Les jumeaux à fêlure de peau

Les jumeaux à fêlure de peau

« Donne-moi la main », deux frères jumeaux / frères amis / ennemis sur la route à la recherche de leur personnalité propre, filmés par Pascal-Alex Vincent et vogue la galère du cinéma indépendant français qui a quelque chose à raconter en dehors du star système des grands budgets et de la frime bling bling.

Dans la verve du cinéma sur la route hollywoodien des années 70, ce film, premier long métrage de Pascal-Alex Vincent sorti sur les écrans en février 2009, suite à deux courts est l’aboutissement d’un long et persévérant travail. Il s’inscrit après « Bébé requin (2005), un court de 15 minutes où l’on retrouve les deux jumeaux en prise directe avec l’amour physique sans partage pour une fille et les castagnes masculines. « Tchernobyl » (2009 / 6 minutes), et, toujours la thématique de la jeunesse qui baise en forêt cette fois et le transistor qui déverse sa bille à propos de l’explosion de l’usine nucléaire en Ukraine. Ces deux courts-métrages sont joints au DVD.

Les frangins Alexandre et Victor Carill ont pris de la bouteille et ne sont toujours pas des comédiens professionnels. « Pour tout bagage on a vingt ans » (Léo Ferré)… l’expérience de la vie en moins. Un papa gâteau aux fourneaux et une maman décédée, à peine connue qu’ils décident de rejoindre à son enterrement en Espagne. Point à la ligne au départ de ce film tourné en quatre semaines et décors naturels, avec une équipe réduite et forcément tant mieux avec un petit budget.

Le scénario s’est construit à partir du témoignage des deux frères. Dans le film, ils sont Antoine et Quentin, l’un rebelle et l’autre dessinateur introverti à ses heures. A pied, en train, en bagnole, ils se bagarrent le regard dans l’œil de l’autre, comme si le miroir réfléchissant de leur bouille leur renvoyait un autre eux-mêmes dégrossi. Ils font les foins pour du blé et l’un rencontre le corps à corps plaisir avec un autre jeune homme. Ce qui déclenche une rupture entre les deux frères.

D’autres rencontres ponctuent le film et conspuent leur séparation sur des chemins de traverse. O joie de retrouver Katrin Sass dans le train après son interprétation dans « Good bye Lénine ». D’autres accents, d’autres solitudes dans des paysages mirobolants nous carambolent les sens en émoi. Telle cette Clémentine, jeunette paumée qui attend le prince charmant à la station service dont elle tient la caisse et encaisse jusqu’à ce qu’un frangin lui tape dans l’orbite...

Dans le jeu des différences malgré tout, de cette ambivalence visible au grain de peau chez les jumeaux, ils tirent leur révérence à leurs attirances réciproques. Lorsqu’ils sont séparés, ils s’appellent, ils épellent le prénom de l’autre.

La bande son très importante, le montage, les cadrages léchés concourent à les suivre à la bourre derrière notre écran dans un déhanchement lambinant. Finalement, chacun de leur côté par je ne sais quelle fratrie du hasard, ils parviennent à destination sous les brumes d’automne du port de Bilbao.

Dans ce dernier plan, la nature humaine reprend ses droits et fait la nique au décor industriel. A la vie, à la mort…. Mais quel rapport avec le titre de ce film : « Donne-moi la main ». Peut-être que le refrain de « Melocoton », la chanson de Colette Magny apaise les deux frères à un retour à la tendresse, après ces épreuves de perte et ses repères du retour aux sources. Quelle fabuleuse idée d’avoir convier Colette au bal de la fratrie !

Après avoir quadriller la jeunesse en image, je suis vraiment curieuse de voir prochainement, sur quelles pistes nouvelles glissantes Pascal-Alex Vincent nous entraînera.

Donne-moi la main de Pascal-Alex Vincent, avec Alexandre et Victor Carril, Anaïs Demoustier, Katrin Sass…, éditions DVD supervisée par le réalisateur, DVD 9 – Master Haute Définition, Dolby Digital 5,1, Format 2.35 respecté, 16/9 compatibilité 4 / 3 – Couleur, durée du film 76 minutes, 23 septembre 2009, prix 19, 99 euros, distribué par Bodega Films

Suppléments : Making-of : 24 minutes / 5 scènes coupées : 8 minutes / Bébé requin (2005 – Couleur – 15 minutes) / Tchernobyl (2009 – Couleur – 6 minutes) / bande-annonce / Galerie photos