Hommage à Gogol 1er

Hommage à Gogol 1er

Début 1987, Serge Scotto organise à Marseille le
premier festival totalement dévolu au regretté journal
Hara-Kiri, avec trois francs six sous, la bonne
volonté du professeur Choron, toute son équipe, ses
femmes à poils et ses amis. Au premier rang de
ceux-ci, pour ouvrir le bal du FESTOCH’, Gogol Ier et
sa Horde en concert, mémorable ! Quelques jours plus
tard, notre collaborateur débarquait à Paris pour
monter avec son ami-son maître sur la scène de la
Loco, l’occasion pour lui d’en ramener un article, le
premier qu’il ait écrit, publié à l’époque dans "666
Magazine". Voici ce papier, pour "Le Mague" exhumé des
oubliettes de la presse alternative, en ces années
heureuses encore fortement vivaces.

GOGOL A LA LOCOMOTIVE, 1987

Le dimanche suivant sa performance à l’Arsenal es Galères (à Marseille, NDLlemague), GOGOL 1er joue à la Locomotive, à Paris. Backstage, 666 suit l’évènement.

A dix sept heures, rendez-vous est pris dans les appartements du Maître. Quelques uns sont déjà là, assis entre les caisses qui encombrent le salon, baroque en diable. Justine, la servante de Gogol, en vérifie une dernière fois le contenu, attirail guerrier dont vous aurez le détail, ci-après. Le maître est souriant, d’humeur conquérante. Tous attendent le camion. Ensemble, nous nous rendons bientôt à la Loco. Gogol harangue sa horde : « ce soir, nous allons livrer bataille »...

Vers dix-neuf heures, devant les caméras d’Antenne 2 Florentin interviewe Gogol pour « Les Enfants du Rock ». Le Maître supporte avec bienveillance le babil insipide de cet enfant gâté de la presse branchouille : déguisé ( ?) pour l’occasion en boy-scout, Florentin, qui parle comme Monsieur Dusnob dans l’Ile aux enfants, pose au maître de graves questions métaphysiques du genre « Vos concerts sont-ils violents ? ».

« Que répondez-vous à vos détracteurs ? » « Avez-vous un message pour vos fidèles ? »...etc. Insupportable.

Je m’éclipse en tapinois des caves, et rejoins la scène où le travail va bon train. Le décor est déjà en place. Derrière la batterie est tendue une grande bannière aux couleurs du Maître. Deux croix encadrent un autel où de souriantes têtes de cochons luisent à la lueur des chandeliers. Une autre encore vous tire la langue, piquée sur le pied d’un micro.

Vingt et une heure, la balance s’achève, l’artificier du Maître en termine avec les préparatifs de la fête. La horde quitte la Loco, le temps d’un repas. Le patron de l’endroit est un sale con. Après avoir laissé annoncer par voix de presse que cette grande messe noire serait offerte aux fidèles, il se ravise et décide seul d’en fixer le droit d’entrée à cent francs. Dehors, les kids déjà nombreux grondent, mais l’émeute, souhaitable, ne se produira pas, et c’est dans l’ordre que plus de mille initiés assisteront pourtant à la cérémonie.

Minuit : l’heure est enfin venue de la rédemption. Sur les dernières notes de Carmina Burana retentit une formidable explosion. Le rideau s’ouvre et la horde prend d’assaut la scène.

Les premiers accords de « je t’emmerde » retentissent à peine, que déjà quelques crinières s’agitent dans la pénombre de la salle. Tel un diable, le Maître déboule à son tour, les bras en croix, possédé : « A moi, les braves ! A moi, mes fidèles ! A moi, mes guerriers !... »

Gogol célèbre joyeusement sa messe au sein d’une sarabande infernale. Derrière lui la horde s’agite en tout sens ! Couvert par le flot des décibels, le canon projette sur la foule des charges de farine nuageuse. Un boy-scout des forces Gogoliennes régulières envoie, à l’aide d’une catapulte, des capotes remplies d’eau sur les keupons perruqués : « L’eau, c’est pour pas salir, tu vois ». Un bourreau amène à présent une jeune vierge enchaînée, offerte au Maître en pâture. La créature se débat, pour succomber enfin à l’initiation.

Puis, c’est au tour d’un téléviseur de subir les foudres de Gogol ; l’objet se fend en deux sous sa masse, découvrant une tête de cochon, dont le Maître se saisit : « Dans chaque téléviseur il y a un cochon qui sommeille ». Gogol sacrifie ensuite un de ses scouts, le découpant à la tronçonneuse, sur l’autel qui lui aussi finira en copeaux. A l’écart la servante de Gogol distribue sereinement le pain béni ; elle lance aux fidèles de petits phallus dorés et croustillants, bientôt accompagnés d’une rasade de vin de messe (un excellent champagne), dont seuls profitent les premiers rangs.

« Je bois, et je suis le roi ! » Le bourreau tient à présent dans ses bras une sculpturale oiselle, seulement vêtue d’opprobre. A peine au sol, la fille se convulse sous les passes du Maître. Un petit bout de gras surgit de son intimité. Elle transpire et s’agite, le premier rang recule, le caméraman se cramponne.

Ses spasmes s’intensifient, elle souffre, et s’ouvre sur un innommable morceau de bidoche dont elle accouche finalement (du cœur de veau en l’occurrence). Le chose a jailli tel un Alien... Certains spectateurs sont un peu verts.

Le show se termine dans l’allégresse d’un bis généreux. Le miracle s’est une fois de plus accompli : Gogol n’a pas tâché sa soutane. Il pourra donc le prochain week-end, prendre les mêmes et recommencer ; en Angleterre cette fois.

Regrettons que le public parisien soit décidément un peu cousu du cul, mais on s’est bien amusé...

GOGOL 1ER EST BIEN LE MAITRE

Le site officiel de Gogol Premier

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