Quand les ours du Médoc prennent les armes !

Quand les ours du Médoc prennent les armes !

Avis à la population ! Dans un communiqué de la presse régionale en ce jour du mercredi 1er juillet 2009, on pouvait lire qu’un ours armé d’un fusil avait été aperçu en plein jour à la sortie de Talais sur la départementale 1 E 4.

Une nuit d’orage, c’est une histoire incroyable j’ai rencontré l’ours du Médoc, un certain Ours Jenkins ! Le monstre du Loch Ness, à côté c’est de la nian nian pour topless.

J’ai réveillé le Bartos et l’est pressé de se rendre sur le lieu dit, sous les éclats d’un orage sans désespoir. C’était la nuit. J’étais parée d’une cape anticlapotis, vous connaissez ma sainte horreur de l’élément aqueux. Je me donnais de la peine pour cette enquête, sous la lampe tempête à dynamo de l’autre asticot de Bartos. Je savais par avance par ma connaissance du terroir médocain, que d’ici la fin de cette semaine, une battue serait organisée.

Il était cinq plombes du matin, sous les éclairs des bombardements de la foudre, on y zieutait comme en plein jour. Tout à coup j’ai entendu un coup de feu et j’ai senti cette nauséabonde odeur de poudre. Le Franckos avait plongé dans une flaque et se la jouait soupe au canard. Je me bidonnais. J’avais tout pigé. Dommage que la belle qui lui était destiné eut raté sa cible. C’est alors qu’en levant la tête, je le vis. Cette bête féroce, elle était vêtue comme ses ennemis dans sa tenue de camouflage.

C’était un camouflet et une injure à Dame nature, de voir ainsi une bête sauvage revêtue avec de tels oripeaux. Je n’osais lui souffler mot de mes impressions, tant il paraissait menaçant. Il allait achever d’une bastos le Franckos qui palmait pour se sortir vivant de cette situation inextricable et peu rationnelle pour le commun des mortels. Je levai la main pour parler et sans me dégonfler je lui dis :

"Je suis Missdinguette la Singette, chroniqueuse pour le Mague sur la toile et je ne manque pas d’air. La preuve, je suis venue à ta rencontre pacifiquement. Ne tue pas mon chauffeur, sa caisse ne vaut pas un clou et elle peut encore servir, d’autant que je ne sais pas conduire. Lire écrire, ça je sais, mais c’est un secret bien gardé".

Il paraissait interloqué. On parlait la même langue des animaux du Médoc, quoique, avec un léger dénivelé sémantique provenant de mon long séjour à Paname. Il me sourit et me prit dans ses bras :

"Alors, faisons ami-amie ! Oui, mais toi tu n’es pas une créature de la forêt"…

Je répondis du tac au tac et sans trac : "Je suis une femelle singe et les ours non plus, ça ne court pas les rues de la région. D’où, tu comprendras mon envoûtement pour notre rencontre. Déformation professionnelle oblige".

Le Bartos glougloutait et n’osait pas s’approcher de la scène.

"Tu peux venir", je lui dis. « Je te présente mon nouvel ami l’ours… C’est comment ton blaze déjà ?

— L’Ours Jenkins.

— Enchantée, lui c’est le Franckos dit Bartos, totalement insignifiant et souvent très chiant. Son manque de caractère, c’est tragique. Parle-moi un peu de ton histoire.

— Je suis né entre les doigts agiles et un esprit créatif d’un homme américain en visite dans le Médoc qui a entrepris une grande traversée de l’Atlantique pour accoucher de ma modeste personne ».

C’était assez confus. Je prenais toujours des notes, ça pourrait sans doute me servir. Il a un concept qu’il appelle Embeds, qui consiste à costumer des personnes réelles et les disposer à différents endroits dans la ville pour attirer l’attention des passants. Sauf que cette fois, il s’est adapté à son nouvel environnement et a voulu faire ressentir une certaine couleur locale.

"Ah oui je vois, d’où le fusil et ta tenue kaki. Si tu n’étais pas un ours, tu passerais totalement inaperçu tant les petits hommes verts armés jusqu’aux dents sont fréquents au pays".

Il se gratta le museau. Je pense certainement, d’autant que Mark Jenkins est très sensible aux problèmes touchant l’équilibre de la nature. Mais je ne suis pas en mesure de parler en son nom.

"Mais qui es-tu vraiment ? Comment tu te définis" ?

Il lâcha son fusil. Peut-être une œuvre éphémère… Je vais rester en bordure de cette départementale et voir un peu comment réagissent les habitants d’ici.

« T’es très courageux. Et si dans un mois je repasse et que tu es troué comme une passoire, on ne pourra pas dire que je ne t’avais pas prévenu des mœurs des gens d’ici qui ne vivent pas la fleur au fusil.

— Je veux tenter l’aventure.

— Quel cave, mais quel cave ce mec ! C’est même pas un vrai ours. C’est pas un vrai fusil. Quel dommage et moi qui croyais qu’enfin les animaux allaient se révolter contre leur condition de gibier. En route, on rentre ! Et merdre » !

Dans le cadre ouvert et transversal des grandes Traversée : Mark Jenkins, installations sur la commune de Talais dès le 2 juillet et dans le centre de Royan dès le 3 juillet.