LETTRE SUR LES AVEUGLES A L’USAGE DE CEUX QUI VOIENT (version 2007)

LETTRE SUR LES AVEUGLES A L'USAGE DE CEUX QUI VOIENT (version 2007)

Joseph Joubert avait écrit « Quand mes amis sont borgnes, je les regarde de profil. » Futé ! La leçon semble avoir été entendue. Elle a réussi à certains. A propos de leçon, vu l’extraordinaire amnésie qui semble affecter nos contemporains quant à celles de l’histoire, on va faire ici une piqûre de rappel. A chacun d’en tirer les conclusions (ou de faire les rapprochements) qu’il veut.

Commençons par une constatation de Julien Benda (« Mémoires d’infra-tombe », 1952)

« Le premier numéro du journal de sir Oswald Mosley, le leader du fascisme britannique, annonce, dans son éditorial, l’idéologie « dynamique » du parti. Qu’est-ce qu’une idéologie dynamique ? C’est celle qui exalte la volonté de ne jamais se contenter de ce qu’on a, de toujours avoir plus, la plénorexie dont parle Platon – de la satisfaire par tous les moyens (…) (elle) devait attendre notre âge pour être épinglée en valeur morale. Vivent les époques civilisées ! Il est clair que l’idéologie démocratique, avec son respect claironné des droits d’autrui, sa condamnation des guerres de conquête, son exaltation des valeurs de justice et de raison, est le contre-pied exact de l’idéal dynamique. ».
Tiens ?

Poursuivons par un entretien avec un homme politique « raisonnable » (tiré du « Livre jaune français, documents diplomatiques 1938-1939 », Ministère des Affaires Etrangères », presses de l’Imprimerie Nationale, 1939) :

M. François-Poncet, Ambassadeur de France à Berlin, à M. Georges Bonnet, ministre des Affaires étrangères. Berlin, le 20 octobre1938.
« Le Chancelier m’accueille avec amabilité et courtoisie. Il a le visage blême et fatigué. Il n’est pas dans un jour d’excitation ; il est plutôt dans une phase de détente. (…) Depuis près de deux heures, M. Hitler se prête ainsi de bonne grâce à mes question ; il y répond sans la moindre gêne, avec simplicité, et du moins en apparence, avec franchise. (…) Pendant toute notre conversation, et sauf quelques bouffées de violence quand il s’est agi de l’Angleterre, le Führer a été calme, modéré, conciliant. On eut été en droit d’imaginer qu’on avait devant soi un homme bien équilibré, plein d’expérience et de sagesse et qui ne désirait rien tant que de faire régner la paix parmi les peuples. »
Y’a pas ! Il y en a qui savent vraiment bien cacher leur jeu !

Achevons avec quelques citations bien senties :

L’école (extrait d’un discours de Maurice Pujo au congrès de la Jeunesse d’Action Française ; in « L’Action Française et le Vatican », préface de Charles Maurras et Léon Daudet, Paris 1927)) : « (…) c’est pourquoi l’on voit aujourd’hui ces pontifes délaissés, encore maîtres des postes de l’enseignement supérieur, essayer de faire disparaître l’enseignement secondaire où l’influence leur a complètement échappé et le ramener, en éteignant la lumière des humanités, au nivellement de l’enseignement primaire. ».

Déjà à l’époque l’enseignement foutait le camp et fallait remettre de l’ordre (c’était pas la faute à mai 68 !)…

Les étrangers (s’ils ne sont pas contents de la France, ils n’ont qu’à partir !)

(Le Passe-Partout du 7 janvier 1932) : « (…) s’ils ne veulent plus travailler la glèbe, mais ma foi, nobles seigneurs, la frontière est ouverte, et bon voyage et surtout long retour. ».

Comme quoi Monsieur Sarkozy a tort. De Gaulle et les faucons américains (America : love it or leave it) n’ont rien inventé.
De toute façon, faut savoir nettoyer au Kärcher et choisir ses immigrants : « On sait que quand un pays exporte ses sujets, ce ne sont pas les meilleurs. »

(« Le Nouvelliste » du 12 avril 1936). »l

La génétique (et l’eugénisme, qui fut allégrement pratiqué en Europe et aux Etats-Unis avant même qu’elle ne le soit en Allemagne nazie (juillet 1933). Il apparaît dés 1928, dans la si démocratique Suisse (stérilisation des malades mentaux dans le canton de Vaud) puis en 1934/1935 (Norvège, Suède, Danemark, Finlande…). Alfred Siegfried, responsable de la persécution des Tsiganes en Suisse dans les années 30, osait encore affirmer en 1964 : « Le nomadisme est, comme certaines maladies dangereuses principalement transmis par les femmes. »
Mais à cette époque ignare, on ne connaissait pas encore le gène du suicide.

La baisse des charges, les chômeurs, la valeur travail :
(Un rapport de février 1931) « Ils (les patrons) se plaignent des impôts nombreux et de l’application de la loi sur les assurances sociales. »
« S’opposer énergiquement à l’Etatisme (…)Diminuer le nombre des fonctionnaires en les payant plus, mais en obtenant plus de travail. »
(« Le Nouvelliste » du 13 février 1932). »

Toute ressemblance entre certains propos et certaines pratiques actuelles et les années trente ne serait que purement fortuite.