MUNICIPALES 2008, Serge Scotto veut faire gagner Marseille ! (interview)

MUNICIPALES 2008, Serge Scotto veut faire gagner Marseille ! (interview)

Mon ami Serge Scotto, depuis quelques années que l’on se découvre, ne finit jamais de m’étonner… Romancier, musicien, bédéïste, le voilà aujourd’hui qui s’engage en politique et soutient Jean-Noël Guérini, le candidat socialiste, dont le premier « mairite » et d’avoir d’ores et déjà su réunir la gauche marseillaise autour de lui.
Puisque Serge est mon pote, sa première interview est pour Lemague.net !

En réalité, ce n’est pas vraiment ta première expérience électorale ?

En 2001, pour qui s’en souvient, c’est mon petit chien qui s’était présenté aux élections municipales. Avec une certaine réussite, puisqu’il avait fait tout de même 4% des ouah…C’était évidemment la candidature de la dérision, mais aussi la volonté d’adresser un message fort aux politiques, l’expression d’un certain ras le bol… qui démobilise les électeurs, les éloigne des urnes et fait le nid des extrêmes : d’ailleurs, notre profession de foi prônait « voter Saucisse c’est voter quand même ».

Mais aujourd’hui, ce n’est pas ton chien, c’est bien toi, l’humain, qui se présente ?

Eh oui ! parce que quand faut y aller, faut y aller !... Je te dirai que je n’ai pas plus d’ambitions politiques que mon chien, je ne fais pas ça pour ça, mais par contre mon engagement est tout ce qu’il y a de sérieux cette fois.

Fini le cynisme ?

D’abord, je ne suis pas un cynique… Sinon je resterais tranquille à la maison, au lieu de me lancer dans cette campagne. Mon discours est justement anti-cynique : on n’est pas dans un moment de notre démocratie où l’on peut se contenter de renvoyer dos à dos la gauche et la droite… Parce que la droite c’est Sarkozy, et ses vassaux de l’UMP. Et je dois dire que chaque jour qui passe me convainc d’avoir raison de m’engager…

Tu prônes le vote sanction ?

Ce n’est pas qu’une question de sanction, c’est une question de contre-pouvoir ! Une municipalité, c’est quand même beaucoup de pouvoir de proximité à opposer au pouvoir central : techniquement, ce serait déjà un bon équilibre de rendre cette ville à la gauche et c’est avec Jean-Noël Guérini que ça se passe, pas en restant à rouspéter devant sa téloche… Parce que là, c’est plus possible : quand je vois que ma ville, ville populaire s’il en est, qui a la population la plus pauvre de France, est la ville avec Neuilly qui a le plus voté pour Sarkozy, 56% je te le rappelle…, ça me fait mal au… point que je ne peux plus rester neutre. Les Marseillais sont-ils si désespérés qu’il faille en plus voter à droite et la politique des riches ? C’est un malentendu ! C’est les gardons qui votent pour le brochet ! Un suicide collectif, quoi… On devient fada ?

Dans ce contexte, le destin de Marseille te parait particulier ?

Oui, parce que le maire actuel est le numéro 2 de l’UMP, ce n’est pas anodin. Marseille a-t-elle vocation à devenir la capitale du sarkozysme ? Je ne le crois pas !... Ca me parait contre nature, mais bon…, si les Marseillais en redemandaient et si nous partions pour Gaudin 3, avec Lyon et Paris qui sont partis pour se maintenir à gauche, nous serions la première ville sarkozyste de France. Maman Marseille, au secours !...

Pour toi, il faut donc impérativement que ça change ?

Doit-on reconduire pour un troisième mandat cette municipalité, quand j’ai l’impression que tout ce qu’elle prétend faire pour Marseille, en tout cas elle ne le fait pas pour les Marseillais…Pour te la faire courte, entre Kaufmann & Broad et « Marius et Jeannette », je crois qu’ils ont fait leur choix !… Alors quels sont ce « progrès », ces « bonnes affaires » pour la ville, dont on nous parle ? Je n’y comprends sans doute pas grand-chose, mais pour ma part, je ne connais pas d’autre progrès que le progrès social, et pas d’autres bonnes affaires pour une ville que celles qui profitent au plus grand nombre. Quand ils sont de plus en plus nombreux, les Marseillais « d’en bas », à se sentir indésirables dans leur propre cité !

Toi y compris ?

Ben oui, moi y compris, tu crois quoi…., dans mon genre je suis le pauvre dégun, comme les autres… La première richesse d’une ville, c’est pourtant sa population, sinon ce n’est qu’un tas de pierres : la ville la plus rentable du monde, je te le rappelle, c’est Pompeï…

Tu m’avais dit une fois que Marseille était « en souffrance », l’expression m’a marqué…

Ok il y fait beau, le soleil, la mer, le pastis, les boules…, ça, c’est le côté folklo et sympa, mais c’est pas grâce au maire, c’est grâce au Bon Dieu, à Obut et à Paul Ricard… En réalité, à Marseille, il ne fait plus bon vivre comme dans les opérettes d’antan, les tensions montent dans nos rues parce que les Marseillais n’en peuvent plus de la vie qu’on leur fait !… On se frapperait pour une place de parking… Alors c’est les riches contre les pauvres, les néo contre les indigènes, les piétons contre les automobilistes, les avec et les sans chien, etc. Pour ma part, je ne veux pas laisser faire ça. Je ne supporte plus ce « diviser pour mieux régner » que dénonçait déjà Machiavel et qui dresse aujourd’hui les Marseillais les uns contre les autres.

Le centre-ville est quand même sérieusement réhabilité, non ?

S’en prendre aux pauvres, ce n’est pas lutter contre la pauvreté ! Faire venir des riches, ce n’est pas enrichir les Marseillais ! Ce serait même plutôt le contraire… Bon, j’ai pas envie de m’énerver, mais c’est pour tout ça que j’ai décidé de mouiller le maillot ! Je me suis engagé derrière Jean-Noël Guérini parce qu’il faut rendre Marseille aux Marseillais… et que ça commence par rendre Marseille à la gauche ! Ca me parait la condition sine qua non pour une ville populaire ! Je soutiens Jean-Noël Guérini, c’est une évidence pour moi, parce qu’il est le candidat que la gauche s’est choisi, et est très à même de remporter la ville. Moi, je ne suis pas socialiste, d’ailleurs personne ne m’a demandé de le devenir : mon soutien est citoyen. Je suis issu de cette gauche indépendante, hétéroclite et souvent dispersée, qui oublie parfois d’aller voter : je m’engage pour montrer que de la gauche de la gauche, et tout montre déjà qu’elle l’a compris, aux premiers déçus du sarkozysme, et il y en aura chaque jour davantage…, pas une voix ne doit manquer au candidat socialiste pour gagner ces municipales ! Je crois à la gauche unie et l’équipe qui est derrière Jean-Noël Guérini est ouverte, riche de talents et d’excellence rassemblée en dehors des accords d’appareils, et il est important que des voies simplement citoyennes puissent s’y faire entendre, apporter leur point de vue, leur différence et leur indépendance d’esprit à ce que sera demain Marseille à gauche ! Une gauche décomplexée, une gauche enrichie par sa victoire, ce qui contribuera à faire valoir ses idées.

Je sens que tu as bon espoir ?

Bien sûr que j’y crois !... Entre parenthèses, je me suis copieusement engueulé avec mes amis qui n’ont pas voulu voter Ségolène sous de fumeux prétextes. Eux qui avaient pourtant voté Chirac en 2002 et m’avaient d’ailleurs à l’époque assez reproché de m’y refuser… On veut bien voter Chirac mais on ne veut pas voter Ségolène ?! Bilan de ces états d’âme du joli mois de mai dernier : on se retrouve avec Sarkozy pour un quinquennat minimum ! Et sous Sarkozy, et consorts en ce qui concerne les Marseillais, nous avons plus que jamais besoin de la gauche… et plus que partout ailleurs besoin de la gauche à Marseille ! Alors c’est bête, mais le soir je me couche avec la conscience en paix en me disant que je fais ce que je peux et ce que je dois : faut être logique avec soi-même, on ne peut pas pester toute l’année contre une gestion municipale et ne pas s’investir le jour où on te le propose.

Quel est l’avenir que tu te vois dans cette aventure ?

C’est un peu tôt pour le dire, non ? Pour l’instant, mon actu c’est de ne pas démériter pendant les 44 jours qui viennent… Mais je sais déjà ce qui me motive : cette idée d’avoir la longueur d’un prochain mandat…, et au minimum, hé, hé !…, pour mettre son petit grain de sel dans l’évolution de Marseille et faire qu’elle ressemble davantage à ce qu’on voudrait pour sa ville, c’est très enthousiasmant pour le Marseillais lambda que je suis. J’en serai ou pas, nul n’en sait encore rien, l’avenir nous le dira, mais c’est le bon travail d’une équipe municipale qui décide de la qualité de vie et du quotidien des gens, et crois-moi que ce ne sera pas dur de faire mieux… Et, plus personnellement, je suis passionné de culture et par les animaux, et ce sont deux domaines de prédilection où j’ai déjà, à ma façon et à la seule force de mes petits bras, eu souvent l’occasion de faire œuvre utile. Je suis bien placé pour savoir qu’il y a à faire… d’ici à 2013, par exemple ! C’est tout con, mais puisqu’on aborde le sujet, il faut à tout prix que cette capitale culturelle dont on parle se fasse, prioritairement, avec et pour la population et les acteurs culturels de cette ville, et pas à leurs dépends comme c’est parti pour…, et soit avant tout un vecteur d’insertion et d’emploi pour nos artistes marseillais qui galèrent.

A Marseille, comme à Paris ou à Lyon, il s’agit en fait de gagner des mairies de secteur. Tu te présentes sur quel secteur précisément ?

Dans le… 3eme secteur, qu’on appelle le 4/5, derrière Jean-Noël Guérini, d’ailleurs ! J’ai suivi le chef, en fait. C’est Marie-Arlette Carlotti, que je n’avais encore jamais rencontrée et qui est quelqu’un de vraiment formidable, qui dirige notre campagne sur le secteur… où j’ai retrouvé aussi Antoine Rouzaud, que je connais « du quartier » depuis longtemps, on a d’ailleurs un vieux projet ensemble : installer un ballon ascensionnel sur La Plaine, d’où l’on verrait tout Marseille en altitude, et si tu me demandes mon avis je verrais bien aussi quelques poneys pour les minots, ça fait longtemps qu’ils n’ont plus vu un cheval…

Vous êtes en face de qui ?

De Renaud Muselier, l’actuel premier adjoint. Autant te dire que les clés de la ville se gagneront pour une bonne part dans cette bataille-là.


C’est donc le moment ou jamais de dire un peu de mal de ton adversaire…

Non. Ce n’est pas le thème, je ne crois pas qu’il s’agisse d’une querelle de personnes… Tu sais, Marseille est un gros village : depuis plus de vingt ans que je m’y active dans le milieu associatif et culturel, et plus particulièrement dans ce quartier, je m’y suis fait des bons collègues de droite comme de gauche, c’est la vraie vie, ce sont des questions d’affinités qui en l’occurrence relèvent plutôt du caractère et pas forcément de l’idéologie … Il faut être plus ouvert que ça… Mais moi, il se trouve que je suis de gauche, je l’oublie pas, non plus ! C’est dans ma nature, je te dirais tout simplement. Alors évidemment, ces élections font de la droite mon adversaire, mais pas des hommes mes ennemis.

Alors justement, qu’est-ce que tu penses de l’ouverture ?

D’un homme de droite qui rejoint la gauche, je veux penser tout bonnement qu’il revient à de meilleurs sentiments ! Hé, hé ! Mais j’ai du mal à croire qu’un homme de gauche qui rejoint la droite puisse le faire autrement que par opportunisme… A nouveau, je dirais que ça ne me parait pas très… naturel. Alors la limite de l’ouverture, la voilà : on ne me verra jamais à droite.

On a beaucoup lu que Jean-Noël Guérini a encore un certain déficit d’image… T’en penses quoi ?

Vaut mieux ça que l’actuel déficit de la ville, crois-moi… car le déficit d’image, il se comble chaque jour davantage. Sinon Guérini vient de sortir un bouquin d’entretiens avec le sociologue Jean Viard, ça s’appelle « Marseille, le temps du changement » aux éditions de L’Aube, ça se lit très bien et je crois que c’est une très bonne façon d’apprendre à le connaître mieux, lui et son projet pour Marseille. Je suis en train de le lire, là, je l’ai pris hier…

photographie : Serge Scotto, Jean-Noël Guérini, Marie-Arlette
Carlotti, le Vert Ferdinand Richard et Antoine Rouzaud, du Parti Radical
de gauche.