BRETAGNE : ENTRE AMOUR ET COLERE

BRETAGNE : ENTRE AMOUR ET COLERE

Bercé par la mer et fouetté par les vents, tel est le sort de ce magnifique pays où résident marins et gens de la terre.

Les Bretons sont étonnants car ils ont la réputation d’être rudes, à l’image des éléments de la nature qui balayent les côtes en s’engouffrant dans les profondeurs de l’arrière pays, mais ce sont de braves personnes qui attendent sagement que vous méritiez leur confiance.

Rien ne résiste aux éléments et rien ne peut résister au valeureux peuple breton qui est fort, puissant et obstiné.

J’aime ces personnes qui ne se laissent pas faire, comme j’aime ce pays qui me fait vibrer depuis ma plus tendre enfance et qui remue quelques molécules celtiques qui circulent en moi grâce à mon arrière grand-mère maternelle, Louise Quéhan.

La Bretagne est belle dans son entièreté, mais je la trouve encore plus sauvagement resplendissante lorsqu’elle se vide, hors saison, des touristes et autres vacanciers accueillis pendant les mois les plus chauds. Quel enchantement de voir le ciel s’assombrir, d’entendre gronder l’orage, d’être poussé par le vent et d’avoir le visage mouillé par les embruns.

J’ai connu autrefois quelques hommes aux chapeaux ronds à ruban noir et aux gilets scintillants de broderies Cornély, ainsi que quelques fraîches et jolies Bigouden qui me faisaient rêver lorsqu’elles étaient coiffées de dentelles. Les maisons étaient robustes car construites avec le granit de la côte. L’intérieur était chaleureux et rustique, comme ces beaux meubles de chêne aux sculptures qui racontaient la vie et qui abritaient la vaisselle en faïence de Quimper. Il m’arrivait d’entendre le bruit chantant et lourd des sabots de hêtre portés par d’authentiques lavandières qui ne parlaient que la langue bretonne, riaient et chantonnaient en battant le linge qui sentait si bon le savon. Quel bonheur de voir travailler le sabotier, le maréchal-ferrant, la filandière et le courageux paysan, quel plaisir de les regarder se réunir et défiler lors des pardons. Je passais des heures, sur les rochers, à admirer un puissant cheval qui tirait un tombereau rempli de goémon. J’allais sur le port d’Etel pour écouter le bruit de la criée. Sardines, homard, coquilles Saint Jacques, huîtres de belon inondaient les marchés…

… Puis il y a eu de trop nombreuses marées noires déversées par des pétroliers vieux et rouillés, affrétés par des salopards inconscients qui mettent tout en œuvre pour faire mourir ma Bretagne en se bourrant les poches de fric sale. La nation bretonne vous maudit vous et vos descendants, car elle n’a aucune pitié pour celles et ceux qui goudronnent les ailes des mouettes, des goélands argentés et des hirondelles de mer. Vous avez tout pollué, tout noirci jusqu’au moindre bernique et bigorneau… puis vous ne voulez pas reconnaître votre responsabilité après ces catastrophes écologiques. Vous me faites passer de l’amour de cette terre à la colère engendrée par vos crimes odieux contre l’humanité car celui qui pollue la mer, tue la terre et ses habitants. Votre pétrole visqueux et puant n’arrivera jamais à masquer l’odeur du délicieux far aux pruneaux que nous confectionnait ma bonne mémé Yvonne, lorsque nous rentrions de la pêche aux coques et aux praires en baie de Quiberon, avec pépé Jules.

Un ami d’enfance, qui est indépendantiste Breton m’a dit, alors qu’il nettoyait les rivages souillés et qu’il était très en colère : « Un jour viendra où le peuple Breton, après avoir mangé crêpes et galettes, s’enivrera de cidre à la bolée pour aller ensuite se vider la vessie et les intestins sur les tombes des envahisseurs que sont les dirigeants pétroliers de ce monde, et nous leur planterons nos pieux acérés de vengeance dans leurs cœurs de vampires toujours à la recherche d’argent, puis nous irons rire et danser, au son de l’accordéon et de la bombarde, pour fêter dignement leur mort jusqu’au dernier d’entre eux, parce qu’ils ont sali la blanche hermine ».

Puisque la mode est aux drapeaux, il se pourrait que les partisans de la cause bretonne ressortent le « gwenn ha du » de la révolte, pour que vive la Bretagne toujours ! « breiz atao », comme ils disent.