Dilemme Cornélien

Dilemme Cornélien

Manifestation monstre à Istanbul pour la défense de la laïcité, 750.000 personnes selon la police, 1,2 millions de personnes selon les organisateurs, les partis d’opposition qui ont par ailleurs déposé un recours en annulation afin d’invalider le processus d’élection du Président de la république. L’AKP, le Parti de la justice et du développement, qui dispose de la majorité au Parlement turc avait lâché du lest en substituant la candidature du ministre des Affaires étrangères Abdullah Gül à celle du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, mais vendredi soir, l’état-major de l’armée a publié un communiqué pour mettre en garde le parti au pouvoir : les forces armées turques demeurent profondément résolues à assumer leurs responsabilités que leur confère la loi afin de protéger les caractéristiques immuables de la République de Turquie. Leur fidélité à cet engagement est absolue. Il est fait reproche au gouvernement d’ébranler les valeurs fondamentales de la République de Turquie, particulièrement la laïcité. Une première fois en 1997, les militaires avaient fait chuter un gouvernement islamiste et depuis 2002, lorsque les fondamentalistes modérés ont repris les rênes du pays grâce au verdict des urnes, ils n’ont cessé de faire pression discrètement pour garantir la stabilité du régime. Inspiratrice de la constitution de 1980, l’armée est très puissante en Turquie depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Son chef d’état-major est l’égal du ministre de la Défense et forte de 800.000 hommes, elle constitue le 2ème contingent de l’OTAN. C’est un monde à part dans la société turque, qui joue un grand rôle dans la formation des élites, et jouit d’une immense popularité malgré son influence dans la vie économique et politique du pays, toujours sujette à caution. Mais aujourd’hui en Turquie, personne n’a envie de choisir entre Allah et l’armée.

Défense, ainsi, pour le parti majoritaire
Qui veut mettre à profit l’élan de son action
En mettant la main sur la plus haute fonction :
Quand l’armée a dit non, il n’a plus qu’à se taire.

L’ambiance est devenue un peu plus délétère
Et dans la rue, on voit les gens pour l’inflexion
D’un projet malvenu ici, dont la sanction
Pourrait venir par le retour du militaire !

Qui voudrait voir l’Islam présider l’État turc ?
Pas Mustapha Kemal, le fameux Atatürk !
Mais on ne veut pas plus revoir un jour l’armée…

Le dilemme est causé par le nouveau mandat,
Mais la nation se sent depuis longtemps paumée
Or, éclairer n’est pas la fonction du soldat.