Le cas Berlusconi en examen au G8

Le cas Berlusconi en examen au G8

Les plus ardents défenseurs de Silvio Berlusconi nient que son départ offrirait une sortie de crise après le scandale concernant la vie privée du chef de gouvernement italien. Mais ses plus sûrs alliés dans la coalition de centre-droit envisagent déjà la politique à long terme sans leur chef. La réunion du G8 à Rome tombe à pic pour que les autres dirigeants politiques occidentaux se penchent aussi sur le cas Berlusconi.

Des sources gouvernementales bien informées, mais anonymes, voient comme une contrainte un maintien au pouvoir de l’homme d’affaires de 72 ans et par trois fois Président du Conseil. Silvio Berlusconi n’a en effet pas l’intention de démissionner de sitôt, et son application à nier l’évidence prouve sa grande ténacité. Mais ses ministres commencent à envisager de nouvelles combinaisons au cas où des révélations plus préjudiciables encore le mèneraient à la démission.

"C’est vraiment un nouveau scénario", a déclaré un homme du sérail : "Ce sont des sables mouvants"… Les choses se sont précipitées depuis la révélation d’un tendre commerce entre Silvio Berlusconi et une starlette de 18 ans, la demande de divorce de son épouse, Veronica Lario, et enfin les rumeurs de parties fines au bénéfice du Premier ministre italien… Un conseiller de Silvio Berlusconi maintient la position officielle et affirme que les scandales sont montés de toutes pièces et sont une conspiration de l’opposition, des journaux et des magistrats résolus à l’abattre.

Mais que ses opposants sont aussi à l’affût d’une sortie de crise officielle au moment où le chef de gouvernement s’apprête à accueillir les leaders de la planète au G8 le mois prochain. Des parallèles sont étudiés avec la situation de 1994, où une cour de justice a mis en examen Silvio Berlusconi pour corruption alors même qu’il présidait une conférence de l’ONU sur la criminalité.

Son gouvernement s’est disloqué un mois plus tard quand une composante influente de la coalition, la Ligue du Nord, s’est retirée. Les ministres des affaires étrangères du G8 se réunissent ce soir pour deux jours en Italie et préparent évidemment le prochain sommet qui se réunira en juillet.

Silvio Berlusconi s’est battu comme un beau diable mercredi pour contrer les fuites, en donnant une interview dans Chi, un magazine qui fait partie de son propre groupe de presse. Il y affirme qu’il n’a aucune mémoire du nom ou de visage de Patrizia D’Addario, une ancienne miss de 42 ans, qui prétend avoir fait partie des femmes payés par un homme d’affaires pour participer à des parties fines dans les différentes résidences privées du Président du Conseil, et qu’elle a passé l’année dernière la nuit du dépouillement électoral aux États-Unis dans la propriété romaine de Silvio Berlusconi.

L’intéressé se défend en affirmant n’avoir jamais payé une femme. Profitant de comptes rendus d’écoutes téléphoniques concernant Giampaolo Tarantini, un homme d’affaires opérant dans le secteur de la santé suspecté de corruption, les procureurs de la ville de Bari se sont demandés si cet homme avait pu obtenir des contrats à caractère médical en échange de prostituées à l’attention de Silvio Berlusconi.

Le suspect nie tout proxénétisme, mais avoue tout de même avoir payé leurs dépenses. Le Premier ministre explique sa rencontre avec Giampaolo Tarantini comme ayant été introduit auprès de lui l’année dernière avec la réputation d’entrepreneur respectable.

Les soutiens politiques de Silvio Berlusconi craignent la révélation par Patrizia D’Addario d’images et de bandes sonores ou vidéo de leurs rencontres, ou que les allégations concernant Giampaolo Tarantini s’avèrent fondées par l’enquête judiciaire. Des sources gouvernementales indiquent une évolution de la dynamique au pouvoir.

Tout d’abord, la volonté de Silvio Berlusconi à demeurer le chef de file de la coalition se sont anéanties avec le parfum de scandale. Ensuite, les élections européennes ont montré la désaffection des électeurs. Et pour finir, l’image de l’Italie sur la scène internationale a été entachée, au point que le clergé romain ont mis la pression sur l’honorabilité gouvernementale.

En dépit de son image de patron milliardaire appâtant le monde avec des cadeaux et des fêtes somptueuses, ses alliés le décrivent dans d’isolement, moins d’un point de vue politique que personnel : plus personne ne s’offre à le conseiller. Dans l’entretien mélodramatique accordé à Chi, Silvio Berlusconi rappelle qu’il a perdu sa mère et sa sœur cette année, et son épouse bien-aimée par-dessus le marché.

C’est grâce à son charisme et à son argent qu’il a réussi à maintenir soudée sa coalition, mais celle-ci est prête à se dissoudre à la moindre alerte, comme elle l’a déjà fait. De plus, il n’a pas de réel successeur au sein du gouvernement ou de son tout nouvel appareil politique. Silvio Berlusconi est plus que jamais un homme seul.