Université : une nouvelle politeia ?

Université : une nouvelle politeia ?

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la loi LRU fait couler beaucoup d’encre. Des bloqueurs nihilistes et anti-démocrates affrontent des pourfendeurs de Khmers rouges autoproclamés... Quelques remarques en vrac.

Tout d’abord, sur la réforme "tant attendue" des universités. Beaucoup de bruit pour un peu de sémantique, non ? Jadis, les facultés devenaient des unités de formation et de recherche. A l’époque, c’était le drame ; désormais, certains puristes bondissent à la gorge de leur interlocuteur mentionnant la "fac de droit". Aujourd’hui, le contrat quadriennal devient un plan pluriannuel... sur 4 ans. Bon, bin la révolution sera pour plus tard.

Ensuite, sur la mobilisation étudiante. Tous les étudiants ne sont pas des bloqueurs d’université : certains voudraient juste aller en cours, d’autres veulent casser du gauchiste, et d’autres encore sont bien contents de passer leurs journées à boire des cafés ou arpenter les cinés en raison de ces vacances forcées. Ceci dit, si certaines orientations de la loi Pécresse semblent nécessaires et si personne ne peut prétendre que le statu quo devait prévaloir, il est évident que l’absence d’écoute et de concertation marque une pratique autoritaire du pouvoir.

Elu national de la FAGE, j’ai pu participer aux "négociations" (sic) sur cette loi : beaucoup de promesses et peu de résultats. On s’y attendait. Par exemple, le Président de la République s’était engagé à doubler la dépense publique au bénéfice des étudiants pour l’aligner sur celle des lycéens. On a bien vu qu’on en était encore loin. Alors si l’autonomie revient à laisser les universités seules face à la gestion de la pénurie, on peut comprendre les inquiétudes chez les étudiants et dans le corps enseignant... Le corps enseignant, d’ailleurs, qu’en pense-t-il, de cette loi ? Beaucoup d’étudiants aimeraient le savoir.

Et beaucoup d’étudiants aimeraient aussi ne pas devoir choisir entre la qualité du service public d’enseignement supérieur et la qualité du service public de l’électricité : vendre 3% du capital d’EDF pour injecter des sous dans les campus va à mettre face à face les syndicats étudiants et les syndicats professionnels. La présidence Sarkozy ne sera pas celle de la cohésion sociale. Ah moins que... Tous unis dans les mêmes cortèges ?

L’usage du terme "politeia" dans le titre n’est pas esthétique. Il apparaît pour la première fois chez Hérodote au milieu du Vème siècle avec la valeur individuelle de "droit de cité", ce qui signifie que les droits individuels du citoyen ont été définis avant la conceptualisation du régime politique. Dans une France qui se voudrait humaniste, on n’attache pas assez d’importance à cet individualisme. Faisons écho à cette sagesse athénienne : pourquoi ne pas réfléchir aux droits des étudiants, des chercheurs et des enseignants avant de faire à la va-vite une réforme globale d’un système d’éducation en perdition ?