Le "Léger Mal du Pays" de Wilhelm Genazino

Le "Léger Mal du Pays" de Wilhelm Genazino

Né en 1943 à Mannheim, Wilhelm Genazino a publié une dizaine de romans dont « Un parapluie pour ce jour-là », qui l’a fait connaître au grand public. Avec « Léger mal du pays » (2007), l’auteur allemand signe là un roman drôle et étrange, aux contours mélancoliques.

À priori l’histoire de « Léger mal du pays » s’avère des plus banales : un contrôleur de gestion d’une entreprise pharmaceutique (Dieter Rotmund) face à l’érosion de son couple. Avec humour, Wilhelm Genazino — romancier spécialisé dans l’évocation de la vie quotidienne des gens normaux (!) — nous fait pénétrer dans l’univers mental de son antihéros : un Dieter tentant inlassablement de cerner, de préciser puis de formuler, comme un médecin de soi-même, son mal « léger » du pays (métaphore de la perte du désir au sens large) : « C’est probablement à cause de mon mariage raté que mon intérêt pour les phénomènes de la vie s’amoindrit. »( p. 19).

Nous suivons donc les déambulations de ce Dieter, partagé entre deux univers : celui de la grande ville allemande où il travaille durant la semaine et celui d’un village niché en Forêt-Noire où il rejoint — sorte d’intrus toléré — Sabine (sa fille) et Edith (sa femme). À ce réalisme exacerbé, à la fois cruel et ironique, Genazino ajoute une touche fantastique. Son Dieter perd une oreille puis un orteil — banalité de la vie et insondables mystères semblent inextricablement liés.

Le personnage légèrement nihiliste de « Léger mal du pays » rappelle par moments les antihéros désoeuvrés mais cool de Moravia (« L’Ennui ») ou de Ionesco (« Le Solitaire »). Ils s’adaptent à tout, du moins en apparence :
« Mes parents étaient déjà médiocres, mon enfance était médiocre, en plus ma scolarité, mon baccalauréat et mes études étaient médiocres mais depuis l’appel que je viens de recevoir, je me dirige vers la chose la plus médiocre qui soit : un divorce. » (p.121).

Genazino est un romancier rusé. Comme Moravia, Kafka ou Borges, il laisse au lecteur le soin d’interpréter ce qu’il veut à partir de quelques éléments clés suggérés par les principaux personnages.

« Léger mal du pays », un roman à découvrir…

LEGER MAL DU PAYS, de Wilhelm Genazino, Christian Bourgeois Editeur, 2008, 207 pages - prix : 19 €

Traduit de l’allemand par Anne Weber

Du même auteur chez le même éditeur :

UN PARAPLUIE POUR CE JOUR-LA (2002)

UN APPARTEMENT, UNE FEMME, UN ROMAN (2004)

LA STUPEUR AMOUREUSE (2007)