Boulevard Sarkozy

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Éric Damfreville est aujourd’hui à Paris, libéré après avoir été l’otage et l’instrument de la résistance afghane avec sa collègue Céline Cordelier pour les élections présidentielles pendant 5 semaines. Les talibans ayant subordonné leur libération à un échange de prisonniers, ainsi qu’au retrait des forces françaises d’Afghanistan. Cette nouvelle prise d’otages, le 3 avril, intervient juste avant l’exécution du chauffeur de l’Italien Mastrogiacomo, à cause dit-on, de l’intransigeance d’Hamid Karzai. Le précédent fait beaucoup craindre pour les deux Français, faits prisonniers avec trois Afghans qui les accompagnent dans leur travail humanitaire. La diplomatie et le gouvernement français se montrent très discrets, mais activent leurs réseaux en coulisse. Pendant la campagne, le cas ne fait pas débat. Tout juste Le Canard enchaîné parle-t-il d’une demande de rançon de 10 millions de dollars. Le 20 avril, les chefs talibans réclament le départ des troupes françaises dans la semaine. Le 26, le candidat Sarkozy déclare à la télévision que leur présence ne lui paraît pas décisive. Ségolène Royal ne s’inscrit pas en faux. Deux jours plus tard, la jeune femme est libérée, visiblement très éprouvée, elle supplie que ses geôliers prennent Éric en pitié. Ceux-ci repoussent leur ultimatum par deux fois, et le suspendent à la formation d’un nouveau gouvernement en France. C’est donc un peu avant, alors que s’élaborent les discussions pour l’attribution des 15 portefeuilles ministériels du cabinet Fillon, que Philippe Douste-Blazy annonce vendredi après-midi la libération d’Éric Damfreville, et organise son retour à Paris en catastrophe. Si l’élargissement d’otages apparaît dorénavant comme une exercice imposé de l’élection présidentielle, il est aujourd’hui à mettre à l’actif d’un homme en perte de vitesse au sein du gouvernement Villepin, peu à son aise au Quai d’Orsay, mais qui parvient à se remettre en selle in extremis, en tirant une belle épine du pied du nouveau président, qui doit prendre ses fonctions mercredi.

Au trou, les fers aux pieds, un bâillon sur la bouche,
Il attendait qu’on forme un vrai gouvernement
Non pas un cabinet qui fait pour le moment
Ce qu’il faut pour trouver de nouveaux prés d’embouche.

De celui qui fait voir le moins sous son tarbouche,
On n’attendait pas trop qu’il fasse un bond, vraiment !
Mais cet écueil, pour l’heure, est aussi le tourment
Du grand toubib qu’on voit à l’œuvre au bouche-à-bouche.

La France, ainsi, n’a pas fait pièce au taliban,
Même après l’avoir mis depuis longtemps au ban :
Sa présence à long terme est si peu décisive…

L’indulgence est de mise et on en sait peu sur
Un fait neuf dont l’annonce est vraiment évasive :
On n’a parlé de rien, pas de rançon, bien sûr !

 

Le périple d’Éric Damfreville :