Mary Stuart – La reine aux trois couronnes…

 Mary Stuart – La reine aux trois couronnes…

Ecrivain et historien, né en 1959, Luc Mary - dans sa nouvelle biographie - nous retrace la vie mouvementée de Mary Stuart (1542-1587). Un personnage historique des plus controversés, objet de tout un mythe littéraire, qui finira décapité dans une sombre forteresse anglaise…

La biographie de Luc Mary, Mary Stuart - La reine aux trois couronnes, se lit comme un polar ! Un polar des plus sanglants, car l’environnement sociopolitique dans lequel évolue la reine d’Ecosse est tout sauf un long fleuve tranquille. Après Les Derniers Jours des Romanov [cf. chronique du Mague du 21/10/2008] – qui retraçait le tragique destin du dernier tsar russe Nicolas II et de sa famille -, Mary nous fait pénétrer dans une autre époque mouvementée, celle de la seconde moitié du XVIe siècle, agitée par les tensions religieuses entre catholiques et protestants.

Dans un théâtre de coups tordus, de sang et de fièvre dynastique, nous voyons défiler les Valois, les Tudor et les Habsbourg, symboles de l’appétit insatiable des grandes puissances… Les intrigues se nouent sur les champs de bataille ou dans d’immenses châteaux. Dans ces derniers, les grands du monde – Henri II, Philippe II, Marie Tudor ou Elizabeth Ire – décident des affaires du monde.
Dans un tel environnement, le petit royaume d’Ecosse, qui choisit comme reine - à l’âge de 9 mois ! - Mary Stuart n’a qu’une place bien secondaire.

Après un rappel de l’histoire de l’Ecosse, qui embrasse celle de la dynastie des Stuart, le biographe nous conte le surprenant parcours d’une jeune souveraine, quittant ses Highlands et ses forteresses lugubres pour devenir reine de France en 1559. Là, elle goûte à la vie pailletée de la Cour caractérisée par le raffinement et les arts de la Renaissance. Cette période de bonheur sera de courte durée, car son mari (François II), malade chronique, meurt l’année suivante.

Son retour en Ecosse la ramène aux dures réalités et semble accélérer le cours de sa vie tragique. Méthodiquement, l’historien met en parallèle le tumulte social de l’époque et le grondement despotique de la vie sentimentale de Mary Stuart. Dans cette saga toute guerrière – qui s’étale sur près d’un demi-siècle de soulèvements nationalistes -, les grandes gueules ne manquent pas : John Knox, prédicateur excité et héraut calviniste, adversaire impitoyable de la « putain Stuart », le clan des Guises, superpapistes, surtout connus pour leur rôle dans le massacre de la Saint-Barthélemy, Elizabeth Ire, experte en jonglage diplomatique, tentant d’établir une voie moyenne entre le protestantisme calviniste et le catholicisme. Le conflit, qui l’oppose à Mary Stuart – sa cousine - est à la fois humain, religieux et politique.

La fille de Jacques V suscite des rapports plutôt destroy. Son secrétaire David Rizzio, poète, musicien et maître de ballet des affaires du royaume est assassiné devant elle. Elle épousera un certain lord Darnley, grand seigneur catholique efféminé, qui sera également tué – certains historiens émettent l’hypothèse qu’elle aurait commandité ce meurtre. Son troisième mari, Bothwell, est… l’un des meurtriers de Darnley. Victime de l’ambition de ses adversaires, étrangère en Ecosse, elle se réfugie dans l’Angleterre d’Elizabeth, qui la fait emprisonner. Déplacée de prison en prison, elle sera finalement décapitée à 44 ans, le 7 février 1587, dans la sombre forteresse de Fotheringay.

Luc Mary conclut page 307 :

« Plus romantique que politique, plus maladroite que machiavélique, plus femme que reine et plus témoin qu’actrice de l’Histoire, Mary Stuart est une héroïne des temps modernes, prisonnière d’un siècle qui n’est pas le sien. » […]

Héroïne ? En tout cas, la reine décapitée devint un personnage littéraire qui marqua l’esprit aussi bien des poètes (Spencer, la Reine des fées, Lope de Vega, la Couronne tragique de la Sérénissime reine d’Ecosse) que des romanciers (Scott, le Page de Marie Stuart). Le caractère sombre – mélange détonant de politique et d’alcôve royale sur fond de querelles familiales - ne pouvait que séduire, également, les auteurs dramatiques (Montchrétien, l’Ecossaise ou Marie Stuart, les Marie Stuartd’Alfieri, de Schiller et de Swinburne). Macbeth, le célèbre drame de Shakespeare, aurait été en partie inspiré par le destin fatal de la reine fantasque.

On signalera naturellement l’excellente biographie de Stefan Zweig, souvent mentionnée (1), dans Mary Stuart – La reine aux trois couronnes. Au cinéma, l’on notera le Mary Stuart (1936) de John Ford avec Katharine Hepburn et le Mary Stuart, reine d’Ecosse (1971) de Charles Jarrott avec Vanessa Redgrave. Quant au film Mary Queen of Scots de Peter Surren avec Scarlett Johansson dans le rôle de Mary Stuart, sa sortie est prévue en décembre 2009.

(1) Mary Stuart, Insel-Verlag, 1935, (réédition Livre de Poche, 2007).

Mary Stuart – La reine aux trois couronnes, Luc Mary, éditions de l’Archipel, 312 pages, 2009
Prix : 19, 95 euros

du même auteur aux éditions de l’Archipel :

Les Derniers Jours des Romanov, 2008

Vauban, le maître des forteresses, 2007