro : Porte de Vanves