François Bayrou et le Pont aux Ânes

François Bayrou et le Pont aux Ânes

C’est loin du VIIème arrondissement de Paris où François Bayrou a installé son QG de campagne que le candidat apprend la défection de son collègue centriste Gilles de Robien, venu rejoindre le fan-club de Nicolas Sarkozy, il est vrai avec beaucoup de componction et après beaucoup de tergiversations, mais c’est dit, dans une interview accordée au Journal du Dimanche. En tournée dans les DOM-TOM, François Bayrou apprend la nouvelle alors qu’il est confronté à un autre problème, concomitant mais autrement plus préoccupant, un engouement qui ne tient pas le coup. Après un passage dans des plantations de canne à sucre et de bananes, puis une rencontre avec des pêcheurs, le député béarnais a terminé la journée dans le village de Case-Pilote, dont le maire, Augustin Bonbois, avait parrainé sa candidature. Deux tribunes décorées avaient été dressées sur la petite place pour la réunion publique du candidat. Mais, faute de public, la rencontre s’est finalement tenue à l’intérieur de la mairie devant une centaine de personnes seulement. En métropole, il recule dans les sondages, et repasse en dessous de la barre psychologique des 20% d’intentions de vote. Samedi, Le Monde affiche : l’UMP et le PS croient fini le "moment Bayrou". Ce n’est pas le moment de flancher, il faut relancer le débat, comme à l’automne : j’ai décidé de proposer une réforme en profondeur de l’État qui commencera par la suppression de l’ENA et son remplacement par une école de haut niveau, une École des services publics, a-t-il déclaré à la presse à Fort-de-France. Lubie ou argument de fond ? Créée par l’ordonnance du 9 octobre 1945 par le Gouvernement provisoire du général de Gaulle, l’École Nationale d’Administration a formé 5600 hauts fonctionnaires français et 2600 étrangers. Délocalisée à Strasbourg en 2002, accessible à l’issue d’un premier cycle universitaire après un concours parmi les plus difficiles, l’école est devenue le symbole de l’élitisme méritocratique républicain, mais aussi du modèle technocratique à la française. Les critiques ne viennent pas seulement de ceux qui n’en ont pas été, comme l’agrégé d’Histoire François Bayrou, puisque les élèves de la promotion 2002 ont rédigé un rapport à leur sortie pour lui reprocher de dispenser une scolarité au rabais, qui n’est que l’alibi d’un concours de beauté organisé par les divers corps de l’État.

Ce candidat, c’est vrai, n’est pas passé par là
Et ça convient au vœu de plaire aux démocrates,
Mais il s’accommodait très bien des technocrates
Quand il était en poste et les soirs de gala.

L’idée est bien dans l’air pourtant, alors voilà :
On a blâmé les ronds-de-cuir, les bureaucrates,
L’élite à mettre au rang de nos mauvais picrates
Est mise en cause aussi pour tout son tralala.

L’école était le plus brillant de nos emblèmes
Et devient le point noir qui fait pour nos problèmes
Un poids qui interdit de prendre un bon départ.

Bon, pourquoi pas ? À moins que l’homme ainsi s’efforce
De se remettre en selle et prendre aussi sa part,
Il faut trouver un truc pour revenir en force !