Ministres mécontents d’être remerciés

Ministres mécontents d'être remerciés

Christine Boutin s’étonne d’avoir appris son éviction du gouvernement au "journal télévisé de 20 h sur TF1" alors qu’elle était depuis plus d’un an sur la sellette. "Yves Jégo mesure le véritable pouvoir d’un certain patronat et se prépare pour de nouveaux combats", lit-on sur sa page Facebook. Les états d’âme des ministres écartés ont-ils une raison d’être ?

L’ancienne ministre du Logement Christine Boutin s’est adressée au chef du gouvernement à la radio lundi matin : "François, t’aurais pu avoir le courage de m’appeler, quand même" ! Mais elle est la première à s’étonner de ne plus faire partie du casting gouvernemental… Elle dénonce un "délit de sale gueule" sans faire référence aux nombreux épisodes de tension qui ont émaillé ses relations avec le chef de l’exécutif, Nicolas Sarkozy.

Le ministère qu’elle a occupé est devenu un secrétaire d’État, confié au premier de la classe Benoist Apparu. Christine Boutin ne doit-elle pas plutôt se féliciter d’avoir si bien œuvré de manière à ce que le problème du logement en France ne nécessite plus les soins d’un ministère plein ? Son action au gouvernement a été émaillé par de nombreuses controverses avec les associations de défense aux sans-abri, et les administrés se rendront compte l’hiver prochain des réelles avancées en la matière.

"Sans doute que je n’ai pas assez communiqué", reconnaît-elle. "Qu’il s’agisse de la maison à 15 euros, du 1% logement, j’ai le sentiment d’avoir fait mon travail. J’ai d’ailleurs reçu plus d’un millier de mails de professionnels du secteur". Il est vrai que Christine Boutin n’est pas la plus diligente à répondre aux courriers qu’elle reçoit, et c’est sans doute un manque de politesse autant que de stratégie à combler lorsqu’on prétend à se mettre au service de ses concitoyens.

Jean-Pierre Chevènement l’a dit en d’autres temps, et d’autres gouvernements : "Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne" ! La vie des aigles au sommet du pouvoir n’est pas de tout repos… Hier courtisés, demain ignorés… pour être à nouveau adulés un autre jour. Christine Boutin ne doit pas ignorer que sa présence au gouvernement répondait à la nécessité de Nicolas Sarkozy de se ménager une aile conservatrice et bigote à droite, que les dernières élections n’ont pas plébiscité le 7 juin.

Par ailleurs, le chef de l’État a réussi à rétablir avec le Saint-Siège une relation plus cordiale pour un pays dont les élites se sentent toujours très attachées à une conception sans concessions de la laïcité. "Nous avons toujours notre place au sein de l’UMP, même si je m’interroge", fait savoir Christine Boutin. Ses maigres troupes iront-elle grossir les rangs des partisans de Philippe de Villiers ? Là aussi, le destin de cette dame est sujet à caution : "Mon franc-parler a pu irriter certains". Parfois même, il choque.

Car les ambitions de Christine Boutin sont aussi très liées à la nécessité de se trouver un point de chute. Les plans pour la recaser à la présidence du Conseil général des Yvelines ont été tirés sur la comète à cause de la mauvaise volonté de Pierre Bédier à se voir bouter hors de ses terres d’élection… Son poulain, Michel Vialay, vient d’être élu haut la main conseiller général à Mantes-la-Jolie. Pierre Bédier, rendu inéligible à la suite d’une condamnation dans une affaire de corruption, va donner du fil à retordre à l’UMP pour caser la dame patronnesse.

Une ambassade au Vatican ? Christine Boutin semble y croire. Le poste est vacant depuis un certain temps, mais les prétendants ne manquent pas pour cette sinécure. Christine Boutin saura-t-elle faire amende honorable pour s’allier de nouveau les bonnes grâces de ceux qu’elle accuse aujourd’hui ?