CONFESSIONS D’UNE BABE IDOL /SAFARI

CONFESSIONS D'UNE BABE IDOL /SAFARI

Tout safari est dangereux. Y compris le safari photo qui se targue de
saisir l’animal dans son milieu naturel. Le photographe et peintre
Peter Beard en sait quelque chose lui qui fut à de nombreuses reprises
chargé par des lions et des éléphants avec des dommages plus
conséquents que de simples égratignures.

Mais l’art a un prix et comme
disait Oscar Wilde qui s’y connaissait en exercices périlleux "toute
idée qui n’est pas dangereuse ne mérite pas d’être appelée une idée".
Ainsi les femmes qui sont les animaux les plus sophistiqués de la
chaîne alimentaire ne se laissent elles approcher qu’avec d’infinies
précautions. Leur beauté est fugace non pas tant en raison de la fuite
du temps qui en altère les traits que de leur propre versatilité qui à
chaque instant peut les renvoyer à une sauvagerie venue du fond des
âges.

Elles sont malgré elles les artisans de leur propre démolition,
ravages occasionnées par l’insatisfaction, l’arrogance, la bêtise, la
jalousie ou la colère. La beauté n’est guère séparée de la finesse
d’esprit et de l’intelligence et comme le glissait Baudelaire, le don
de plaire reste le don le plus précieux. Il y a deux jours je filmais
le plan séquence le plus léger, voluptueux et subtil de ma carrière de
cinéaste, de mon art de constructeur du réel subjectif.
Quarante minutes de safari vidéo dans Paris avec au centre de mon
objectif un animal féminin aux incroyables aptitudes d’improvisation,
une actrice née, scintillante sous tous les angles.

Après visionnage
il me fût suggéré d’adresser copie de ce film à tous les festivals
possibles tant cette séquence contenait de force et d’attract visuel.
Le producteur qui visionnait avec moi n’avait pas quitté des yeux
l’écran depuis une demi-heure. C’était bon signe. A charge pour moi de
compléter cette prouesse par un tournage supplémentaire ou je pourrai
saisir un peu plus l’âme de ma sauvageonne au charme si spécial.
N’ayant pas son numéro de téléphone elle m’avait néanmoins laissé une
adresse électronique. Le soir même je lui envoyais un message pour lui
expliquer mes intentions, en gros que le film qui était déja sidérant
gagnerait encore à être complété par quelques prises de vue. Je lui
demandais de me rappeler très vite afin que nous puissions nous voir.
Le lendemain cependant je reçevais un message d’échec. Je ne sais pour
quelles raisons mon mail n’était pas parvenu. N’ayant plus d’autres
moyen de la joindre que le courrier par la poste qui prendrait trop de
temps je me résolvais à passer outre les bonnes manières. Les
renseigements me fournirent un numéro à un autre nom.

Comme il n’y
avait qu’une seule personne à l’adresse indiquée ça pouvait
correspondre. Et en effet lorsque je demandais Eve,la première femme,
quelqu’un qui n’était pas Dieu le père mais son père(biologique ou non
je n’en avais cure)me la passa. Alors que je tentais de lui expliquer
que je lui avais envoyé un courrier qui n’avait pas atteint sa cible,
elle s’empressa de me traiter de menteur. Je glissais en lui affirmant
avoir des choses intéressantes à lui dire :"Tu n’as qu’à me les dire
par mail !" hurla-t-elle avant de raccrocher. Je lui renvoyais donc le
mot en changeant le tiré de l’adresse par un underscore. En me disant
que la limite entre l’audace et la grossièreté est vraiment bien mince
alors que celle entre la vulgarité et la finesse est une montagne à
tout jamais infranchissable.

Si l’enfer est pavé de bonnes
intentions,le commerce avec ses semblables est un brasier ou les
pauvres optimistes que nous sommes(nous qui allons vers les
autres)n’avons pas fini de rôtir. Faites du safari je vous dis,vous en
rapporterez de sublimes images mais ne sortez jamais sans votre gilet
de protection. C’est un conseil d’amis.