VOTEZ FOU !

VOTEZ FOU !

Ce pourrait être une bonne idée, déjà tout un
programme, mais c’est surtout le titre d’un livre de
Bruno Fuligni (aux éditions Horay), sous-titré :
Candidats bizarres, utopistes, chimériques, mystiques,
marginaux, farceurs et farfelus/ de 1848 à nos jours,
les élus auxquels vous avez échappé.

Et l’on se rend compte qu’ils sont pléthore, souvent
amusants, parfois angoissants mais en tout cas
toujours utiles ! Car tous ces candidats que d’aucuns
jugeront de trop et qui jamais n’arrivèrent à grand
chose, nous renvoient souvent aux ridicules et aux
travers de notre société et de la chose électorale...

Le livre est savoureux, qui nous fait découvrir ces
grands petits personnages, offrant déjà le mérite de
les recenser : il n’en existait pas encore
d’anthologie raisonnée !

Pourtant, à chaque scrutin depuis l’institution du
suffrage universel en 1848, des individus isolés
tentent leur chance en marge des partis organisés.
Inventeurs, mystiques, farfelus ou simples farceurs,
ces utopistes sauvages se présentent devant les
électeurs avec des programmes inclassables, mélange de
rhétorique politicienne et de fulguration poétique,
d’une grande originalité dans le fond comme dans la
forme, donc ! Une bande d’allumés porteurs de projets
grandioses dans tous les domaines : organisation
sociale, moyens d’éclairage et de transport, religion
nouvelle, programme de paix perpétuelle, réformes de
la sexualité... Et l’on s’apercevra que certaines
fantaisies d’hier sont devenues des réalités : vote
des femmes, union européenne, ou que dire encore de
ces "villes à la campagne" préconisées par Captain Cap
et de la "vélorution" appelée de ses voeux par Aguigui
Mouna... Deux thèmes d’une rare clairvoyance
écologique et dont on reparle aujourd’hui sans sourire
 ! Et le fantasmagorique Horace II, comte de Boudrant,
était-il si fou lorsqu’il proposait la plantation
d’arbres fruitiers le long des routes pour sustenter
les pauvres ?

Citons encore l’anarchiste Zo d’Axa, qui soutint la
candidature d’un âne baptisé Nul ! Il s’agissait d’un
petit âne blanc, qui aurait permis aux mécontents de
voter Nul, de voter blanc, tout en se faisant
entendre. Ce que réussit quelques générations plus
tard le chien Saucisse, chroniqueur au Mague et
ailleurs, qui en 2001 s’était présenté aux élections
municipales à Marseille, où il obtint un score tel
qu’il est bien sûr à sa juste place dans cet ouvrage
indispensable en ces temps confus de période
pré-électorale. Gloire soit ainsi rendue à notre cher
Saucisse et à tous les autres, vive le second degré
qui déride la politique !

Pour démonstration et pour finir, je citerai
l’auteur : "Les "candidats fantaisistes" n’ont pas
seulement le mérite, en offrant un refuge aux
mécontents, de faire reculer l’abstention ; ils n’ont
pas seulement l’intéret de rendre possible un vote
protestataire qui ne soit pas extrèmiste. Ils ont
surtout cette faculté de révéler à l’électeur ses
propres limites, les frontières au-delà desquelles le
bon citoyen, appelé aux urnes, jugera que "ça n’est
pas sérieux"... Or ces lignes-là, dans l’Histoire,
sont particulièrement mouvantes." Les zozos qui
faisient rire nos grans-pères avaient souvent
simplement raison un peu trop tôt...

LE SITE DE L’EDITEUR

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