Le roi des Belges s’en prend aux financiers

Le roi des Belges s'en prend aux financiers

À l’occasion de la fête nationale en Belgique, le roi Albert II a prononcé un discours très critique à l’égard des financiers.

En effleurant la question des communautés linguistiques, le roi des Belges Albert II s’en est surtout pris au secteur financier sur le réseau de la RTBF : "Dans le secteur financier beaucoup de responsables ont succombé à la pression des marchés pour générer à court terme des marges de profits toujours plus élevées, souvent irréalistes et sans rapport avec l’économie réelle". Le discours du souverain s’est en effet focalisé sur les conséquences de la cupidité humaine dans la crise économique.

"Au-delà du secteur financier", s’est inquiété le monarque, "nous pouvons aussi nous interroger sur le caractère de plus en plus matérialiste de nos sociétés et sur la nécessité d’accorder plus de place aux valeurs familiales, à celles de la convivialité, de la solidarité et du respect de l’autre". Bien sûr, ces belles paroles empreintes d’une spiritualité religieuse qui appartiennent à une autre génération prennent une tonalité désuète et charmante. Les pouvoirs réels du roi des Belges sont autant bridés par une constitution parlementaire que par la structure communautariste de la société.

Ainsi souhaite-t-il voir se développer une éthique compatible avec un développement harmonieux de l’économie. C’est vrai en Belgique, mais aussi partout dans le monde, "Ces comportements individuels et collectifs ainsi qu’un contrôle insuffisant des intermédiaires financiers ont provoqué une crise financière mondiale dont l’impact sur l’économie réelle est lourd". La récession qui frappe un petit pays de 10 millions et demi d’habitants au carrefour des échanges commerciaux est sans rapport avec ses responsabilités dans la crise économique.

"Des millions d’emplois disparaissent de par le monde", constate le roi Albert II, "et la crise a créé dans les pays en développement des effets disproportionnés touchant les populations les plus vulnérables". Sans doute est-ce en enfonçant des portes ouvertes ou en énonçant des lieux communs que les progrès se réalisent mieux… Ou comme en France, une telle dialectique offre une opportunité remarquable pour ne pas faire face aux questions qui se posent au pays.

C’est d’ailleurs pourquoi "Il me paraît donc très important de plaider pour le développement d’une éthique dans le domaine économique et financier", a-t-il déclaré. Fort heureusement, seuls les pauvres gens auront une larme à l’œil en écoutant les belles résolutions d’un vieil homme qui s’est fait ballotter par les grands cataclysmes du XXème siècle, tandis que les financiers y voient de nouvelles opportunités d’affaires. Des "contrôles devront non seulement être renforcés mais aussi internationalisés".

Renforcer la mondialisation de l’économie passe aussi par une internationalisation de sa réglementation, de manière à la placer dans des mains habiles et sans pouvoir de contrainte. "Celle-ci doit évidemment s’accompagner d’une mise au point de certaines règles et normes à respecter pour le contrôle des intermédiaires et des produits financiers". De cette manière, les donneurs d’ordre gardent les coudées franches pour imposer une stricte discipline à leurs sous-traitants qui doivent se conformer à une réglementation nationale tatillonne alors qu’ils bénéficient de toute latitude pour accélérer les flux de capitaux dans le monde.

"À la pression des marchés s’est ajouté le stimulant des méthodes de rémunération complémentaire des dirigeants, les bonus", énonce le roi des Belges. "Ils étaient fonction de la réalisation de ces objectifs". Les dirigeants de ces entreprises livrées pieds et poings liés à la cupidité de fonds spéculatifs et de financiers malhonnêtes qui garantissent un revenu minimum aux investisseurs sont juste récompensés des performances financières dégagées grâce à une gestion brutale par des rémunérations mirifiques. Ainsi la société Continental vient-elle de présenter un bénéfice trimestriel en hausse de 40 millions d’euros.

L’éthique pour le roi des Belges s’accompagne alors par une limitation des rémunérations de ces exécutants zélés. "La nécessité de normes s’applique aussi à l’ensemble de la rémunération des dirigeants". Les cadres supérieurs et exécutifs sont donc bien mal récompensés pour leurs services, puisqu’ils se voient désormais considérés de la même manière que le plus humble de leurs salariés. Les patrons doivent également être mis à la diète. Cela nous paraîtrait drôle s’il s’agissait d’une blague belge, mais c’est une recette qui sera bientôt appliquée dans tous les pays industrialisés.