La Présidente de la SPA dénonce le Scandale des Chiens de Sécurité (Interview)

La Présidente de la SPA dénonce le Scandale des Chiens de Sécurité (Interview)

Alors que les parlementaires se préparent à durcir la législation sur les chiens dangereux, on déplore encore un drame où un enfant de deux ans est mort, attaqué par un chien de race indéterminée, sans doute un croisement de berger allemand et de beauceron… L’animal appartient à un agent de sécurité, qui pendant sa journée de repos, mardi, l’a confié à son neveu, âgé de 42 ans. En attendant l’ascenseur, l’enfant a été agressé alors qu’il attendait l’ascenseur avec sa mère et sa tante, dans le hall de l’immeuble. Il ne s’agissait pas d’un pitbull dressé par un cador des cités, mais d’un chien de travail, comme on en voit tant de nos jours. Ces chiens sont-ils tout autant dangereux ? Ces chiens sont-ils mal tenus ? Caroline Lanty, présidente de la Société Protectrice des Animaux, dénonce dans Le MAGue le scandale des maîtres-chiens.

Le MAGue : Madame la Présidente, que pouvez-vous dire sur le chien responsable de la mort d’un nourrisson mardi à Bobigny ?

Caroline Lanty : Le chien a été amené mardi soir en clinique vétérinaire. L’animal était agonisant : il avait reçu des coups de poing, plusieurs coups de couteau, etc. Ceux qui ont assisté au drame ont tout fait pour le neutraliser pour porter secours à l’enfant. J’ai assisté à l’autopsie mercredi après-midi. Ce chien n’a pas été euthanasié, il est mort de ses blessures.

Le MAGue : Quelle impression vous a donné cet animal meurtrier ?

Caroline Lanty : Si la SPA l’avait rencontré au cours d’un contrôle, elle aurait certainement porté plainte pour mauvais traitements. Il s’agit d’un chien sous-alimenté qui pesait 10 kgs de moins que son poids normal. Le vétérinaire et moi-même avons constaté un mauvais état sanitaire général : à 2 ans et demi, ce chien avait la dentition d’un animal de 9 ans, ce jeune adulte avait l’aspect d’un vieillard ! Il avait toutes les apparences d’un chien mal entretenu, et vraisemblablement très mal suivi du point de vue vétérinaire.

Le MAGue : Vous êtes-vous faite une opinion sur son propriétaire ?

Caroline Lanty : Il s’agit d’un chien de travail qui appartenait à un agent de sécurité. Son maître est aujourd’hui en garde a vue, car il est poursuivi pour des faits graves, à savoir l’agression et la mort d’un enfant. La SPA va certainement porter plainte pour mauvais traitement sur l’animal.

Le MAGue : Que pensez-vous des chiens de sécurité et des maîtres-chiens ?

Caroline Lanty : On est dans le cas d’un agent de sécurité qui considère son outil de travail comme un fardeau : leurs chiens, après leur journée ouvrière, sont en général mis à l’écart, rangés comme un ustensile. On en voit mis en cage de transport, à la cave, ou encore sur le balcon du propriétaire, en plein vent. À la SPA, nous sommes souvent appelés pour les signalements de cas de maltraitance de chiens de sécurité.

Le MAGue : Ce chien serait dont l’illustration d’un scandale de la profession ?

Caroline Lanty : Le chien est considéré comme un outil de travail et non comme un être vivant, comme un animal. Ses besoins vitaux ne sont en général pas satisfaits. Il faudrait qu’il vive en société, qu’il soit nourri correctement, et dans le cas contraire, il ne peut pas être un chien équilibré ! Il arrive même que leurs maîtres soient violents avec eux, ce qui renforce le caractère dangereux du chien.

Le MAGue : Êtes-vous en train de nous dire que les professionnels de la sécurité font n’importe quoi ?

Caroline Lanty : L’activité de maître-chien est bien encadrée, et les règles existent. Nous connaissons des entreprises qui prennent soin des chiens qu’elles utilisent, mais le coût d’entretien et les soins qu’il leur faut apporter apparaissent parfois trop importants pour certaines. D’après le syndicat national des entreprises de sécurité, Il y a beaucoup de travail dissimulé, beaucoup de dérives en ce qui concerne la réglementation.

Le MAGue : La réglementation en matière de chiens dangereux va être renforcée par le ministre de l’Intérieur, Michèle Alliot-Marie ; va-t-elle dans le bon sens ?

Caroline Lanty : Le gouvernement ne prend pas comme il faut ce problème, selon la SPA et beaucoup de vétérinaires ! Ce n’est pas une question de race mais il est nécessaire d’agir d’abord sur la moralisation du commerce animalier, ensuite sur la formation et l’éducation des propriétaires de chiens, et plus généralement d’animaux de compagnie. Par rapport à la réflexion que le gouvernement a menée en un mois, le chantier est beaucoup plus important ! Au quotidien par exemple, lorsque la SPA demande le soutien de la police pour effectuer des retraits d’animaux maltraités, sa participation est souvent difficile à obtenir…

Il a plein de travail, mais n’a pas de salaire :
Assis là, rester sage, avoir l’air menaçant,
Être un petit soldat en un mot comme en cent,
Qu’est-il après avoir ôté sa jugulaire ?

On le met dès le soir en fourgon cellulaire
Ce chien qu’on nous disait volontiers bondissant,
Il n’est pas estimé, alors il le ressent,
Et il ressemble ensuite au maître atrabilaire !

Cet animal qu’on hait devient vite agressif,
Il mord à l’instant même où on le croit passif,
Vivre en sa compagnie est alors impossible.

On craint ses crocs, ce qui ravit le collégien,
Il pense avoir au pied ce pouvoir ostensible
Quand le maître avec lui se conduit comme un chien !