PLACID : un dessin condamNez ! Où est passé la liberté d’expression ?

PLACID : un dessin condamNez ! Où est passé la liberté d'expression ?

Alors que Charlie Hebdo est en pleine décision de justice pour les carricatures de Mahomet, que Monsieur le député Éric Raoult a voulu introduire le mot "Blasphématoire" dans l’expression libre du dessin (heureusement sans réussite !), c’est le dessinateur de presse PLACID pour Libération qui vient d’apprendre par le biais du Canard Enchaîné qu’il a écopé d’une amende de 500€ pour un gros nez retroussé (un style reconnu sur tout ces personnages) que la Police a estimé comme étant "un nez de cochon". La liberté de dessiner commence à s’estomper ?!

"Et Quel Nez !" s’exclame Panoramix dans "Astérix et Cléopâtre" (et autres albums d’Astérix où la belle Cléopâtre apparait). Le nez dans la Bande dessinée ! Tout un mythe !Les nez ressemblent à des verges, plutot molles, voir aussi des gros rond, des nez diformes, avec une bosse, une déformation, avec des pustules, plus fins, plus ronds... Le nez dans la BD, c’est comme la chanson des Zizi de Pierre Perret. Toute une galerie ! Et personne n’a porté plainte au pif ! Je ne comprends pas cette socièté qui d’un coup d’un seul commence à ne plus accepter la carricature, l’humour, le potache. Plus rien ne va jusque là. Le dessinateur de presse est t-il en péril ? Même si certains politciens (candidats ou pas à la Présidentielle) prônent et brandissent cette liberté de l’humour et de la crtique par le dessin, là pour un nez , un nez retroussé qui se retrouve sur tout les personnages du dessinateur, on parle d’insulte ? d’injure à l’odre publique ? Hier un religieux extrèmiste, aujourd’hui le nez et demain ? la taille d’une oreille ? une bouche ? des seins ? des poils sur le torse ? une main droite à la place de la gauche ?!
La feuille blanche politiquement correcte et morale va refaire surface ! Et comme 19eme et début 20eme, l’Église va reprendre son droit moral de censure et de contrôle.

L’humour va êre modéré. Imaginez un CSA du dessin, un peu comme aux USA, avec ce petit contrôle sur les comic-book des superhéros (mais quelques éditeurs passent par dessus et tant mieux ! ) sous peine d’amende. Remarquez en France, ou dans le reste du monde, il est très très difficile de toucher à Tintin. Moulinsart veille au patrimoine !
Et si le museau de Mickey n’était plus conforme lui aussi ?!
Il a fallu des années en France pour acquérir une liberté du dessin, de la Bande Dessiné, avec les exploits graphiques dans PILOTE, dans L’Écho des Savanes (première période), ou encore Fluide Glacial.

Rendez nous notre liberté de Dessiner !

Pour en savoir plus sur cette condamnation, voici la lettre ouverte du dessinateur PLACID.

Chers amis,

j’ai appris par "Le Canard enchaîné" que j’ai été condamné à 500 euros d’amende pour "injures publiques envers une administration, en l’occurrence la police nationale", à cause un dessin que j’ai fait en 2001, pour la couverture du livre "Vos papiers !", sous-titre : "Que faire face à la police ?".

Je n’ai pas encore reçu le jugement par voie d’huissier, je n’ai pas les détails. Ce livre était publié par les éditions "L’esprit frappeur". L’éditeur, Michel Sitbon, est condamné à 800 euros d’amende pour complicité avec moi, et avec l’auteur du texte, Clément Schouler, membre du syndicat de la magistrature, condamné à 1000 euros d’amende(l’auteur n’est pas condamné pour injure, mais pour diffamation, à cause d’une phrase dans sa préface : "il y a en France des contrôles d’identité aux faciès, et ils se multiplient" (je cite de mémoire).

Le canard enchaîné a diffusé l’info, me nommant Jean-François Duval (mon vrai nom), l’humanité de même. Libération n’a parlé que du cas de Clément Schouler, oubliant la condamnation de l’éditeur et du dessinateur. Politis aussi peut-être (? : l’accès aux articles par leur site est bloqué par un abonnement). J’en oublie sûrement, mais il a été très peu parlé de cette affaire dans la presse, surtout de la condamnation du dessin de couv.

Clément Schouler et son avocat ont fait un pourvoi en cassation. Je sais pas faire ça, ça me gonfle de m’occuper de quoi que ce soit, je me contente de faire cette lettre. Et pas particulièrement pour vous demander conseil, juste pour que l’information circule.

Quelques précisions : le livre, paru en 2001, a été l’objet d’une double plainte (diffamation et injure) de la part de Daniel Vaillant, es-qualité ministre de l’intérieur. Le procès a eu lieu en 2005, je ne me suis pas alors présenté à l’audience et j’ai été relaxé, ainsi que l’auteur et l’éditeur. Le parquet a alors "interjeté appel" (je crois qu’on dit comme ça, qu’est-ce que c’est barbare le langage juridique !). J’étais présent (mais sans avocat) au procés en appel devant la 11ème chambre, le 23 novembre 2006. Le jugement a dû être rendu le 18 janvier dernier.

Pendant ce procès en appel, je me suis défendu. J’ai produit des photocopies d’œuvres de dessinateurs célèbres pour leurs portraits ou caricatures de policiers (Siné, Cabu, Jossot, Thierry Guitard, Steinlen, etc.). Ce qui semblait m’être reproché était le nez retroussé du policier, proche du nez d’un cochon. J’ai aussi produit des exemples de ma production de dessins, ou on peut voir des "nez de cochon" sur toutes sortes de personnages (jardinier, anarchiste, etc.). J’ai enfin montré l’exemple d’une illustration que j’ai faite peu avant dans un magazine pour lycéens, où j’avais représenté une policière sympathique. Etc., etc.

Ce que j’ai appris aussi (comme vous), c’est l’intervention de Nicolas Sarkozy dans le procès Charlie Hebdo récent. La comparaison est simple : je suis quand à moi condamné pour une image, suite à une plainte initiée par le ministère de l’intérieur, patron actuel : Sarkozy.

Je ne cherche pas la bagarre. Je sais juste qu’une amende de 500 euros est plus compliquée à supporter pour moi qu’une amende de 500 000 euros pour, disons, un responsable de Elf. (Je suis un artiste, et les artistes sont pauvres, ce n’est pas un mythe)

Après avoir pensé un moment écrire une "lettre ouverte", ou "communiqué de presse", je me contente de diffuser l’info auprès d’un cercle restreint de dessinateurs, journalistes, éditeurs, ou autres que je connais personnellement (vous en faites donc partie).

Vous pouvez en parler si vous voulez à qui vous voulez (merci de pas diffuser mon adresse mail à tous vents). Si vous voulez m’en parler, sachez que je ne serai de retour devant mon mail que mercredi prochain.

Merci de votre attention,
Placid