La presse tabloïd pirate les téléphones portables

La presse tabloïd pirate les téléphones portables

Le chef de la police britannique a demandé jeudi l’ouverture d’une enquête sur le rôle de certains journalistes du groupe de presse britannique de Rupert Murdoch ont eu dans le piratage des téléphones portables de célébrités, de parlementaires et de personnalités.

Paul Stephenson, chef de la police de Londres a déclaré qu’un officier supérieur a la charge d’enquêter sur les informations parues dans le journal The Guardian, selon lesquelles des journalistes de News of the World ont commandité des détectives privés afin d’accéder à "deux ou trois mille" téléphones portables en Grande-Bretagne.

Le directeur de la publication de News of the World, du Sun et de l’austère The Times n’a n’a pas souhaité répondre aux sollicitations de la presse à ce sujet. L’ancien vice-premier ministre John Prescott, l’actrice américaine Gwyneth Paltrow et le top-model australien Elle Macpherson figurent parmi les victimes des écoutes téléphoniques présumées diligentées par les journalistes à la recherche d’histoires exclusives pour les journaux à scandales qui les emploient.

"J’ai demandé au commissaire auxiliaire John Yates d’établir les faits sur cette affaire et de les étudier en détail", a déclaré Paul Stephenson. John Yates a mené une longue enquête sur le scandale des récompenses pour services rendus qui a éclaté à la fin du gouvernement de Tony Blair. The Guardian précise que les détectives privés qui travaillent pour le compte de News of the World ont intercepté les messageries vocales et accédé à des données personnelles, comme les factures de téléphone et les relevés bancaires.

Le personnel du parti travailliste au pouvoir a de son côté réclamé une enquête sur le rôle de la police, des journaux de Rupert Murdoch et de l’opposition conservatrice, qui a fait appel à l’ancien rédacteur en chef de News of the World Andy Coulson comme directeur de la communication en mai 2007.

Le rédacteur en chef de News of the World avait démissionné après son que journaliste Clive Goodman a été mis plusieurs mois en prison dans une affaire similaire d’écoutes téléphoniques pirates sur les téléphones des membres de la famille royale. News International, la filiale de presse britannique du groupe international de médias News Corp, a déjà déboursé 1 million de livres sterling pour trouver un accord à l’amiable sur des affaires en jugement avec trois personnalités, dont Gordon Taylor, président de l’association des joueurs de football professionnels, selon les révélations du journal anglais The Guardian.

"L’énormité de ceci est tout simplement incroyable et soulève beaucoup, beaucoup de questions", a déclaré John Prescott à la BBC. L’autorité de la presse britannique, la Press Complaints Commission, et la société des médias du Parlement doivent mener des investigations parallèles et la police expliquer son absence de réaction à la suite des plaintes précédentes, a présenté l’ancien vice-ministre dont la vie privée aurait été bafouée.

L’ancien ministre de l’Intérieur Charles Clarke estime que le leader conservateur David Cameron, pour qui cette affaire est en passe de gêner le parti conservateur dans son ascension vers le pouvoir, devrait se séparer de son désormais encombrant directeur de la communication, Andy Coulson. "Je pense que c’est indigne", a expliqué Charles Clarke à la radio. "Nous avons besoin de réagir tout de suite" ! Il ajoute que le ministre de l’Intérieur Alan Johnson doit exiger un rapport sur les us et coutumes de la police.

David Cameron a cependant décidé de ne pas se séparer d’Andy Coulson, et a fait savoir : "Je crois qu’il faut donner aux gens une seconde chance". Le député britannique John Whittingdale, dont la commission parlementaire a étudié le cas de Clive Goodman, a déclaré que son groupe se réunirait prochainement pour envisager de rouvrir son enquête.

Un scandale en appelle un autre, et toute cette affaire fait malheureusement suite au scandale des défraiements des membres du gouvernement et parlementaires travaillistes. Il s’agit vraisemblablement de la réponse du berger à la bergère, la presse anglaise s’impliquant de manière plus active que dans la société française dans le débat public.

The Guardian est considéré comme un quotidien acquis aux idées travaillistes, tandis que The Times est proche des milieux conservateurs. Par ailleurs, l’ensemble des organes de presse de Rupert Murdoch, pour la plupart de ses tabloïds au ton volontiers populiste, et destinés à une clientèle recherchant des lectures où le scandale et le divertissement font bon ménage, s’appliquent en grande partie à se faire l’écho des petits travers dont ne sont pas exempts les personnes aux idées les plus généreuses.