Ce livre parfaitement édité et mis en scène au sein d’une stratégie éditoriale savamment dosée en perspectives, chapitres, parties et sous-parties, est à la fois complexe et bourré de sens visibles ou sous entendus, à la fois pertinent et impertinent, en tout cas cruellement d’actualité en 2006.

La quatrième de couverture nous donne déjà de précieuses pistes de réflexion :

"Ne nous y trompons pas : la violence religieuse et commerciale nient le triomphe du nihilisme mais ne le supplantent pas. Et pour cause, la mondialisation de l’économie n’a mondialisé qu’une seule chose : le nihilisme ! Et le progrès de la science et des techniques ne fait que célébrer ce triomphe ! "

En insistant tout particulièrement sur cette dernière et en la menant progressivement jusqu’à ses plus ultimes conséquences."

Le nihilisme est cette notion introduite par Nietzsche qui a fortement évoluée au cours de notre histoire des mots. De prime abord simple critique sociale née dans la Russie du XIXème siècle, elle a évolué vers une doctrine politique n’admettant aucune contrainte de la société sur l’individu et prônant, notamment, le terrorisme.

Bien qu’éphémère, ce mouvement politique aura soulevé des questions auxquelles s’intéresseront les penseurs de tous horizons. De ces interrogations naîtront une doctrine philosophique en relation avec l’absurde sociologique, la négation des valeurs morales et plus généralement, la négation de l’existence d’une réalité substantielle.

A travers le mot-clef et le prétexte "dramatique" de la déconstruction moderne du nihilisme, Lofti Hadjiat ose une balade intellectuelle fort bien argumentée sur les fondements mêmes de notre Société en disséquant avec l’élégance de son style et la force analytique de son écriture les grands thèmes qui nourrissent sa réflexion : la Religion, la Science, L’Economie, le Pouvoir, la Mort, la Philosophie et la pensée en action.

Lofti Hadjiat nous entraîne ainsi dans une œuvre poétique à la fois sociologique, philosophique et éthique absolument passionnante, quoi que très dense et scrupuleusement annotée et mise en texte avec inventivité dans des parties très prosaïques, et d’autres carrément dialoguées, ce qui est rare dans ce type d’ouvrage.

L’ampleur de cette conquête artistique et littéraire est telle qu’elle ne se résume que difficilement et n’autorise aucune redite. Il faut donc sans plus attendre se plonger dans cette analyse très nietzschéenne pour se rendre compte du désastre planant sur nos esprits, de la possibilité imminente d’explosion de notre civilisation. La vérité vient du texte.

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"Eloge de la conquête, la destruction du Nihilisme" de Lofti Hadjiat, Editions Théles, 323 pages, 2006