Le dernier coup tordu de la CIA

Le dernier coup tordu de la CIA

Un membre du Sénat des des États-Unis a confirmé dimanche les informations du journal américain The New York Times, selon lesquelles un programme anti-terroriste de la CIA a été caché au Congrès, ce qui est illégal, sur les ordres de l’ancien vice-président Dick Cheney.

La sénatrice démocrate Dianne Feinstein a expliqué dimanche à la chaîne de télévision Fox News que l’actuel directeur de la CIA, Leon Panetta, leur a révélé l’implication de Dick Cheney dans le secret d’un programme anti-terroriste, lors de son audition devant la Commission des Services Secrets, il y a deux semaines. Elle a dit que Leon Panetta leur a indiqué l’arrêt du dit programme.

Barack Obama a nommé Leon Panetta directeur de la CIA au début de l’année 2009. Il s’est fait fort de ne pas permettre des pratiques coercitives en matière d’interrogatoire, de prisons secrètes ou de transfert de suspects de terrorisme dans des pays employant la torture, un engagement considéré comme une rupture avec la politique de la CIA sous le Président George W. Bush. Ce programme dont il n’a pas révélé la teneur, aurait été porté à sa connaissance le 23 juin dernier par ses collaborateurs.

Leon Panetta aurait précisé que le programme a débuté après les attaques du 11 septembre 2001, mais n’a jamais été opérationnel. L’annonce d’une participation de Dick Cheney par The New York Times à un coup fourré de la CIA, apparaît tout d’abord comme une manœuvre de déstabilisation des démocrates, en ce sens que l’ancien vice-président républicain s’est révélé comme un contradicteur sérieux de Barack Obama en ce qui concerne la nouvelle doctrine de lutte anti-terroriste.

Pour autant, Dick Cheney fut l’un des promoteurs de méthodes controversées en la matière au sein de l’administration Bush. "Le directeur Leon Panetta nous a donné des informations voici deux semaines — je crois que c’était le 24 juin", a déclaré Dianne Feinstein, présidente de la Commission des Services Secrets au Sénat, "Il nous a dit qu’il lui a été signifié que le programme ne devait pas être rapporté au Congrès". Les démocrates Dianne Feinstein et Patrick Leahy, président du Comité Judiciaire au Sénat, ont insisté sur le fait que personne ne devait se mettre en travers de la loi.

Le contrôle parlementaire sur les activités des services secrets sont assez stricts aux États-Unis, après les scandales mis au jour par les commissions d’enquête Church et Pike sur les activités délictueuses de l’agence. Patrick Leahy a déclaré à la chaîne CBS, dans l’émission Face the Nation, à propos d’une éventuelle implication de Dick Cheney sur le secret imposé au programme : "J’aimerais bien savoir si c’est vrai ou pas… Je veux dire, personne dans ce pays est au-dessus de la loi" ! Les questions d’éthique revêtent une importance bien plus grande aux yeux des Américains que pour les Européens, et sans doute le monde entier.

"Vous ne pouvez pas dire à quelqu’un, bon… C’est le vice-président, il n’est pas obligé de se conformer à la loi", a reconnu Dianne Feinstein à la chaîne Fox. "Il y a un gros problème, parce que la loi est très claire". Pour le moment, le voile n’a pas été levé sur la teneur du programme anti-terroriste évoqué par The New York Times et les parlementaires de la Commission des Services Secrets. Leon Panetta a prétendu avoir clos ce programme de la CIA, qui demeure secret, qui ne serait jamais devenu opérationnel, qu’il n’aurait pas couvert les méthodes d’interrogatoires ou des activités de renseignements intérieurs.

Le sénateur républicain Jeff Sessions, membre du Comité Judiciaire, a déclaré à Face the Nation qu’il pensait que les accusations qui pèsent sur Dick Cheney allaient être étudiées. Interrogé à ce sujet, il a simplement répondu : "Bon… je suis sûr qu’elles le seront". Richard Hétu, correspondant du journal québécois La Presse à New York, écrit dans son blog que ce programme tellement secret qu’il est juste permis d’en parler sans savoir ce qu’il couvre, pourrait consister en un plan d’assassinats de soutiens présumés aux adversaires des États-Unis, d’une manière semblable à ce qui s’est produit pendant la guerre du VietNam, au cours de l’opération Phoenix.

"Je ne sais pas en quoi consistent les faits", a fait valoir Jeff Sessions. "Mais je crois que le vice-président Dick Cheney a probablement servi son pays avec autant de fidélité qu’il le pouvait ; et il a essayé d’agir d’une manière efficace". Mais il conclut de façon ambiguë : "J’espère que rien de semblable ne rejaillirait sur sa carrière exceptionnelle" !