Mitterrand avec Giscard au gouvernement ?

Mitterrand avec Giscard au gouvernement ?

On y voit maintenant un peu plus clair dans les stratégies de Nicolas Sarkozy. Avec la nomination de Frédéric Mitterrand au ministère de la Culture et de la Communication, il donne le signe d’un remaniement de haute volée. Henri Giscard d’Estaing, également descendant de président de la Vème République, pourrait compléter le casting gouvernemental.

Nicolas Sarkozy est passé maître dans l’art du débauchage et de la déstabilisation… L’ouverture, ce signal envoyé au peuple français comme à ses adversaires, a été préparée au cours de sa campagne présidentielle, d’abord en piochant dans les références doctrinales et culturelles du camp opposé, puis grâce à une prise de guerre en la personne d’Éric Besson. Au grand dam de Patrick Devedjian, elle est devenue la marque distinctive du 1er mandat présidentiel de Nicolas Sarkozy.

Avec la nomination de Frédéric Mitterrand au gouvernement, le président de la République accroche un symbole à l’action qu’il entend poursuivre pour le redressement du pays, déshabille encore un peu la Gauche et fait porter à Christine Albanel l’entière responsabilité de sa pantalonnade sur la répression du téléchargement illégal. Frédéric Mitterrand a maintenant quitté la Villa Médicis, il est paré d’une renommée de cinéaste et d’homme de télévision, où il a officié pendant longtemps dans le service public. Frédéric Mitterrand représente une certaine idée du peuple de gauche, mais il est aussi un artiste au talent reconnu, et un représentant notoire de la diversité.

La révélation d’une nomination au gouvernement par la presse, puis par l’intéressé lui-même, est une première dans l’Histoire de la Vème République. Mais gardons-nous d’imaginer que cette surprise sera la seule, et la plus importante. Nicolas Sarkozy sait ménager ses effets, et s’il a autorisé Frédéric Mitterrand à rendre public son entrée au gouvernement au mépris des règles d’un protocole dont il est parfaitement averti, c’est qu’il y a tout lieu d’envisager une annonce encore plus importante pour mercredi.

Nul n’ignore les souhaits de l’équipe au pouvoir d’organiser autour d’elle une sorte d’union nationale afin d’avoir les coudées franches pour s’attaquer à la crise économique, et préparer un second mandat à Nicolas Sarkozy. François Fillon s’en est ouvert à plusieurs reprises, et la nomination de Frédéric Mitterrand en son sein apparaît dès à présent comme emblématique. Mais il convient de rassembler le peuple français à travers son histoire, et fonder une espèce d’unité symbolique au gouvernement grâce à l’assortiment de tous ceux dont le patronyme offre au public l’image du rassemblement le plus large.

Henri Giscard d’Estaing est le fils aîné du 3ème président de la Vème République, celui-là même dont l’unique mandat a été salué au début comme un signe de rajeunissement et de transformation de la société française, et sifflé à la fin comme le symbole de l’incapacité à assumer d’inévitables restructurations industrielles. L’homme a 53 ans, un de moins que l’actuel président de la République, et il a en ce moment fort à faire pour maintenir à flots le Club Méditerranée, en plus de se maintenir à sa tête. Son challenger Bernard Tapie a réussi à en acquérir 1% du capital et n’a de cesse de le déboulonner.

Tout le monde se souvient dans quelles conditions Bernard Tapie a trouvé l’argent pour réaliser son offensive sur le Club Méditerranée, et le soutien discret qu’il a obtenu auprès de l’Élysée. Pour autant, l’affaire embarrasse le pouvoir, car les ambitions de l’homme d’affaires ne correspondent en rien à ce qu’il souhaitait. Autant la déstabilisation du clan chiraquien correspond à ses objectifs, autant il doit se garder de donner du fil à retordre aux libéraux, et parmi ceux-ci, les derniers partisans de l’ex ! Le raid de Bernard Tapie aura finalement permis à Nicolas Sarkozy de trouver une opportunité à saisir pour son casting ministériel, autant que d’inviter les appétits autour du Club Méditerranée à s’engager vers une solution à l’amiable.

Apercevoir sur le perron de l’Élysée, à la sortie d’un prochain Conseil des Ministres des personnalités d’ouverture telles que Frédéric Mitterrand et Henri Giscard d’Estaing, pour le poste duquel Le MAGue n’a pas encore d’information à vous proposer, permettrait enfin à Nicolas Sarkozy de gouverner à la fois à droite, à gauche et au centre. Mission accomplie !