Guillermo Arriga pratique la caméra de la terre brûlée

Guillermo Arriga pratique la caméra de la terre brûlée

Scénariste (Trois enterrements, Amours chiennes) et romancier (Un doux parfum de mort, Le Bison de la nuit), le Mexicain Guillermo Arriga signe son premier long-métrage comme réalisateur avec Loin de la Terre brûlée : un drame surprenant — au parfum de thriller — à la beauté toute sauvage.

Le début du film, violent et percutant, donne le ton : dans le désert du Nouveau-Mexique, une caravane explose mystérieusement. A l’intérieur Gina (Kim Basinger) et Nick (Joaquim De Almeida), son amant, meurent. C’est le point de départ d’un suspense garanti, dans lequel passé et présent se mêlent, qui culmine avec l’apparition une quinzaine d’années plus tard d’une certaine Sylvia (Charlize Theron), jeune femme poursuivie par un homme étrange, Carlos (Jose Maria Yazpik).

Cette sombre histoire, fruit du scénario impeccablement huilé de Guillermo Arriga, se déguste comme un polar avec une touche hitchcockienne. The Burning Plain frappe par une construction narrative des plus originales, qui peut déconcerter le spectateur mais a le mérite de relancer en permanence l’intérêt de l’intrigue. Les personnages du film d’Arriaga, circulant entre Portland (Oregon) et le Nouveau-Mexique, semblent d’ailleurs errer sans fin, confrontés aux mystères de la naissance et de la mort, dissimulant leurs souffrances derrière un fragile masque social.

Un des atouts majeurs de The Burning Plain réside dans l’habile superposition des personnages de Marina (Jennifer Lawrence) et de Sylvia, ce qui renforce l’intensité dramatique de l’histoire. Charlize Theron — qui a également assuré la production exécutive du film — interprète ce rôle avec beaucoup de conviction. Dès mon premier rendez-vous avec Guillermo [Arriaga], j’ai vu que nous nous comprenions très bien et que nous avions la même perception du personnage, précise-t-elle.

The Burning Plain offre une image léchée, surfant entre les grands espaces arides des déserts, et les lieux intimes de la mythologie américaine (motels, routes). The Burning Plain a été tourné en huit semaines dans les décors naturels du désert de Chihuahua au Nouveau-Mexique et sur la côte sauvage de l’Oregon. Nous sommes plongés dans un climat désespéré et moite à la Faulkner. Heureusement, le cinéma d’Arriaga, sans pathos, n’a pas besoin de dialogues à l’emporte-pièce pour exprimer une violence, ici latente. Celle d’une terre hostile, dure, une terre littéralement cramée qui, comme le suggère la première scène du film, mord ses enfants, inscrit leurs désirs dans une ronde infernale et tragique.

D’ailleurs tout le film, baignant dans un épique fatalisme sud-américain, semble porté par l’attente douloureuse du dénouement. Avec finesse, Kim Basinger joue ce rôle de Gina, femme mariée et mère de quatre enfants. Selon Arriaga, elle possédait une fragilité qui correspondait parfaitement au personnage. Comme chez Sylvia-Mariana, le metteur en scène confronte ce personnage à la loi cruelle du désir et du temps.

Pour son premier film, le réalisateur mexicain s’aventure dans un terrain plutôt métaphysique ; celui de l’exploration de l’ennui et d’un univer s déprimant où le désir fait figure de chien mouillé. La scène de mutilation des deux adolescents (Santiago/Marina) paraît fort éloquente. Ce spleen, esthétiquement , s’inscrit dans toute sa puissance, par l’image — mélancolique et belle — de l’avion de Santiago survolant les plaines brûlées par le soleil sous le regard ahuri de la petite Maria.

Avec The Burning Plain, Guillermo Arriaga nous propose une œuvre accomplie, propulsée par une intrigue diablement ficelée et enrobée d’une beauté fiévreuse.

Loin de la Terre brûlée USA — 2009 (The Burning Plain) :

Un film écrit et réalisé par Guillermo Arriaga, avec Charlize Theron, Kim Basinger, Jennifer Lawrence, Joaquim De Almeida, Danny Pino, John Corbett,

Durée : 1h50,

Sortie le 11 mars 2009.