Interview : Guy Birenbaum à bâtons rompus

Interview : Guy Birenbaum à bâtons rompus

Guy Birenbaum, un homme occupé et controversé qui fait beaucoup parler sans toujours le demander. Bonheurs et vicissitudes d’un succès dans un entretien franc du collier !

Triple R™ : Guy Birenbaum, vous êtes universitaire, éditeur, chroniqueur, blogueur... Pouvez-vous resituer précisément vos diverses activités et nous expliquer comment vous faîtes tout ça dans des journées de 24h ?

GB : Je suis en disponibilité de la fac. Pour le reste je suis très organisé et très lève-tôt. Cela me permet de jongler entre le blog, VSD, RTL, Privé et le reste... Surtout ma famille !

Triple R™ : Il y a peu, vous annonciez la sortie imminente chez Stock d’une bombe éditoriale : “Vous m’aurez bien cherché”. Mais Stock a refusé de le publier et vous êtes parti en quête d’un nouvel éditeur, pour finalement renoncer à cette publication. Pouvez-vous nous expliquer les raisons de ce choix et les conséquences qu’aurait eu la parution de ce livre ?

GB : Je pense que j’ai eu grand tort de m’avancer à découvert. Parfois la transparence est néfaste. Mais en même temps on ne se refait pas ; je préfère agir à découvert. Du coup, j’ai décidé de renoncer pour ne pas « balancer » des sous-fifres, des soudards (flics, voyous, journaleux, conseillers) qui auraient finalement payé pour leurs patrons, des politiques. Je ne suis pas là pour zigouiller des lampistes. J’ai prouvé en publiant le chapitre sur Ambiel et Villepin sur mon blog que je ne crains pas le pouvoir, non ?

Triple R™ : On sait que la rédaction d’un manuscrit représente des journées de travail, sans oublier l’aspect financier lors de sa publication, puisque “Nos Délits d’Initiés” vous a rapporté 150000€. Quel genre de pressions avez-vous subi pour en venir à décider la mise à la corbeille un livre déjà écrit ?

GB : Ce n’est pas un problème d’argent ni de pressions mais de responsabilités personnelle et individuelle. Je n’ai pas envie de me demander tous les jours quelles saloperies vont inventer contre moi tel flic ripoux ou tel minus, abondamment outés dans ce texte pour leur propension aux manips... Malheureusement, sans leurs noms, le texte n’a aucun intérêt. Avec leurs noms, il est trop dangereux car il les placerait en position très délicate pour ne pas dire désespérée.... Je l’ai compris en me relisant. Je suis tout de même libre de choisir ce que je fais, non ? Même trop tard...

Triple R™ : Lors de l’annonce du refus de la publication de “Vous m’aurez bien cherché” chez Stock, beaucoup vous ont accusé de faire un coup de pub pour la promotion de votre livre. Puisqu’il ne sortira pas, ce procès d’intention est sans fondement, mais qu’adviendra-t-il du manuscrit ? Allez-vous continuer à en diffuser des extraits ou bien enterrez-vous définitivement ce projet ?

GB : Je pense que ce texte est très utile dans un tiroir. Et puis je suis sûr que de temps en temps les blogueurs se réjouiront d’en lire un tout petit bout ! Quant à ceux qui ont vu là un coup de pub, ils ont eu tort. Mais vous savez, les critiques, je vis avec et elles me glissent dessus comme de la flotte sur les plumes d’un canard... sauvage.

Triple R™ : Revenons à votre gagne-pain : l’édition. Récemment, dans le magazine “Lire”, Frédéric Beigbeder déclarait que le métier d’éditeur est un boulot difficile et ingrat, mal payé de surcroît. Pouvez-vous nous décrire vos journées et nous donner une idée du niveau de vie d’un éditeur ?

GB : Je vais pleurer pour Beigbeder !!! Quel cinoche ! Oui, bien sûr : lorsque l’on se voit proposer 30000€ par mois (!!!) pour bosser à Canal+, l’édition c’est minable. Mais moi je trouve que les 6900€ nets que je gagne par mois dans ma maison sont une somme extrêmement confortable. Je trouve donc que Beigbeder se fout un peu du monde : il doit gagner près du double ! Sans parler des droits de ses propres livres ! Il est vrai cependant que c’est un job difficile parce que le marché est dur et les auteurs parfois fatiguants... Pour le reste, une journée ne ressemblant pas à une autre, c’est dur à décrire. Disons que je vais de rendez-vous en rendez-vous et que tout se termine avec un manuscrit à corriger au dernier moment... Sans parler des procès et des emmerdes...

Triple R™ : Merci pour ces précisions. Mais d’ailleurs, comment devient-on éditeur ? Vous, par exemple, vous êtes universitaire. Quels sont les autres parcours que l’on trouve dans ce secteur et comment franchit-on le pas pour vivre de l’édition ?

GB : Je ne sais pas. C’est du bol. Du piston. Des rencontres. Et beaucoup de travail. L’équipe qui m’entoure bosse énormément. Plus que moi !

Triple R™ : Justement, vous concernant, vous êtes votre propre patron depuis que vous avez créé les éditions Privé. Est-ce une situation enviable dans un métier artistique et à quoi ressemble le parcours du combattant du candidat à la création d’une société d’édition ?

GB : C’est dur de monter une boîte, quel que soit le secteur. Mais moi j’ai eu du bol. Michel Lafon m’aide et m’épaule. Il y a pire que d’avoir un associé qui pèse 30 millions d’euros de chiffre par an... Quant à la distribution, grâce à lui, nous sommes chez Editis/Interforum et nos livres sont partout !

Triple R™ : Enfin, le métier d’éditeur n’est curieusement pas sans risque. Comme vous le disiez, les livres que vous publiez vous conduisent souvent dans les allées d’un tribunal. “Un agent sort de l’ombre”, le livre de Pierre Martinet, vous a même valu une plainte émanant du ministre de la Défense. Quelles sont les répercussions financières et médiatiques d’une telle mise en accusation ?

GB : Pour le moment 5 mois de prison avec sursis et 10000€ d’amende pour lui. Privé n’est pas poursuivi sur ce coup là. Il a fait appel.

Triple R™ : Vous êtes sorti indemne d’une plainte ministérielle, c’est déjà un joli coup. Mais avec la longue et agitée période électorale qui s’annonce, on peut supposer que vous allez publier plusieurs ouvrages sur la politique et les caciques en place. Quels sont les livres sur le feu chez Privé et craignez-vous des poursuites lors de leur arrivée chez les libraires ?

GB : Pas un mot sur ce qui se prépare. Disons juste qu’un ou deux candidats peuvent se faire du souci. Vraiment...

Triple R™ : Pour conclure, d’une façon plus général, comment vont les éditions Privé et quels sont vos projets à court, moyen et long terme ?

GB : Privé va correctement dans un contexte très difficile. Je réfléchis aux possibilités de développement et de diversification. Nous venons de sortir nos premiers romans. Il va encore falloir innover.

Triple R™ : Je vous laisse le mot de la fin ?

GB : FIN.

Triple R™ : Merci, Guy Birenbaum.

GB : Merci Rémi.

LE BLOG DE GUY BIRENBAUM

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