LES TONTONS FLINGUEURS, UN FILM MOUSSE ET PAMPRE

LES TONTONS FLINGUEURS, UN FILM MOUSSE ET PAMPRE

Il y a belle lurette que le cinéma est mou dans ses dialogues et que les acteurs d’aujourd’hui, à de rares exceptions, ne valent pas tripette. Pas de quoi fouetter un chat ou faire se bidonner le spectateur. La fin du vrai cinéma d’antan est largement annoncée. Certes on nous propose de l’action, qui ne vaut pas grand chose, sur des dialogues édulcorés dans lesquels chaque mot est étudié pour ne blesser aucune susceptibilité et pour que d’éventuels procéduriers ne portent pas plainte en prétendant se sentir agressés. Les dialogues de "Rabbi Jacob" ne peuvent plus exister aujourd’hui, à cause d’une asepsie imbécile qui fait qu’on voit le mal partout où il n’est pas.

Où sont passés les dialogues colorés, comme ceux de Michel Audiard ? Qu’a-t-on fait de nos "gueules" qui peuplent encore les archives de la cinémathèque française ? Disparus définitivement les Bourvil, Fernandel, Louis de Funès, Jean Gabin, Lino Ventura et Bernard Blier ! Même dans les seconds rôles on ne remarque plus des acteurs de la trempe des Robert Dalban, Claude Brosset, Jean Lefèvre, Jean Carmet, Francis Blanche ou Jacques Villeret.

Pour la énième fois, sans jamais m’en lasser une seule seconde, je viens de revoir "Les Tontons Flingueurs". Un pur moment de délice, avec du rire en prime et des dialogues truculents à tomber sur le cul. Lorsque je compare un tel film, par rapport à ceux qu’on nous propose aujourd’hui, je constate qu’il n’y a pas de place pour l’ennui dans celui de Georges Lautner. On préfère nous servir des films idiots, aux budgets faramineux qui permettraient de nourrir et de loger de nombreux sans abris, avec des dialogues à se chier dessus dans des scénarios à se tirer une balle dans la tête... tout cela joué par des acteurs qui manquent souvent d’envergure.

Cependant il ne faut pas totalement perdre espoir car cette année nous avons eu la chance de voir un film sans prétention et qui a beaucoup fait rire dans les salles obscures. Scénario simple, dialogues rigolos et bons acteurs étaient au rendez-vous dans : "Bienvenue chez les Ch’tis"... et ce sont des comédies qui plaisent ou qui enchantent. "Le dîner de cons" reste également une oeuvre d’art dans le genre. Il ne faut que quelques mots bien frappés, pour rassurer le public, le charmer et le fidéliser. On se fiche pas mal de la beauté d’un acteur, si les dialogues ne sont pas au rendez-vous... sinon remettez-nous des films muets, de Charlot ou de Buster Keaton, avec lesquels on se fendait bien la poire. Enchantez-nous, mesdames et messieurs du cinéma du 21ème siècle, et surtout qu’on puisse rire ou sourire sans se prendre la tête... même si nous devons verser une petite larme à la fin de vos oeuvres. Trouvez-nous des Kad Mérad et des Dany Boon, remuez-vous sinon vous allez à votre perte !
Je vais vous dire ce qui nous botte, ce qu’attendent les cinéphiles... on veut du : "Je faisais un brin de causette, le genre réservé, tu me connais : mousse et pampre, v’là tout à coup qu’un p’tit cave est venu me chercher ! Les gros mots et tout".

Mais la télévision n’est pas en reste puisqu’elle n’est pas plus capable de nous régaler... il nous faut louer ou acheter d’anciens films en DVD, pour passer une bonne soirée entre amis ou en famille, malgré le prix exorbitant de la redevance télé... tout cela pour regarder de la merde qu’on nous sert à prix d’or ! A croire que la pellicule des films d’antan vient de disparaître dans un gigantesque incendie dont on ne nous a pas parlé ! On se demande même parfois si le noir et blanc ne valait pas mieux que la couleur, en créant une ambiance un peu désuète qui n’était pas dénuée de charme... ce n’est pas mon cinéaste préféré, Frédéric Vignale, qui me dira le contraire !

Ne tombez pas dans le piège d’Audiard qui écrivait ceci : "Les cons ça ose tout ! C’est même à ça qu’on les reconnaît". Francis Blanche, dans "Les Tontons Flingueurs", disait : "Touche pas au grisbi, salope !"... alors ne tentez pas de faire disparaître nos films préférés. Rien ne peut valoir un Blier qui ouvre la bouche pour dire : "Non mais t’as déjà vu ça, en pleine paix, y chante et pis crac... un bourre-pif, mais il est complètement fou ce mec ! Moi les dingues j’les soigne...". Il y a ici toute l’âme d’un langage populaire qui se meurt ,"l’argot" qui faisait toute la différence, celui employé par Pierre Perret dans ses chansons. Ce n’est pas revenir en arrière que de faire du cinéma et du vrai... surtout lorsque celui-ci a fait ses preuves et que rien ni personne n’a pu réussir à le remplacer ou même à l’égaler !