De nouveaux Éléments pour le Procès d’Yvan Colonna

De nouveaux Éléments pour le Procès d'Yvan Colonna

Les avocats de d’Yvan Colonna n’ont pas démérité : la production d’un témoignage du secrétaire particulier de Claude Érignac, a semé le trouble à l’audience de vendredi de la Cour d’Assises spéciale de Paris. Ils contre-attaquent et promettent de nouveaux éléments pour les jours qui viennent, en vue d’instruire à décharge, un procès dont ils contestent dès à présent l’impartialité.

Le berger de Cargèse a donné le ton dès l’ouverture de l’appel de sa condamnation à la prison à perpétuité le 13 décembre 2007 : je suis l’assassin du préfet, Sarkozy l’a dit ! Procès politique ? Évidemment, puisque dès l’arrestation de l’assassin présumé du représentant de la République française en Corse le 4 juillet 2003, à la veille du référendum sur l’avenir institutionnel de l’île de Beauté, devait mettre fin au processus de Matignon institué par Lionel Jospin pendant la cohabitation, et donner à la politique sécuritaire de Nicolas Sarkozy tout le relief qu’on lui connaît désormais.

Dès sa mise en examen, la culpabilité d’Yvan Colonna ne fait pas de doute, après la longue poursuite dont il a fait l’objet et la nécessité de débusquer le meurtrier du préfet derrière la figure angélique et marquée par les vicissitudes de la cavale d’un individu vivant en marge de la société, refusant les modes de vie de la modernité, ancré dans la tradition et la défense du patrimoine corses. Un homme également lié par ascendance à la politique de la France, puisque son père, Jean-Hugues Colonna, est élu député le 21 juin 1981 dans les rangs de la Gauche, conseiller technique du ministre de l’Intérieur socialiste à partir de 1991, et par conviction, puisqu’il s’engage au sein de la mouvance indépendantiste corse jusqu’en 1989.

Pendant les débats menés à l’audience, les mêmes interrogations reviennent semer la confusion dans un dossier a priori si bien ficelé : la taille du tireur, qui dépasserait de 2 têtes celle d’Yvan Colonna, la partialité supposée d’une enquête policière menée sous la direction du procureur général Yves Bot, le retour de la thèse d’une 2ème équipe mise en œuvre pour l’attentat du 6 février 1998… parmi d’autres zones d’ombres, refont surface alors que l’intérêt pour l’affaire s’est beaucoup émoussé après 10 ans de procédure et de poursuite. Pour Benoît Chabert, l’un des avocats des parties civiles au procès Colonna, a déclaré dimanche sur RTL que les révélations d’un ex-collaborateur du préfet Érignac ne changeaient pas sa lecture du dossier et n’avaient aucune conséquence sur la culpabilité d’Yvan Colonna.

Le sort du berger de Cargèse apparaît donc scellé, en dépit de la pugnacité des avocats de la défense : Mes Antoine Sollacaro, Pascal Garbarini et Patrick Maisonneuve. À dire vrai, l’innocence d’Yvan Colonna n’est pas conforme à l’ordre public, malgré les nombreux points litigieux qui forment autant d’épines dans un dossier à l’image de tous ceux que le plus haut représentant de l’État français présente à flot continu à son peuple. Avec le temps, 10 ans d’enquête, d’éléments à charge et à décharge, il faut bien clore un dossier qui n’intéresse plus grand monde ! D’autre part, la culpabilité d’Yvan Colonna constitue la clef de voûte d’un parcours politique réussi pour un homme qui s’est à plusieurs reprises distingué par l’intérêt qu’il porte à la sécurité de ses concitoyens, et sa proximité avec les forces de l’ordre.

Yvan Colonna pourrait donc être à nouveau condamné sans que toute la lumière soit faite au sujet de son implication dans l’attentat contre Claude Érignac, en dépit de tous les éléments à décharge présentés dans le prétoire. Il en va de la pérennité de la République française, de l’intégrité d’un territoire incluant contre vents et marées une île au tempérament particulier, au charme incontestable. Il y va de l’attachement de ses habitants à des modes de vie paradoxaux, mais parfaitement intégrés à la continuité historique d’une communauté détentrice d’un message universel pour le genre humain : celui de la démocratie dans le respect des droits de l’Homme.

Yvan Colonna demeurant prisonnier des mains de la justice, apparaîtra un jour comme l’autre face d’une même pièce de monnaie glorieuse et dévaluée, où son profil fera pendant à celui de Napoléon Bonaparte, Premier Consul, empereur des Français, l’un des auteurs controversés de la légende de la France… Il entrera dans l’Histoire au même titre que le Chevalier de la Barre, et l’on jugera alors de la qualité de ses défenseurs comme on a distingué le rôle de Voltaire dans l’idéal de justice qui anime encore aujourd’hui le peuple français.

 

 


Pourquoi faire à présent le procès d’un coupable ?
Des témoins, de nouveaux éléments sont cernés
Et la moutarde avec le temps leur monte au nez
Puisqu’à l’audience aussi, la tension est palpable.

Le vrai dans ce dossier n’est pas plus extirpable
Que les dénégations, les faux-semblants prônés,
Sauf le respect qu’on doit ici aux gens bien nés,
Ce gars longtemps traqué en est-il bien capable ?

L’assassin, nous dit-on, était plus grand que lui,
Tandis que deux suspects qu’un crâne a déjà lui
Se sont enfuis dans les procès-verbaux multiples.

Reprendre un an après ces gros dossiers pourris
N’a pas de sens, sinon celui d’aimer les steeples,
Car les proscrits sont tous mangés par les souris !

 


Avec AFP, Reuters et Le Journal de Tintin.