Une plage de questions aux Girls in Hawaii

Une plage de questions aux Girls in Hawaii

Les "Girls In Hawaii" sont une petite révélation. Dans la même maison de disque que la dame Bruni, ces jeunes belges partent sur les mêmes bases (bouche à oreille, écoute, et grosses ventes) mais pas dans la même veine. Eux ce serait plus Top of The Pop et recherche d’intérêts dans un groupe de musique rock. Planant, instinctif, sans mobile apparent de prise de tête, ’From Here To There’ leur premier opus est essentiellement là pour donner du plaisir mais aussi pour envisager du spleen sur le plat pays.

Rencontre dans un musée pour parler de musique active.

Comme le lieu s’y prête, Je voulais savoir pourquoi avoir inscrit une phrase de Jenny Holzer (artiste conceptuelle) en ouverture de votre album ?

Girls in Hawaii : « On aimait bien l’idée de mettre une page blanche avec un tout petit message. C’est peut être pompeux, mais le concept qu’a Jenny Holzer c’est de prendre des phrases hyper bateaux et de les mettre sur un piédestal. Pour nous c’était amusant de mettre sur cet objet sacré qu’est notre premier album une phrase qui est un super lieu commun. »

Comment s’est déroulé l’enregistrement de l’album ?

Girls in Hawaii : "Nous avions beaucoup de pression, c’était très tumultueux. Il y a des jours où nous n’étions plus du tout sûrs de savoir et pouvoir « faire un disque » ».

Cette pression venait du fait que vous aviez eu un super bon écho sur le 5 titres déjà sortis ?

Girls in Hawaii : "Oui sur ça, mais aussi sur le deal signé chez Naïve. Il faut savoir qu’ils nous ont signé sans avoir presque rien entendu de l’album. On avait super peur de le rater. Pour rajouter du piment nous avons tout fait nous même : à la maison, sur une période assez longue. Tu passes logiquement par des moments de doute et de fatigue. Pendant un an et demi de ta vie tu fais tourner ta vie autour de ce projet, tu ne peux décemment pas accepter que ton album ne te plaise pas, cela aurait été la fin du monde. »

Comment qualifieriez-vous le son de votre groupe ?

Girls in Hawaii : " Nous essayons de faire des chansons pop avec l’idée de fraîcheur. Pour revenir sur la pression, là aussi cela rajoutait un problème important cette notion. Parce que tu dois les jouer en live tout en les enregistrant, tu dois les mixer tout en préparant le CD qui va sortir dans le commerce et fatalement à un moment tu perds de cette insouciance que doit rester notre musique. Tu n’as plus le recul nécessaire tout en gardant conscience de faire un truc intéressant et diversifié. C’est troublant. »

Comment se sont passés les premiers jours post-sortie de l’album alors ?

Girls in Hawaii : "On n’assumait pas du tout mais maintenant cela va mieux car nous avons eu de super bon retour dessus. Ton regard sur le disque change. On était très sensible au feed-back. »

Quand des mecs comme Nick Kent (ou moi) faisons des critiques de votre album, qu’est ce que cela vous fait ?

Girls in Hawaii : "Pour Nick Kent cela nous a bien fait rire car il a comparé notre album au double blanc des Beatles. Mais c’est toujours chouette d’avoir des papiers dans Libération ou dans n’importe quel journal.pour en dire du bien surtout. Au début tu guettes la moindre chose pour savoir si cela va bien se passer. »

Pour vous avoir vu sur scène avant de savoir ce que donnait votre album, j’ai été ravi du passage sur disque. Vous avez géré convenablement l’écueil de l’enregistrement moins performant que le Live ?

Girls in Hawaii : "C’est très délicat. Ce n’était pas joué que cela sonne bien sur scène et bien aussi dans le studio. On compose toutes les musiques à deux, et savoir marier les deux versants d’une obligation artistique qui sont : le disque et la prestation sur scène est très difficile. »

Vous avez voulu produire ’From Here To There’ vous-même ?

Girls in Hawaii : "Essentiellement à cause du fait que produire un album en Belgique quand on n’est pas connu te donne le droit d’avoir un ingénieur du son ridicule dans un studio trop petit. Surtout, on ne voulait pas avoir de contrainte de temps tout en essayant d’apprendre le travail de production. Le faire par toi même, te fait jouer un jeu dangereux et casse gueule, mais tu peux inscrire ton disque dans ton quotidien. Travailler le week-end, le soir, en faire un carnet de bord sans avoir 3 jours de studio payés où il faut speeder comme des malades et où à la fin tu n’es pas content du résultat. On ne voulait pas enregistrer sur commande. »

Certains titres comme ’The Fog’ ou ’The Ship On The Sea’ semblent plus expérimentaux, dans une lignée de Radiohead d’aller pousser la musique et vous même dans des retranchements ?

Girls in Hawaii : "C’est plus une direction pour aller chercher ce que l’on a de particulier. Laisser le côté aventureux du groupe s’exprimer. A force de cumuler les morceaux pop on avait peur de faire un disque avec la même recette d’écriture tout du long. Ces chansons sont nées d’une volonté de composer différemment. Tu as toujours peur de tourner en rond. »

Votre musique très pop a t’elle été influencée par des gens comme Brendan Benson ou Mercury Rev ?

Girls in Hawaii : " ’Mercury Rev’ effectivement. ’Cat-Power’ aussi. ’Calexico’, ’Noir Désir’."

Ce sont tous des groupes qui vont plus loin que la simple chanson ?

Girls in Hawaii : "Ce sont des groupes qui n’oublient pas qu’il faut une bonne chanson à la base. Pour ça ce sont de vrais modèles. »

Vous êtes tout de même plus pop américaine qu’anglaise ?

Girls in Hawaii : "Oui. Dans la recherche du son et de la production on serait plutôt tourné vers ce côté outre-atlantique de la pop music. »

Justement, le fait de dire que vous faites de la pop-music, n’avez vous pas peur que ce soit immédiatement réducteur ?

Girls in Hawaii : "Non car l’on peut la faire bouger, la déstructurer. La rendre atypique. Pour moi la pop c’est juste une chanson au départ que tu peux chanter avec une guitare folk dans ta chambre. Le truc c’est de dépasser cette base avec l’expérimentation et la production. »

Comment s’est élaboré le choix des singles sortis ?

Girls in Hawaii : "Autant en studio nous gardons notre indépendance artistique, autant pour ce genre de choses nous essayons de voir ça ensemble avec la maison de disque. On essaye d’avancer nos titres chéris forcément mais c’est un travail de concertation."

’Flavor’ une des chansons, c’était pour vous faire plaisir, pour enregistrer une chanson plus rock ?

Girls in Hawaii : "Oui ! Celui là on aimerait bien qu’il sorte en single."

Vous devenez connus, vous faites beaucoup de dates, notamment le festival Aden à Paris. Comment se passe la transformation du passage d’une chambre d’adolescent où vous avez composé l’album à des sets publics avec des groupes comme ’Venus’ ou ’An Pierle’ ?

Girls in Hawaii : " De la richesse. Tout ce qu’on composait dans notre chambre c’était pour s’évader. Tu fais de la musique pour te libérer de ton univers où tu sembles prisonnier et finalement maintenant on nous le permet en vrai ! c’est exceptionnel et agréable. Surtout, cela t’amènes du crédit personnel, de l’enrichissement sur toi-même. Ce qui est bizarre c’est que le terreau du premier album c’est l’ennui, c’était pour remplir des moments vides. Maintenant avec notre petit succès nous n’avons plus l’occasion de ressentir cette impression. Quand on essaye de composer un morceau actuellement on n’en a pas forcément envie, je crois que cela re-nécessite quelques mois de spleen, de moments à ne rien faire. »

Malgré votre nom, on dirait que vous revendiquez par la pochette et les photos votre appartenance au Plat pays.

Girls in Hawaii : "C’est un pays étrange. Une sorte de no man’s land. Un mix de plein de choses. La Belgique est un beau pays et un pays moche en même temps. C’est très paradoxal. Les Ardennes c’est beau mais quand tu es belges tu ne trouves pas ça exceptionnel, tu as plutôt envie d’aller en Espagne au soleil. C’est un pays qui est tellement petit que tu as besoin d’évasion. Au delà de la Belgique, le choix des photos c’était aussi pour décrire très naïvement un retour à la nature. »

La nature semble très importante comme concept dans le groupe ?

Girls in Hawaii : "On n’est pas écolo juste soucieux de l’environnement dans lequel on vit."

Pour terminer et revenir sur cette artiste qui projette des phrases sur les murs, je voulais savoir si votre musique vous la considérez comme son concept, le moyen de faire passer un message ?

Girls in Hawaii : "On a vraiment voulu faire passer un message musical dans le sens de l’émotion. Tout simplement. Par exemple, faire une bonne mélodie basique pour décrire de la mélancolie c’est tout ce que l’on demande. La musique en terme d’émotions est beaucoup plus parlante pour nous que le cinéma ou plein d’autres choses. »

Girls In Hawaii,From Here To There, Naïve

Site officiel

Girls In Hawaii,From Here To There, Naïve

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