CINEPHILO par Ollivier Pourriol

CINEPHILO par Ollivier Pourriol

Ollivier vivait parmi nous lorsque nous nous sommes connus, en faisant les courses à Grand Littoral, et avons continué à sympathiser autour d’une pizza, dans l’agréable rez-de-jardin qu’il louait pour trois sous avec vue sur la rade. Mais la flambée de l’immobilier et son expulsion par un propriétaire avide l’ont paradoxalement poussé à monter enfin à Paris, puisque ce n’était désormais pas plus cher qu’à L’Estaque.

Il y mène depuis sa carrière d’écrivain, avec un certain succès puisqu’il est l’auteur de trois romans chez Grasset, dont à mon avis au moins un chef-d’œuvre, l’obscur et lumineux Méphisto Valse, une manière de polar indéfinissable… Car Pourriol écrit des livres curieux, à destiner principalement aux curieux, donc !

Le revoici avec ce Cinéphilo, sous-titré Les plus belles questions de la philosophie sur grand écran, un OVNI qui fait réfléchir - profitons-en tant que ce n’est pas interdit - sans se prendre la tête, ce qui n’est pas rien. Ce normalien, agrégé de philo, n’en est pas à son premier essai et j’ai eu le mérite de lire par amitié son Alain, le grand voleur (livre de poche 2006), ouvrage au demeurant certainement excellent mais auquel je confesse aujourd’hui n’avoir alors pas compris grand-chose… Tandis que je referme à l’instant son Cinéphilo et je peux affirmer non seulement avoir tout compris, mais m’être régalé intelligemment (j’ai même noté dans les marges quelques points de détail à débattre la prochaine fois que nous nous croiserons).

Il faut dire que l’objet est aussi ludique qu’original : il s’agit d’un recueil de textes courts, où se croisent philosophie et cinéma en une bouillonnante alchimie, qui réconcilie de façon jubilatoire Descartes, le Christ et Brad Pitt ! Par exemple… Ainsi, peut-on changer de vie sans y laisser sa peau ? Tel est le dilemme de Fight Club. Comment gagner en puissance et en joie sans détruire les autres ou le monde ? s’interrogeait Spinoza. Telle est la quête des X-Men. Et si un malin génie nous trompait, si rien n’était réel ? demandait notre cartésien en chef.

C’est l’hypothèse de Matrix. Faut-il craindre la passion ou y plonger corps et âme ? American Beauty nous éclaire sur le coup de foudre, etc. C’est toute l’histoire de la philosophie, accessible et passionnante, qui prend vie sous la plume d’Ollivier Pourriol. Avec le sentiment que le cinéma, au-delà des cascades, des coups de révolver, des poursuites en bagnoles et des belles gonzesses, tient parfois d’autres promesses que celles qui nous poussent aveuglément vers les salles obscures.

Ce livre emporte un pari audacieux : la pensée de masse peut conduire à la pensée tout court ! Et l’auteur nous y prouve que les idées sont éternelles et droit et joyeux les chemins qui y conduisent…

CINEPHILO par Ollivier Pourriol chez HACHETTE Littératures

Article publié en collaboration avec le Journal Marseille la cité