Que faisiez-vous en juin … 1848 ?

Que faisiez-vous en juin … 1848 ?

Alors que tout le monde commémore mai 1968, il y a un autre anniversaire qui s’est fait oublier. Et pour cause ! Juin 1848 est l’une de ces dates dont l’on se passerait bien. Une date cauchemar. Un vilain caillou dans le godillot républicain. Pensez donc, les républicains se sont mis à canonner les ouvriers. Vous y êtes ? Oui, on appelle cela La Commune. Dont l’une des plus célèbres victimes est Gustave Courbet. Juin 1848. Une autre manière de voir la France. Les prémices de notre société d’aujourd’hui …

Les Episodes des journées de juin 1848 de François Pardigon ramènent la politique à ce qu’elle ne cesse jamais d’être tout à fait : une guerre. Ces minutes sont là pour nous forcer à nous souvenir. Et pour briser l’unité artificielle d’une histoire officielle engluée dans les cérémonies et le consensus. Elles sont aussi là nous rappeler les causes du conflit qui opposa une partie du peuple de Paris aspirant à une République sociale aux hommes d’un régime qui s’affirmait – lui aussi – républicain.
Voici le récit de trois jours sombres. Trois jours de sang. Non pas celui des artistos. Mais bien celui des pauvres. De ceux qui ont le malheur de se dire socialistes. Trois journées qui ont montré que les insurgés ont reconnu dans la République tiède leur nouvel ennemi. Que la République est divisée. Et qu’elle est pour les hommes de 1848 moins un régime qu’un enjeu.

Cette bataille de trois jours qui oppose l’armée improvisée du peuple parisien aux troupes régulières de la République (préalablement défaites à Sedan par les Prussiens) voit la défaite des insurgés. Parmi les vaincus, un jeune étudiant en droit au Quartier latin. Pardigon. Il fut coffré dès le premier soir des combats. Le 23 juin. Il vivra donc sa guerre à la lueur sépulcrale des massacres nocturnes, des prisons et des caveaux.
Quelques mois plus tard – avril, mai 1849 – il racontera son expérience en feuilleton dans la presse démocrate-socialiste sous le titre d’Episodes des journées de juin 1848. C’est en reprenant ce feuilleton, en le remaniant et en y faisant des ajouts que Pardigon publie un livre éponyme, à Londres, en 1852. C’est cet ouvrage, ici réédité pour la première fois.

Le livre de Pardigon scelle deux textes. De date et de vocation différentes. Il s’agit ,d’une part, du texte remanié du feuilleton. Et d’autre part de deux textes entièrement neufs : un très long premier chapitre et une brève conclusion de deux pages.
Pardigon rappelle les errances et souffrances du proscrit. Mais il essaye aussi de faire saillir ce qu’il pourrait y avoir de positif dans ces défaites à travers l’examen des perspectives de lutte dégagées par l’internationalisation du milieu révolutionnaire. Ce qui le conduit à une méditation historico-politique sur le sens des souffrances vécues à travers les siècles par les peuples qui se révoltèrent contre le despotisme.
"Du travail ou du plomb !" fut le leitmotiv des prolétaires qui dressèrent les barricades dans Paris. La troupe chargea. Et Pardigon sauva sa tête car il était étudiant. Comme par miracle il put s’exiler à Londres sous le Second Empire. Puis aux USA. Il nous laissa un document rare. Un témoignage sur les luttes des classes.

François Pardigon, Episodes des journées de juin 1848, présentation d’Alix Héricord, La fabrique éditions, mai 2008, 289 p. – 17,00 €