Bon anniversaire Anne-Marie Métailié, éditrice et femme de caractère

Bon anniversaire Anne-Marie Métailié, éditrice et femme de caractère

30 ans déjà ! Et quel chemin parcouru par Anne-Marie Métailié et la maison d’éditions qui porte son nom dans les dédalles en crève la dalle des débuts, jusqu’à ces jours meilleurs où son auteur Herta Müller remporte la palme du prix Nobel 2009. Un parcours singulier et atypique d’une éditrice qui a des tripes.

Cet article, c’est encore le Bartos qui me l’a suggéré en souvenir intense de sa rencontre avec Anne-Marie Métailié, il y a très très longtemps. Il venait récupérer un manuscrit refusé dans l’antre panaméen de l’éditrice aux yeux vert de braise et à la chevelure rousse. Elle lui avait même dit qu’il avait d’excellents dialogues dans son roman. C’est elle qui est en la cause. C’est à cause d’elle que le cave a commencé à se prendre pour un écrivailleur, bonjour les dégâts !

Au salon du livre de 2007 à Paname, alors que le Franckos exposait son premier roman publié au près de son éditeur frappadingue, je me suis éclipsée du délire de l’hydre. Mes pas m’ont menée en place de l’espace des rencontres entre auteur(e)s et public. Il y avait un beau jeune homme à l’écran et encore ravissant zieuté de près qui déclamait sa prose devant un parterre de mégères emportées. Faut dire, le zigue savait y faire avec les mots et son charme opérait à plein régime. La vie de marin de port en port, Querelle de Brest pouvait allé bien se fondre un bronze dans le zob. L’autre gus, il savait parler du coquillage de la femme que la marée de tantôt délaisse. Je n’en ai rien loupé. Il s’appelait Bernard Giraudeau et appartenait à l’écurie d’Anne-Marie. C’est à ce moment là que je me suis rappelée les propos du Bartos concernant cette éditrice hors norme et que je mes suis décidée à m’intéresser à son pedigree.

Fille dé vétérinaire, elle ne pouvait qu’être sympathique à une Singette toujours en bonne santé. Ex ancienne étudiante en langues et sciences politiques, chercheure en sociologie pour le compte de Pierre Bourdieu, elle se lance en 1979 dans l’édition avec perte et fracas et publie le récit d’un mercenaire allemand chez les Tupinambas du Brésil au XVI e siècle intitulé Nus, féroces et anthropophages. Pas vraiment sage la gent dame au charme fou ! Elle s’est accrochée au bastingage malgré les avis de tempête plusieurs fois émis contre sa maison.

Le flair, elle l’a toujours eu en filigrane de son art consommé. Grand bien, c’est elle qui publie le Chilien Sepulveda qui a trouvé un lectorat considérable avec son Vieux qui lisait des romans d’amour, puisque qu’avec son humour de bon aloi elle professe : Mais cela n’a pas toujours été facile de promouvoir tous mes métèques.

Aujourd’hui son catalogue expose pas moins de 750 titres avec une spécialité pour la publication dans le domaine de la littérature latino-américaine. C’est aussi une grande bougeuse d’aventure au service de sa passion : la littérature.

Un exemple encore du caractère affirmé de la charmante voyageuse. Sur le conseil d’un confrère italien elle part en Islande pour rencontre un auteur. Ni une ni deux, je file en Islande même si c’est une cause perdue. De nombreux éditeurs français veulent le récupérer à des prix sur lesquels je ne peux m’aligner. Je me rends chez son agent et j’insiste pour lire la version anglaise. Derrière moi, un colosse ricane. Je n’y fais pas attention et pars avec le manuscrit sous le bras. Le lendemain, on me rappelait pour me dire qu’Indridason, le fameux colosse, voulait signer chez moi car j’avais été la seule à demander à le lire.

Aussi étrange que cela puisse paraître, cet été la phrase mutine est tombée sur tous les télescripteurs : Je vends ma maison pour mieux continuer à la diriger, me concentrer sur mes auteurs et ne plus me préoccuper des questions de trésorerie.

Et comme encore une fois pour se jouer de son sort de femme combative et visionnaire, c’est elle qui édite le prix Nobel 2009, Herta Müller La Convocation. Etonnant non ?

Je suis d’autant plus rassurée sur son sort d’éditrice hors du commun lorsque j’ai entendu dernièrement sur les ondes de France Culture son enthousiasme intact dans tous ses combats de découvreuse en littérature.

Si j’en crois aussi l’emblème de sa maison d’éditions, la salamandre se joue des flammes et a un flegme à toutes les épreuves. Je ne peux que souhaiter un joyeux anniversaire aux éditions Anne-Marie Métailié et encore et toujours que sa digne créatrice nous apporte à lire des auteur(e)s de tous les continents de la planète terre, qui détonnent dans le paysage constipé de la littérature du nombril qui prend la place du cerveau et du cœur.

Longue vie en harmonie avec son amour de la littérature à cette dame très digne.

A suivre mes chroniques au sujet d’Alicia Dujovne-Ortiz L’étoile rouge et le poète et de Joseph Bialot 186 marches vers les nuages aux éditions Métailié