Frédéric Viniale, roi du net

Frédéric Viniale, roi du net

Il existe une quantité d’individus qui ne vivent que par et pour la sphère médiatique, le mass-media, cet « ensemble de moyens de diffusion de masse de l’information, de la publicité et de la culture, c’est-à-dire des techniques et des instruments audiovisuels et graphiques, capables de transmettre rapidement le même message à destination d’un public très nombreux. » (cf. Définition du TLF).

Ces mammifères terrestres se nourrissent essentiellement de buzz, de Unes, de Prime time et autres passages radios, qui leur confèrent le statut de star et l’argent qui va avec, tant envié par "la France d’en bas".

Frédéric Viniale est né et a grandi dans cette sphère !
Cette sphère spectaculaire qui fonctionne comme une famille incestueuse et népotique, et qui compte parmi ses membres les plus influents, la télévision, la presse et la radio. Cette sphère, ou golem médiatique, qui contrôle tout, au service d’une économie guerrière et triviale et d’une morale consensuelle - au sein d’une terminologie qu’elle génère et définit elle-même - a accueilli ces dernières années un petit nouveau dans la famille, qui, pour ne pas faire mentir son jeune âge, est bien plus remuant et incontrôlable que ses aînés.

Frédéric Viniale est à cette image, « multi-faces », jeune et remuant.
Ce nouveau media, l’internet et son frère souterrain le web ("à l’intérieur même du Net émerge une sorte de contre-Net, que nous appellerons le Web (comme si le Net était un filet de pêche, et le Web des toiles d’araignées tissées dans les interstices et les failles du Net), Hakim Bey, TAZ - Zone Autonome Temporaire), ce nouveau media donc, tohu bohuesque, chaotique, neurorganique, hypertextuel et hypersexué, crée lui aussi ses propres stars, de manière plus anarchique que ses aînés, car il répond à un autre besoin, moins soumis aux contingences du pouvoir absolu de l’économie tel qu’il s’est affiné au vingtième siècle (lire à cet effet le très bon texte de Juan Hastings, La guerre en Irak ou le symptôme d’un retour à un ordre féodal)

Frédéric Viniale est l’une de ces stars.
Prenez maintenant l’expression In medias res, issue du fragment d’un vers de l’Art poétique d’Horace, et qui signifie littéralement, « en plein sujet ; au milieu de l’action » ; prenez l’argyronète qui est une araignée qui tisse une bulle de soie sous l’eau, pour garder l’oxygène nécessaire à sa survie, et vous aurez une idée de ce à quoi ressemble l’un des sites phares du net français Le Mague, nouvelle figure libre du net, webzine de luxe, vibratif et vibrogène, sensitif et abrasif, festif et révolté, dont le créateur n’est autre que Frédéric Vignale.
Fort de plus de 5000 visiteurs uniques par jour, Le Mague s’est créé une place tout seul, à la force du poignet, en éreintant les stars de pacotille, ces nouvelles marques de la culture de supermarché.

Aujourd’hui, les gens achètent des livres comme ils achèteraient une paire de Nike. Perdus dans le no man’s land de la critique actuelle, elle-même perdue dans la nostalgie de son glorieux passé et submergée par la multitude des produits culturels et le manque de discernement et de tripes au ventre des critiques, les spectateurs et les lecteurs errent dans le labyrinthe culturel de l’époque. On pourrait presque leur pardonner de ne prendre sur les têtes de gondole des magasins que les Beigbeder et autres Amélie Nothomb pour compléter leur panoplie culturelle comme s’il s’agissait d’accessoires de mode. Mais non, l’époque est à la révolte. Hors de question de payer pour de tels produits manufacturés et lénifiants.

Sur les braises de ce système de non-valeurs, un fakir du net est en marche, Frédéric Viniale est son nom.
Espérons seulement que son équipe et lui-même fassent attention à ne pas tomber dans les pièges de la hype et du commérage, pour ne pas devenir un Voici magazine de la culture de plus. En attendant que la farce soit avec eux.

Philippe KREBS, Hermaphrodite, le 22 septembre 2003.

Philippe KREBS, Hermaphrodite, le 22 septembre 2003.