Bangkok : sexe drogue end corps de jade

Bangkok : sexe drogue end corps de jade

« Bangkok 8 » de John Burdett, à tombeau ouvert entrez dans les transformations des corps, le trafic de jade, la prostitution à gogo, la corruption and co. Bangkok à la croisée du Sud Est asiatique en cloque de son ex occupation des sols par les ricains sur fond d’ascèse karmique de ses bouchons de pollution. Le vieux Bouddha s’accommode fort bien de ses nouvelles conditions.

L’inspecteur Sonchaï Jitpleecheep, alias « le flic moine », transgresseur des enquêteurs en mode rationnel occidental, médite ses affaires selon le gros Bouddha. Il sévit intègre dans le district 8 de Bangkok, entre son colonel de police (le commissaire) et ses collègues, tous abonnés présents aux fins de mois à l’aise corruption en tout genre. La faune et la flore humaine du quartier représentent une clientèle hétérogène et zones érogènes à choix multiple. Putes, trans, crackés motards / dealers d’amphés ex-Kmers rouges paumés selon le saint bréviaire de Pol Pot, puisqu’il faut bien le reconnaître : « Il y a des aberrations dans la voie bouddhiste, comme toute autre. Pol Pot était moine avant qu’il ne décide de tuer un million de ses compatriotes » (page 334).

Mauvais Karmarx, mon pote ! En revanche pour notre héros, il n’est pas contradictoire sous ses latitudes d’être né métis d’un savant dosage G.I et thaï. Issu de la matrice d’une maman prostituée dès ses seize ans, depuis son territoire dédié au repos des guerriers yankees durant la der des ders du Vietnam, notre moine policier prend aussi ses aises avec l’alcool , la ganja et même les amphés.

John Burdett son auteur était avocat à Hong Kong dans un cabinet d’aisance britannique avant de se jeter dans l’écriture et faire ses avances en France et en Espagne puis renouer avec ses sources d’inspiration en Asie. Bangkok est son héroïne d’au moins deux romans (Bangkok Tattoo et Bangkok Psycho).

Dans le présent tome Sonchaï flanqué d’un collègue et ami file la Mercedes d’un kaki ricain black, lorsque ça tourne mal la roue de la fortune avec mort d’hommes dans des conditions délicates en queues de serpent ! Il se jure de venger son aminche sur fond de prostitution variée tant féminine que masculine et inter ethnique. Je ne vais pas émasculer le sujet plus avant, sinon à quoi bon lire ce roman vivant et très épicé, comme la nourriture en ces contrées. Blindez-vous l’estomac, ce livre noir est un plat qui se digère à froid.

Lorsque Sonchaï doit faire équipe avec une charmante « farang » (étrangère) du FBI qui en pince pour son pedigree, il s’emporte contre elle : « Il y a entre nous une incompatibilité culturelle autant que spirituelle. Vous voulez dire que ma personnalité caustique d’Américaine vous rebute, hein ? ». (page 294) La mort ici bas n’est pas un problème, la réincarnation veille à vos besoins. On est loin de l’ongle incarné du doigt de pied de ma cousine Berthe ! Sonchaï sait y songer dans le rapprochement des corps : « Je n’ose pas lui dire qu’elle est appelée à revenir maintes fois dans mon pays. Je prévois que l’attrait du pays lui travaillera la chatte, au début du moins. La voie qui mène au cœur des farangs passe invariablement par les parties génitales ». (page 199) Même si parfois avec la foi, les conception de la maréchaussée se rejoignent d’un continent à l’autre : « Les flics américains et thaïs sont identiques au moins à un égard : nous sommes tous des réincarnations de filous » ; (page 156).

John Burdett ne nous épargne pas non plus la curiosité des touristes en mâle de se sustenter les bourses selon le cérémonial du carnaval commercial. « La vérité est que la prostitution remplit de multiples fonctions sociales. Elle remplace la sécurité sociale, l’assurance maladie, les prêts aux étudiants ; c’est aussi un passe-temps rémunérateur ainsi que le passeport pour la richesse que beaucoup de femmes modernes attendant de la vie. Elle apporte en outre au pays d’énormes quantités de devises étrangères, ce qui veut dire que le gouvernement n’envisagera jamais sérieusement de la supprimer ». (page 140)

Dépaysements et préjugés assumés, John Burdett défraye toutes les réalités des corps en suspension et en dispersion de cette métropole, sans jamais sonner le tocsin de la morale occidentale. Il nous convie à un festin nu et trépident. On vit, on découvre un autre univers. La littérature ne défaille pas et débraille tout son attirail pour nous scotcher aux basques de Sonchaï. Dans sa note de l’auteur, John essaye de caresser la susceptibilité de ses lecteurs concernés : « Les romanciers sont des opportuniste, et il est évident que je n’ai pas hésité à m’inspirer de ces affaires de corruption pour les besoins de mon récit, liberté qui je l’espère, me sera pardonnée. Je souhaite que les flics thaïs qui tomberont sur ces pages frivoles n’y trouvent rien d’autres qu’un humour bien veillant ». (page 421)

Sacré John ! Elle est bien bonne ta prose et tes maux d’esprit si british, que je serai très intéressée de lire tes autres romans pas vraiment kitchs.

La collection « domaine policier » des éditions 10 / 18 représente une mine de lectures pour celles et ceux qui prennent plaisir à s’ouvrir de nouveaux horizons.

Bangkok 8 de John Burdett, éditions 10 /18, collection domaine policier, traduit de l’anglais par Thierry Piélat, nouveau tirage juin 2009, 421 pages, prix : 8,60 euros