François Fillon : son action en Région

François Fillon : son action en Région

La vieille lune d’un François Fillon héritier du gaullisme social doublée de l’image d’un homme dévoué à l’administration de sa Région est des plus risibles : pour être estimable en tant qu’individu, l’homme public est politiquement très à droite et plutôt désengagé de la gestion des dossiers ligériens. N’en déplaise aux médias.

Ainsi, au Conseil régional des Pays de la Loire, dont il voulait faire un « laboratoire de la droite », il fait alliance depuis 1998 avec le MPF de Philippe de Villiers, qui est plus proche de Jean-Marie Le Pen que de la social-démocratie. D’ailleurs, François Fillon préside encore aujourd’hui ce groupe nommé « Union des Pays de la Loire ».

Comme président de Région, il n’a jamais montré un intérêt particulier pour le « social » : aucun crédit consacré à la construction de logements sociaux, refus perpétuel d’instaurer la gratuité des manuels scolaires pour les lycéens (ce que la Gauche a fait dès son élection en 2004) ou de supprimer la taxe sur les Permis de conduire (ce que la Gauche a également mis en place), et bien sûr refus d’une tarification spéciale sur les trains régionaux pour favoriser la recherche d’emplois par les chômeurs.

Enfin, dans le domaine économique, il n’a jamais eu la moindre considération pour le secteur de l’économie sociale et solidaire, qui représente plus de 140 000 emplois en Pays de la Loire.

Ce que l’on peut dire dès aujourd’hui, c’est que rien dans son action à la tête des Pays de la Loire ne laisse présager un rééquilibrage « à gauche » d’un président de la République portée sur l’ultralibéralisme. En témoignent les procès-verbaux des séances du Conseil régional des Pays de la Loire entre 2000 et 2004.

2000 : entre libertés locales et intérêt national

Le 31 mars 2000, lors de la discussion du Contrat de Plan Etat-Région, François Fillon fustige les « ambiguïtés d’une décentralisation inachevée et trop souvent suspectée » et fait part de son sentiment selon lequel la France connaît un « contexte de plus en plus difficile pour les libertés locales ». Etrange de s’inquiéter de cela en l’an 2000 pour faire plus tard l’intense promotion de la Loi sur la Sécurité Intérieure imaginée par Nicolas Sarkozy en 2003, qui fut directement inspirée de son homonyme américaine mise en place par Georges W. Bush.

François Fillon dénonce ensuite un fait clair : « l’Etat fait payer un nombre croissant de ses compétences par les collectivités ». Si cela le dérangeait lorsqu’il présidait une Région, pourquoi le gouvernement dont il était n°2 (devant Dominique de Villepin… qui n’était alors que n°3) n’a-t-il pas mieux fait les choses en août 2004 ? Comme l’ajoutait si bien le nouveau Premier ministre : « c’est le rôle de l’Etat de faire des choix et d’arbitrer au nom de l’intérêt national »… Et l’intérêt régional dans tout ça ? On est curieux de voir la politique du nouveau locataire de Matignon en matière de décentralisation !

2001 : une certaine vision de la décentralisation… et de l’Europe

Dans la séance du 28 mai consacrée à la décentralisation, François Fillon introduit son propos par une méfiance à l’égard de ce processus en précisant que « la décentralisation peut être une chance pour la France, mais elle peut également être, si certaines conditions méthodologiques et politiques ne sont pas remplies, une défaite pour la République. » Selon lui, « il convient d’arbitrer en faveur d’un Etat qui doit, en certains domaines, être acteur, et en d’autres, régulateur, d’un Etat recentré et relayé par des collectivités locales ». Pourtant, les Régions ne sont ni des sous-fifres ni des sous-traitants de l’Etat mais bel et bien des exécutifs locaux investis de la légitimité des urnes qui doivent par conséquent remplir leur fonction en toute indépendance.

François Fillon fait également une parenthèse en dénonçant « le paradoxe qui veut que l’Etat délègue certaines de ses responsabilités les plus sacrées à l’Europe, aux commissions indépendantes ou aux experts, mais ne semble pas se lasser de suspecter et d’encadrer les collectivités locales. » On pourrait presque croire que le nouveau Premier ministre est un tantinet souverainiste (ce qui expliquerait ses alliances avec le MPF de Philippe de Villiers) ou un euro-sceptique (ce qui est contradictoire avec le programme du Président de la République qui l’a nommé à Matignon).

Etonnamment, en conclusion de son discours, François Fillon explique que « la société française est avide de participation : il faut la solliciter‚ il faut avoir confiance en elle. » N’est-ce pas précisément une des principales critiques faites à Ségolène Royal pendant la campagne présidentielle ?

2002 : vaines paroles pour l’éducation et les transports

Après un premier semestre où il s’est contenté de distribuer la parole pendant les débats, François Fillon est présent en juin 2002 pour transmettre les pouvoirs présidentiels à son successeur tout en restant 1er vice-président. Il fait alors une longue déclaration, plus mesurée qu’à l’accoutumée, où il affirme tout de même sa « conviction que l’éducation et la formation constituent dans un monde ouvert et compétitif un atout décisif ». Son action en la matière n’est pourtant pas des plus remarquables puisqu’il a toujours refusé d’instaurer la gratuité des manuels scolaires pour les lycéens (ce que la Gauche a fait dès son élection en 2004).

Dans son discours, il se gargarise également de la « régionalisation réussie des transports ferroviaires ». Pourtant, le Conseil régional des Pays de la Loire, une fois la majorité passée à gauche, a du acheter en urgence 46 trains entre 2004 et 2007 pour pallier au déficit en la matière du fait du désengagement de la précédente majorité dans ce domaine.

Après ce passage de flambeau, François Fillon ne remettra les pieds dans l’hémicycle qu’une fois, pour une session extraordinaire en septembre, afin de conserver son poste de 1er vice-président de la Région, mais il ne prononcera pas un mot de la séance.

2003 : le chantre d’une décentralisation non-compensée

Présent une seule fois, en avril, où il part en cours de séance (dans la matinée) après avoir prononcé une longue tirade sur la décentralisation, pleine de promesses… toujours pas réalisées !

Lors de cette séance, François Fillon reconnaît que « tout le monde – ou presque – convient qu’une nouvelle étape doit être franchie dans la décentralisation » et affirme, en sa qualité de ministre, que « le Gouvernement va soumettre un certain nombre de textes sur les transferts de compétences et sur la mise en place de nouveaux dispositifs fiscaux pour permettre aux collectivités locales d’assumer ces compétences ». Il ajoute qu’il n’y a aucune inquiétude à avoir sur le plan budgétaire car « nous sommes maintenant garantis par les dispositions qui interdisent désormais à l’État de transférer des responsabilités aux collectivités locales sans mettre en œuvre les ressources correspondantes. » Pour donner plus de force à ses propos, le ministre ajoute même que « telle est la grande avancée de cette réforme constitutionnelle ! […] Ce n’est pas une déclaration d’intention. C’est la Constitution de la France ! »

Pourtant, de nombreuses compétences dont ont héritées les Régions par la loi du 13 août 2004 (préparée par Gouvernement Raffarin-3 dont François Fillon était n°2) n’ont pas été compensées par un transfert de crédits, ce qui a obligé les collectivités à augmenter les impôts locaux, processus qu’il fut facile de critiquer par Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle. A l’inverse, l’Etat qui dispose par effet mathématique de plus d’argent n’a pas amélioré la qualité du service public !

Pour l’anecdote, François Fillon précise qu’il faudra « un certain temps pour que la culture de l’intérêt général se mette bien en place dans les collectivités »… Il faut croire qu’il n’a pas pris le temps d’assimiler cette culture-là pendant ses années à la tête de l’exécutif régional.

2004 : un conseiller régional parfaitement inactif

Présent une seule fois (en décembre) où il part en cours de séance sans avoir prononcé un seul mot.