Le Troisième Homme

Le Troisième Homme

C’est Laurent Joffrin, directeur de la rédaction du Nouvel Observateur qui, selon toute vraisemblance, devrait reprendre les rênes du quotidien Libération, bientôt acculé au dépôt de bilan avec 12 millions d’euros de pertes en 2006. Depuis le départ de Serge July au printemps dernier, à la suite d’un désaccord de fond sur l’avenir du titre, la situation financière du journal ne s’est pas améliorée, tandis qu’une direction transitoire ne parvenait pas à restaurer la confiance chez les salariés. Ayant déjà subi un premier plan social à l’automne 2005, ils se sont confrontés au mois d’octobre à l’ultimatum de l’actionnaire de référence Édouard de Rothschild qui détient près de 40% des parts et réclame de nouvelles mesures d’économie avant toute idée de remettre au pot. Le déficit de Libération est structurel et permanent depuis plusieurs années, il fait face à l’érosion continuelle des ventes et aux coûts importants des suppléments, mais le lancement du quotidien bimedia initié par Serge July n’a pas obtenu les résultats escomptés en terme d’audience. Laurent Joffrin propose une réduction de la pagination substantielle, et une large place aux lecteurs dans les colonnes d’un journal renouvelé, dont le bénévolat offrirait une meilleure maîtrise des dépenses liées au travail d’enquête des journalistes. Ces propositions pourraient emporter l’adhésion de l’équipe, opposée au plan strictement comptable de l’actionnaire principal, et qui ne parvient pas à imposer à celui-ci les vues d’Edwy Plenel, qui voudrait refaire de Libération un journal de combat contre la politique de Nicolas Sarkozy. En effet, Laurent Joffrin a l’oreille du baron, qui lui avait déjà proposé de prendre la succession du fondateur, et connaît bien la maison, dans laquelle il a travaillé pendant dix ans en tant que journaliste, puis directeur de la rédaction. Un poste de président nouvellement créé lui serait offert au sein d’un directoire que préconise Édouard de Rothschild afin de réduire l’influence de la rédaction dans la politique du titre. L’homme providentiel ?

Est-ce un nouveau départ pour ce journal fameux
Qui part depuis pas mal de temps à la dérive ?
Voilà un directeur inspiré qui arrive
Pour redresser la barre au fond d’un trou brumeux !

C’est vrai, ce titre a fait rêver tous les gommeux,
Mais son approche, au fond, n’est pas la plus hâtive
Et propose une action qui soit définitive
Pour mettre un coup d’arrêt aux plans sociaux fumeux.

Il veut que le public participe à la presse
Et veut faire avec lui - évidemment, ça presse -
Un quotidien plus près des gens, face aux pouvoirs.

C’était ainsi au tout début de la gazette
Quand le journal était conscient de ses devoirs,
Mais à présent, l’élan ne lui fait plus risette !