SERGE GAINSBOURG, PRINCE DU CALEMBOUR.

SERGE GAINSBOURG, PRINCE DU CALEMBOUR.

C’est avec grand plaisir que nous avons pu revoir Serge Gainsbourg sur France 2, le vendredi 3 août, dans l’émission "Les années bonheur" de Patrick Sébastien.

Tout l’été les grandes chaînes doivent se donner le mot pour nous bassiner avec des "Best of", alors qu’il y a tellement de films de la riche cinémathèque française à nous rediffuser, mais cette émission-là valait le coup d’oeil rien que pour se remémorer quelques instants l’ami Serge.

Prince de la provocation, homme de coeur, compositeur génial à l’écriture talentueuse et écorché vif, cet hypersensible a fait couler beaucoup d’encre.

Aimé et détesté, il était bien loin de faire l’unanimité et pourtant... comment ne pas fondre devant ses larmes lorsque de petits chanteurs, habillés et maquillés pour lui ressembler tenant un verre de jus de pomme dans une main et cigarette en chocolat dans l’autre, étaient venus lui chanter : "Je suis venu te dire que je m’en vais" (chanson prémonitoire s’il en est).

Lucien Ginsburg dit Serge Gainsbourg ou "l’homme à tête de chou", comme il se définissait lui-même, avait deux visages et deux personnalités bien que ne souffrant absolument pas de schizophrénie. Il était l’exemple même de ce que nous représentons tous, avec notre côté bon enfant et notre côté plus sombre.

Gainsbourg et Gainsbarre c’est comme Renaud et Renard... un harmonieux mélange de bien et de mal, la joie et la souffrance. Pour Serge sa souffrance cachée remonte dans le temps de son adolescence, période pendant laquelle il avait été obligé de porter l’étoile jaune des juifs durant la seconde guerre mondiale. Déjà à cette époque il essayait de prendre ce grand malheur avec une certaine forme d’humour en prétendant, plus tard, avoir porté l’étoile du Shérif.

Son dégoût de la chose militaire et de tout ce qui porte un uniforme l’entraînera vers l’insoumission. Il ira même revisiter l’hymne national en lui apportant des consonances "reggae", ce qui déclenchera la colère des paras qu’il prétendait mettre au pas.

Contre le système injuste des "Impôts" qui se servent royalement sur le dos des artistes, il s’en ira même brûler un "Pascal" (billet de 500 francs ou plus de 76 €) sur un plateau de télévision, pour nous montrer ce qui lui restait après le passage des "bandits de grands chemins du gouvernement".

Serge était autant imprévisible, qu’incensurable... surtout en direct. Combien de fois avons-nous envie de pouvoir dire et faire comme lui, en criant tout haut contre toutes les injustices qui nous étouffent et nous font devenir des sous-hommes face à nos patrons ou à nos gouvernants. Il y a encore tellement de "Bastille" à prendre... mais sans armes, il ne nous reste plus que les mots des artistes qui nous invitent à nous lever pour ne jamais être rangé au rang d’esclave.

Rebelle assurément, Serge Gainsbourg se servait de sa verve comme d’une arme non criminelle contre la bêtise humaine sous toutes ses formes. C’était avant tout un être loyal et franc. Il jouait sur les mots et les notes de la gamme pour nous régaler.

Après Boris Vian, Léo Ferré, Jean Ferrat, Renaud Séchan et Serge Gainsbourg... il n’y a plus grand monde pour nous inviter à danser la "carmagnole" et pour nous inciter à sortir de notre léthargie maladive qui ne nous invite plus à brandir le drapeau de la révolte, face à tous ceux qui nous écrasent pour nous rendre plus serviles et plus dépendants.

"Des p’tits trous, des p’tits trous, toujours des petits trous" ...nous chantait Serge Gainsbourg, dans le "poinçonneur des Lilas", pas pour nous inviter à changer de trou (sans connotation sexuelle !), mais simplement pour nous faire prendre conscience que nous finirons tous dans un grand trou (petits et grands de ce monde) parce que personne n’échappe à son destin, alors autant lutter pour vivre intensément et sans courber l’échine.

Des mecs comme toi, Serge, on en aurait bien besoin aujourd’hui pour tordre le cou à la censure et à tout ce qui nous limite dans la vie de tous les jours en nous empêchant d’avancer !