Julien Dray n’a pas dit son dernier mot

Julien Dray n'a pas dit son dernier mot

Dans une campagne de déstabilisation qui vise Martine Aubry dans ses fonctions de Première Secrétaire du Parti Socialiste, les ambitions de Julien Dray se voient à nouveau légitimées par la possibilité qui lui est offerte d’accéder aux pièces du dossier que la brigade financière a constitué à son sujet.

"Dites-le vous une fois pour toutes : mes pendules sont à l’heure, mes montres sont réglées, merci", s’exclame Julien Dray dans un dernier billet déposé sur son blog. "Et heureusement que leur tic-tac est là pour me distraire des inepties que je peux lire" ! S’il se sent libéré par l’opportunité qui lui est offerte — une innovation, précise le quotidien vespéral — pour répondre aux charges qui pourraient être intentées contre lui, Julien Dray voit le chemin se dégager devant lui.

Une enquête préliminaire pour "abus de confiance, faux et usage de faux" vise le député, mais surtout, empoisonne sa vie et neutralise une action qui aurait pu lui permettre de poser une passerelle entre les partisans de et les opposants à Ségolène Royal à la tête du PS. Le procureur de Paris a proposé aux avocats des personnes mises en cause dans l’enquête de police de leur transmettre les procès-verbaux d’interrogatoire afin qu’ils puissent, le cas échéant, soumettre des demandes complémentaires.

Julien Dray avertit dès lors le public que la curée a pris fin, et qu’il retrouve toute sa liberté pour s’exprimer. Il revient sur les échanges peu amènes entre Martine Aubry et Manuel Valls, auxquels il a décidé de participer en demandant aux socialistes de définir une ligne politique claire et de restaurer le leadership de la direction du parti. Une prise de position que la presse a commentée de manière abondante la semaine dernière… Preuve s’il en est, que l’influence de Julien Dray demeure incontestable dans l’opinion publique.

Le député de l’Essonne prend une fois de plus Martine Aubry à partie, "à partir du moment où l’on prend la responsabilité de déballer de telles missives sur la place publique, on s’attire des réponses elles-mêmes publiques, fort logiquement". Et tout en justifiant sa propre attitude au sein de cette cabale, il propose une piste qui en dit long sur la manière dont les dirigeants socialistes envisagent leur communication : "Je pense que cette "fuite" est d’ailleurs tout sauf un hasard".

Attribuons par hypothèse un autre sens à cette dernière phrase de Julien Dray, en la plaçant dans le contexte de l’affaire qui l’a tenu en haleine pendant plus de 6 mois, et qui l’affecte à ce point qu’il a pris la peine d’y revenir dans son dernier billet pour prévenir ses détracteurs qu’il n’est pas près de se faire lyncher par quelques énergumènes. Tout le monde s’est en effet posé la question de savoir par qui la presse a été avertie des perquisitions qui ont été diligentées le 19 décembre 2008 à son domicile.

Le public s’est trouvé très surpris de voir les sbires de l’UMP prendre la défense de Julien Dray en arguant de la présomption d’innocence, alors que les socialistes ont fait profil bas. Cette affaire est venue juste après la tenue d’un congrès du Parti Socialiste, à Reims du 14 au 16 novembre 2008. Tout le problème à l’époque, était de trouver un accord pour intégrer les partisans de Ségolène Royal dans un nouveau dispositif géré par Martine Aubry. L’expérience à la direction du parti de Julien Dray comme ses liens privilégiés avec la candidate à l’élection présidentielle de 2007 lui auraient permis de jouer un rôle de premier plan dans une solution de compromis.

Il semble que les congés d’été soient devenus le prélude à une tentative de déstabilisation de Martine Aubry, qui se voit fragilisée par le mauvais résultat aux élections européennes de son parti en général, et de Benoît Hamon en particulier. Les soutiens de ce dernier, qui ont réussi à verrouiller la direction du PS, se sont vus couper l’herbe sous les pieds en même temps que leur leader a perdu son siège à Strasbourg. "Mais j’enrage de voir qu’il n’est pas à la hauteur de la tâche qui devrait être la sienne dans une telle situation", écrit Julien Dray.

"Avec ce choc qui venait sanctionner durement la (non) ligne politique qui avait remporté le congrès de Reims, elle pouvait trouver les moyens de s’émanciper de la coalition hétéroclite qui l’avait installée rue de Solferino", avait-il estimé à l’intention de Martine Aubry. Il semble bien que Julien Dray trouve avant l’université d’été la force et les moyens pour œuvrer à une tâche dont il a été privé le temps de détourner l’attention du public des problèmes de fond dans lesquels se débat le PS et de l’immobiliser pour y mettre une instance dirigeante sur pied.