Panégyrique de l’indolence ?

Panégyrique de l'indolence ?

L’économie est une discipline fertile en idées reçues. Entre les slogans abusifs des acteurs politiques et les raccourcis hâtifs des puissances médiatiques, chacun élabore des théories générales à partir d’expériences insignifiantes ou d’erreurs d’interprétation. Il faut bien le reconnaître, nous sommes tous sujets à cette tentation de la précipitation qui détériore la réflexion. Voici l’occasion d’élargir votre champ de vision.

Entre la croissance des inégalités qui augmente et la croissance du pays qui diminue, la France est-elle condamnée au déclin ? C’est la question que souhaite élucider Guillaume Duval, rédacteur en chef du mensuel Alternatives économiques, dans son dernier opus de 226 pages. Pour cela, il répond successivement à 32 questions aussi diverses qu’intéressantes... "Les Français sont-ils des paresseux ?", "les diplômes ont-ils perdu toute valeur ?", "les chômeurs sont-ils trop bien traités ?", "pourquoi y a-t-il tant de smicards ?", "la France est-elle menacée de faillite ?"... On comprend assez vite où veut en venir l’auteur. Et le livre est à la hauteur.

Sans jamais sombrer dans la caricature du débat entre antilibéraux haineux et capitalistes méprisants, Duval présente une argumentation pédagogique basée sur ce que disent les chiffres. Ce petit manifeste contre la doxa libérale et la pensée dominante pratique ainsi la comparaison en ratissant les statistiques. Le style ne gâche rien à l’affaire, car l’auteur excelle dans l’art de la formule et de l’analyse. Premier constat : le "travailler plus" fait rarement bon ménage avec le "travailler tous". Deuxième remarque : "travailler longtemps est avant tout une caractéristique des pays pauvres et arriérés". Au moins, on sait où on met les pieds.

Ce livre s’emploie à déconstruire nombre de clichés avec la rigueur d’un universitaire méticuleux. Et parfois, les constats sont inattendus. Par exemple, sur la question écologique. Cocorico ? Eh bien non ! Si la France émet moins de gaz à effet de serre que d’autres pays développés grâce à son parc nucléaire, elle reste la grande championne du gaspillage et de la pollution de fait de son étalement urbain et obtient la médaille d’or de l’utilisation des pesticides et des engrais chimiques. Bien pire : depuis vingt ans, presque toutes les mesures prises en matière d’environnement ont été imposées à la France par Bruxelles…

En ligne : Sommes-nous des paresseux ?