Guillaume Durand : Attentat sur le campus !

Guillaume Durand : Attentat sur le campus !

Appelez-moi Guillaume et dis-moi "tu". Le tutoiement et l’usage des prénoms de manière quasi-automatique sont chez moi un signe de reconnaissance sociale et professionnelle. Je me fous de mon image mais je la travaille - surtout la mèche frisottée. Pour ma nouvelle émission littéraire ou thème d’imitation pivotesque, j’ai même acquis des lunettes de couleur pour faire plus vrai, plus authentique et jeune. Depuis que j’ai failli destituer, à mois seul, les Guignols de l’info et ma participation à l’abordage du vaisseau Canal Plus, je sens que mon pouvoir médiatique a augmenté. Je me demande même si les gens n’ont pas oublié ma ridicule participation journalistique à la Guerre du Golfe. Le Dieu "Cathode" en a décidé ainsi, j’aurais une vie après m’être grillé à "Nulle part ailleurs".

« Papa vote Cohn-Bendit et maman Bayrou. Comme tout le monde,j’ai versé une larme pour la disparition en mer de John John Kennedy »

Guillaume Durand, interview.

Le temps passe et les souvenirs télé s’en vont aussi, la lucarne permet des changements de veste rapide et efficace - les placards de l’ANPE show biz me défrisent... Au moins, mon expérience berlusconienne - thank you la cinq - m’aura appris à remplir des cases de vide avec du rien, c’est un jeu de cubes comme un autre pour le gamin gâté que je suis. Je suis un bon fils, mon premier livre narcissique et niais était dédié à mes parents.

J’ai travaillé pour Jean-Luc Lagardère, Silvio Berlusconi, Robert Hersant, Patrick Le Lay, Etienne Mougeotte, Jérôme Bellay, Yves de Chaisemartin, Patrice Duhamel, Jérôme Seydoux, Pierre Lescure et Jean-Claude Dassier, j’ai donc fréquenté tous les héros de la démocratie, je suis intouchable et j’ai des amis partout.

Aujourd’hui c’est "Mardi", la semaine commence et j’enregistre dans les conditions du direct "Campus" pour France 2 qui sera diffusée vendredi. Ce soir je serai donc en week end car mon boulot à la radio, c’est de l’impro juste avant une partie de squatch avec Johnny s’il vient ou alors avec le maire de Neuilly, Nicolas Sarkozy en cas d’absence de Halliday. Je déteste les mois de Septembre, y’a pas de rendez-vous mondain et Roland Garros est loin. Heureusement dans une semaine y’a la coupe Davis.
Coup de chance, la rentrée littéraire cette année c’est moi. Non, je vous rassure, je ne sors pas mon deuxième livre - j’attends pour cela d’être viré de France 2 ou d’Europe 1- mais je surfe sur la polémique Houellebecq. Pour une fois que le monde des lettres tient une rock star, je ne vais pas me priver de cela. MH est plus people que moi finalement et son coup de génie c’est que, lui, il ne le cherche pas. J’ai eu une "peur bleue" - eh eh référence au titre de mon premier livre, habile non ?" à l’idée que mon émission avec MH dérape mais en axant le débat sur le consensus mou, j’ai rallié tous les suffrages et j’ai fait le banco même chez les islamistes.
Je me suis levé à 11 heures 30, j’ai un mal de crâne et un mal de dos de tous les diables ! Pour la tête c’est facile à expliquer, j’étais avec un copain inconnu, Julien Védrine, qui a pour papa l’actuel ministre des affaires étrangères et on a passé une soirée mémorable à boire des coups et à critiquer les gens des milieux journalistico-médiato-showbizo-télé. C’est moi qui ai payé, j’ai de la marge pour dépenser les 4 600 000 francs d’indemnités que Canal a bien voulu me verser. S’il me reste un peu de liquide je continuerai ma collection d’Art contemporain bourgeois, c’est toujours jouissif d’en mettre plein la vue aux mecs de télé quand ils viennent à maison, avec des œuvres conceptuelles hors de prix. Pour le mal au dos, ce doit être dû à un coup de rein mais je ne sais plus où ni quand. J’ai échangé la fréquentation des journalistes pour celle des mondains. Je me méprise. J’aurais adoré combler mes déceptions sentimentales par un bon militantisme trotskiste. Tous mes copains naviguaient entre la "Ligue communiste" et "Lutte ouvrière". Dommage, je n’ai pas eu le courage d’aller au bout, je tiens trop à ma vie et le seul gilet que j’accepte de porter en permanence est celui d’un grand couturier. Je ne veux pas finir comme les fusillés de Goya, j’ai trop de choses à faire avec moi-même.

J’ai déjeuné au Fouquet’s, c’est assez à mon goût, un peu mal insonorisé et bruyant, mais pas cher. J’y ai rejoint Georges-Marc Benamou que je retrouve de temps à autre pour dire du bien de Bernard-Henry Levy, c’est notre passe-temps favori. On évoque sa beauté, son port idéal de la chemise blanche, sa femme, son œuvre, ses engagements politiques judicieux et on s’assure que sa protection sera toujours bien là au cas où on en aurait besoin. Nous en étions encore à fumer un barreau de chaise cubain et à disserter sur la dernière aventure sexuelle de Mazarine Pingeot quand j’ai reçu un coup de fil de mon assistante sur mon portable. Merde mondiale, cette dernière - une sotte avec une carrosserie de bombe atomique - m’annonce la troisième guerre mondiale en direct de New York et de Washington et je ne suis pas à l’Antenne !

Nous sommes le 11 Septembre 2001 et je sens que je vais passer une très mauvaise journée.