Bonjour,

1) Il parait que vous avez le feu aux fesses ? Racontez-nous un peu cela.

J’étais particulièrement encline hier soir à profiter de la chaleur et de
l’ambiance émoustillante de Paris au mois de juillet.
Ayant le sens patriotique assez peu développé, j’avais préféré aller
guincher au concert de Booster [1] suivi du mix de DJ Tom B. Que voulez-vous,
le funk et du groove torrides en plein air m’enflammaient davantage que le
bal des pompiers et autres défilés de militaires.

Ce que je ne savais pas pas, c’est qu’une autre chaleur m’attendait à
domicile.
Coup de fil. Fichtre, qui donc me dérange en pleine groovitude ?
Oh ben tiendez, c’est la police.

J’avais laissé en partant la fenêtre de ma chambre ouverte, histoire de la
rendre supportable en ce temps de canicule.
Certains mômes du bas de la rue ont dû se demander quel bruit ça ferait un
pétard en intérieur. Pas de bol, c’était chez moi.
Ma chambre est totalement carbonisée, même la cheminée est explosée, et tout
le reste de l’appart est incrusté jusqu’à la moëlle de suie et de mélange
extincteur-suie-eau de pompier.

Détail amusant : à cette soirée, il y avait un ami d’ami complètement
désespéré par une rupture toute fraîche ; alors que mes tentatives de lui
remonter le moral par mes crétineries échouaient complètement, cet épisode
lui a complètement changé les idées pendant quelque temps. C’en serait
presque vexant.

2) Au fait, vous n’avez plus de vêtements ? On va vous voir toute nue ?

Et bien écoutez, il en reste quelques uns.
Justine, vous vous inquiétez, j’en suis sûre, du sort de mes sous-vêtements ;
soyez rassurée, je les range dans le salon.
Pour le reste, sachez qu’Ikea vend du matériel de très bonne qualité ; Si
tout est saccagé, il y a 2 survivants : la table (sur laquelle était pourtant
posé l’écran d’ordi dont il ne reste quasi rien) et la moitié du placard.
Pas mal de trucs ont cramé, mais mon dos-nu à paillettes affriolant que je
porte sur scène quand je danse la samba est intact. C’est jusque un peu
bizarre quand je vais au supermarché.

3) Pourquoi accusez-vous des jeunes et non des pétards ? Qui est le plus
responsable ? L’état qui autorise la vente d’artifices dont on sait qu’ils
sont
dangereux (nombreux problèmes auditifs et occulaires suite à des lancers de
pétards) ou les jeunes qui s’en servent abusivement ?

Rouf, c’est rentrer dans un bien grand débat pour mon état neuronal actuel,
ça...
C’est assez terrible, mais c’est vraiment le fruit d’un accident con
(intentionnel ou pas, on le saura jamais), connerie de mômes.
Clair que les pétards, ça aide pas.
M’’enfin ces derniers mois, il paraît que les incendies, c’est vachement
tendance.

4) Avez-vous une photo de votre chambre pour faire un comparatif
avant-après ?

Je ne sais pas si j’ai des photos de ma chambre, mais Depardon est déjà dans
mon salon.

5) Maintenant que votre chambre est mouillée et pleine de suie, que vous
n’avez
plus de lit et plus d’ordinateur, allez-vous en profiter pour retourner
vivre à
la campagne au lieu de Paris qui est si dangereux ?

En province ? Quelle idée ! Mais où ça donc ?
La Picardie, où j’ai vécu les 18 premières années de ma vie, est un des
piliers fondateurs de ma névrose, alors bon...
Non, je vais juste avoir une déco toute neuve dans mon appart, avec une
chambre entièrement refaite ; en plus, même à 3h du mat’, j’ai les meilleurs
voisins au monde : parfaits, rien à redire.

6) Quelle idée aussi d’avoir autant de livres, vous savez pourtant que ça
fait
un très bon combustible ?

Et bien écoutez, coup de bol, la plupart de mes bouquins et cd sont dans le
salon. (bon, à l’heure actuelle, c’est un peu Pompéi, dans mon salon, mais
le choc affectif aurait été encore plus terrible)
Evidemment, y’en avait quand même dans la chambre, parce que tout ne peut
pas tenir dans la pièce à côté ; alors pas mal d’encyclopédies, des
dictionnaires des oeuvres, quand même une vingtaine de bouquins du XVIII ème
siècle, des papiers administratifs - dont ceux de ma compagnie etc...
Mais aussi beaucoup de fringues, des trucs de couture, des couettes et un
milliard de conneries que j’arrivais pas à caser ailleurs.
Mêmes brûlées et entassées sur le trottoir et dans la cour, je me dis que
j’ai vraiment accumulé une quantité incroyable de choses.
Moi qui disais
qu’il faudrait que je me sépare de trucs, là, c’est un peu le ménage par le
vide. A la place de la cheminée, je vais mettre une étagère, ça va faire de
la place.

7) Vous avez lancé un concours de "blagues de mauvais gout"... les résultats ?
Pensez-vous que mes précédentes questions puissent en faire partie
(notamment
mon "vous allez vivre nue" et "vous avez le feu aux fesses" que j’inclus
dans
le concours) ?

1h30 après être arrivée sur les lieux, ( passé la crise d’effondrement du
début, les interrogatoires par la police et pompiers et les coups de fil),
commençaient à venir les blagues d’après-coup.
Je vais me fumer une clope dans une rue un peu à côté, histoire de prendre
de l’air frais (enfin qui pue pas le même brûlé). Là, une demoiselle me hèle
du 1er étage d’un immeuble.
"- excusez-moi, vous n’auriez pas du feu ?
 C’est dommage, vous me demandez un peu tard, j’en avais plein dans ma
chambre tout à l’heure.
 Comment ça ?
 l’incendie à côté, là, c’était chez moi."

Bon, ou "Je t’envoie les photos sur ton ordi ; ah non, sur ta boîte mail, ton
ordi a cramé."
Chanter "allumez le feu" de Johnny, "Tu veux fumer un pétard ?", "Soirée de
feu de dieu"... Allez-y, le concours est ouvert, et au plus grand
nombre grâce à vous, chère Justine.
Si vous voulez, nous pourrons mettre en ligne la galerie de photos, après.

Oui, avec plaisir... NDJ’M.

Mais il faut avouer que ce questionnaire est fabuleusement dans la bonne
ligne.
Déjà, je tiens à vous féliciter : comme toujours, Justine, vous êtes à la
pointe de l’actualité ! Moins de 12h après les faits, vous interviewez l’un
des 3 incendiés du XIXème ! (Le Mague ne s’y est pas trompé en vous
embauchant)
Et cela me fait très plaisir d’être de retour sur votre site ; toujours avoir
des choses à raconter, quel qu’en soit le prix, la maison ne recule devant
aucun (feu d’) artifice.

Je commençais justement à écrire un spectacle de contes, mais plutôt pour
adultes, je pense qu’il devrait y avoir matière, là.

8) Pensez-vous écrire ensuite quelque chose sur les assurances (enfin quand
il
n’y aura plein d’anecdotes ubuesques à raconter) ?

Ecoutez, je n’en suis pas encore à ce stade-là, vous allez tellement vite !
à priori, ça devrait aller, vu que mes assurances sont en province, chez
quelqu’un que connait ma mère. Je vous dirai.

Mais si j’avais plus de temps, je pourrais vous raconter la présentation
détaillée de l’uniforme par un policier, ou le monsieur du labo de police.
Je vous dirai la suite des évènements, là, en fait, j’ai un peu à faire.

9) Et à part ça vos projets artistiques, ils en sont où ? On va quand même
pouvoir voir vos prochains spectacles pour enfants ?

Ben écoutez, j’étais en train de m’occuper des trucs administratifs et de
com , donc là, j’ai un peu encore plus de boulot.
Aussi, j’écrivais des histoires pour un site de téléchargement pour enfants ;
j’espère qu’on va pouvoir récupérer le disque dur, y’a plein de trucs frais
que je vais devoir éntièrement réécrire, sinon.
Plus comme je disais au-dessus, un spctacle de contes un peu barrés pour
adultes.

10)Je vous laisse, ma chaleureuse Dorine, le mot de la fin (en vous
souhaitant
beaucoup de courage car je crains que, même avec votre humour, il n’en
faille
un peu quand on voit ainsi, au sens propre, une partie de ses créations
partir
en fumée).

Vite, faut que je rappelle l’assistance des assurances.
Et après, je vais faire une sieste, sinon je vais pas faire long feu.
A bientôt, pour la suite des évènements
toujours avec la même flamme,

Dorine

C’était un reportage de Justine Miso.