Nouvelle édition de "Mein Kampf" en Allemagne

Nouvelle édition de "Mein Kampf" en Allemagne

Les autorités fédérales de la Bavière ont encore à examiner quelques points de détail, mais il est d’ores et déjà certain que L’institut historique de Munich souhaite présenter une édition scientifique de "Mein Kampf", le livre-programme écrit par Adolf Hitler alors qu’il purgeait une peine de prison après une tentative manquée de coup d’État.

Le projet doit voir le jour en 2015, et ce n’est pas un hasard. Pour le soixante-dixième anniversaire de la fin de la seconde guerre mondiale, une édition scientifique du livre maudit qui expose la doctrine et les théories du IIIème Reich fait l’objet d’une attention particulière et inhabituelle des historiens bavarois et du gouvernement de Munich qui travaillent dans "un dialogue constructif", selon l’institut historique (IfZ) de la ville. Une nouvelle édition critique de "Mein Kampf" doit paraître en Allemagne.

Il y a tout juste un mois, Wolfgang Heubisch, tout nouveau ministre de Bavière pour la Science, a encouragé les historiens rassemblés à l’IfZ dans leur projet : "S’il faut que l’ouvrage d’Hitler soit édité, le danger existe que des charlatans et des néo-nazis se saisissent de cette œuvre ignoble dès que les droits d’auteur de l’État libre de Bavière seront forclos". Contrairement à l’opinion généralement partagée par ses prédécesseurs, car Wolfgang Heubisch n’est pas membre de la CSU, mais du FDP, il a répondu favorablement à la proposition de l’IfZ de débuter immédiatement les travaux pour une nouvelle édition du livre.

Grâce aux éditions pirates et à l’heure d’Internet, il est à présent possible à qui le désire de se plonger dans le texte de "Mein Kampf", en version originale ou dans deux douzaines de langues au moins. Mais renoncer à l’interdiction offrirait des opportunités à l’extrême-droite pour s’emparer de la doctrine nazie. Plusieurs années avant la prise du pouvoir en Allemagne par son auteur, Adolf Hitler, le livre est resté rare et peu diffusé. Ce n’est qu’après cette date que les libraires et les bibliothèques l’ont commandé massivement. Aujourd’hui, la plupart des historiens estiment difficile et coûteux de mettre une édition critique et historique sur le marché. Ainsi en est-il du ministère des Finances de Bavière, qui s’accroche aux droits qu’il détient sur le texte.

Les droits sur ce livre appartiennent en effet au ministère des Finances bavarois. Et celui-ci s’est toujours fermement opposé à une éventuelle réédition de "Mein Kampf", même augmentée de toutes sortes de précautions dialectiques. Si le nouveau partenaire de la coalition au pouvoir en Bavière n’a pas totalement réussi à faire valoir un point de vue différent, c’est la constatation de l’échéance au 31 décembre 2015 de la protection juridique sur le traité programmatique d’Adolf Hitler qui a motivé une réaction.

À l’automne 2006 ont été acheté des feuillets par un collectionneur américain dans une salle des ventes de Munich. L’acquéreur a fait appel à un spécialiste de l’histoire d’Adolf Hitler, Florian Beierl, qui a travaillé avec l’historien Othmar Plöckinger à l’authentification des documents. Ils correspondent précisément à l’élaboration de 5 chapitres du livre maudit paru en 1925. Adolf Hitler a écrit la première partie de son livre pendant son séjour en prison dans la forteresse de Landsberg, en Haute-Bavière. Il y a purgé une peine de 5 ans de prison après sa tentative de coup d’État à Munich les 8 et 9 novembre 1923. C’est en détention, avec l’aide de son secrétaire personnel Rudolf Hess et son conseiller Emil Maurice qu’il a fondé sa doctrine à partir d’avril 1924.

Mais pour établir une édition historique et critique digne de ce nom, les spécialistes estiment avoir besoin de plusieurs années pour y pourvoir. L’IfZ a donc décidé de travailler sur le projet, sans toutefois requérir les autorisations nécessaires à un visa pour publication, en soumettant des "travaux préparatoires" à l’autorité. Ceux-ci l’auraient contraint à de coûteuses recherches, et affronter l’hostilité du ministère des Finances à Munich. Le détenteur actuel des droits a dû reconnaître les conséquences de la fuite du temps et achever au plus tôt les entretiens appropriés avec des historiens raisonnables. Et plus il reste de temps aux scientifiques, plus cet ouvrage controversé aura l’occasion de révéler sa vraie nature.