Interview : Corneille

Interview : Corneille

Succès story de l’année 2004 Corneille revient proposer ses chansons en forme de témoignages dans un nouvel album « Les Marchands de Rêves », titre évocateur qui parle de tous ces exilés en recherche d’une vie meilleure. Ce garçon qui plaît tant au grand public a quant à lui réussi bon nombre de ses rêves et n’hésite pas à s’impliquer dans une multitude de causes afin d’offrir un peu de son bonheur.


Vous aimez dire que ce deuxième opus est votre premier ?

Corneille : « Je l’ai dit une fois et ce fut repris ensuite dans mon dossier de presse alors maintenant tout le monde m’en parle. J’aurais mieux fait de la garder pour moi cette phrase. En fait le premier album, en ce qui me concerne, il n’y avait aucune notion de risque, d’attente ou de pression. Ce sont des données qui n’existaient pas alors que pour le deuxième ce sont des choses avec lesquelles j’ai du composer. Tout en ayant plus de lucidité que pour le premier. »


Dès la première chanson vous évoquez votre réussite, est ce que c’est encore difficile de vous faire à cette idée d’avoir accompli de nombreux rêves ?

Corneille : « Pas du tout ! »

Pouvez vous me décrire un de vos rêves qui consiste à refaire le monde, qu’est ce qui changerait de la réalité dans vos songes ?

Corneille : « Ho mon dieu il y a tellement de choses à changer et en même temps c’est tellement complexe. Je ne suis pas sur que des personnes puissent trouver la ou les solutions. Mon vœu ce serait déjà qu’on se comprenne mieux les uns les autres. »

Vous lancez une « Lettre à la Maison Blanche » mais n’est ce pas une bouteille à la mer qui a peu de chance de trouver le bon réceptionnaire ?

Corneille : « En même temps qui sait ! (rire) la bouteille a encore moins de chance d’arriver si on ne la met pas à la mer. »

Pensez vous adapter par exemple cette chanson en anglais afin de faire comprendre votre engagement à qui de droit ?
Corneille : « Je pense à le faire. Si je dois sortir un album en anglais un jour cette chanson y serait. »
Dans « Si tu Savais » vous relatez les doutes qui assaillent l’artiste, est ce que parfois vous succombez à toutes ces peurs ?

Corneille : « D’y succomber pas du tout. Ce sont des doutes qui naissent et qui restent juste assez présents pour me remettre en question sans jamais me freiner ou m’handicaper. »

En studio vous aviez décidé de prendre comme base la guitare d’Andy Dacoulis et votre voix pour finalement vous retrouver à composer un album ou le jazz, la soul, le zouk viennent apporter une pierre à l’édifice, qu’est ce qui a fait pencher la balance entre le début et la fin de l’enregistrement ?

Corneille : « La musique tout simplement. Une fois que j’avais enregistré la moitié de l’album je me suis rendu compte que j’avais besoin de plus de diversité musicale. Faire de ce disque quelque chose de plus riche musicalement sans le surcharger mais subtilement le rendre plus intéressant. »


Vous aviez toujours cette envie de retourner là d’où vous venez, grâce à Youssou N’Dour vous êtes parti chanter à Dakar, c’est un premier pas pour retrouver le Rwanda ?

Corneille : « Ce fut un grand moment pour moi. C’était la première fois que je chantais en Afrique Noir depuis 10 ans, c’était d’ailleurs la première fois que j’y retournais. J’y ai été très bien accueilli. »

Ce besoin de toucher à nouveaux vos racines, doit il être plus pris comme une envie nostalgique d’exilé ou de pardon face à l’atrocité ?

Corneille : « C’est beaucoup plus lié à mes souvenirs d’enfance, à ce que je me rappelle de mon Afrique et ce qui m’en manque. Donc : beaucoup plus une nostalgie qu’une idée du pardon. »

Il y a beaucoup de vos chansons qui traitent du voyage initiatique ?

Corneille : « C’est un vrai thème de société en même temps. Beaucoup de gens quittent leurs chez eux pour aller trouver mieux ailleurs. Ce qui a donné ces problèmes d’immigration et d’identité qui sont partout présents. Ca touche l’actualité même si les exodes ont toujours existés, j’ai voulu partir de moi pour toucher quelque chose de plus universel. »


Est-ce que tout est plus simple lorsque l’on est amoureux ?

Corneille : « Définitivement ! Je ne sais pas à quel point c’est réellement simple, si ça l’est vraiment ou si ça paraît simple mais en tout cas je vous réponds : OUI ! »

Vous chantez « Le Bon Dieu est une Femme » mais connaissez vous le principe qui déclare que derrière chaque dictateur se cache une femme ?

Corneille : « Je vous l’accorde mais nous pouvons tout autant dire ça des hommes bien qui ont existés ou qui existent ! »

La spiritualité qui se dégage de votre disque ne vous rend elle pas fataliste, comme si l’homme n’avait plus à se surpasser pour trouver le « bon » et ne devait payer ses actes que de la main de Dieu ?

Corneille : « Au contraire, je suis contre la fatalité, en tout cas cette idée... je pense que certaines personnes ont le luxe de pouvoir compter sur eux et rien que sur eux pour changer leur destin, parce qu’ils vivent dans une certaine aisance matérielle et sociale donc équipés pour un meilleur lendemain. Mais ceux qui n’ont pas ce luxe là, ils doivent s’accrocher à l’idée que le destin leur réserve quelque chose de bien quoi qu’il arrive. C’est peut être une fatalité optimiste pour compenser ce manque qui traîne dans certains pays du monde. Que l’on ne se dise plus à la naissance que certaines choses sont possibles et d’autres non. On peut s’accrocher à l’idée de faire renverser les barrières. »

Quel fut le plus beau compliment que l’on vous a fait suite à la sortie de vos albums ?

Corneille : « C’est un monsieur qui était atteint du cancer qui m’a dit qu’il se foutait pas mal de ma musique mais qu’il s’était accroché à mes paroles pour continuer à vivre. Même si je compose et que ma musique est aussi importante que mes textes. Savoir que je fais plus que du divertissement me rempli de joie. »

Pouvez vous me parler de votre rôle d’ambassadeur de l’Unicef ?

Corneille : « Je suis ambassadeur de bonne volonté sur une campagne qui s’occupe des enfants atteints du SIDA en se concentrant beaucoup sur l’Afrique australe. J’ai commencé cet été. Aller sur place, rencontrer les gens, les enfants malades et ceux qui s’en occupent. C’est surtout un rôle de témoignage pour faire changer les choses. »


Je crois que votre disque tient la palme des remerciement, il y en a une pleine page. Vous ne vouliez oublier personne ?

Corneille : « Il y a des gens qui méritent d’être remercié donc j’essaye de le faire. Je pense que pour le prochain je me contenterais de dire « merci à tous » (rire). »


Enfin, vous remerciez Bernadette Chirac certainement pour son rôle actif dans l’opération des pièces jaunes, vous parlez d’une consécration d’être allé à l’Élysée mais quand on voit le traitement du gouvernement de son mari pour « les marchands de rêve » en France n’est ce pas trop de complaisance ?

Corneille : « J’ai parlé de l’Élysée, pas d’un président ou d’un régime en particulier. L’Elysée est à la France ce que la maison blanche est aux Etats-Unis. C’est le symbole, pas seulement d’un pouvoir mais d’un peuple. Je voulais juste dire que j’avais touché à ce qu’il y a de plus physique de l’autorité en France dans le même contexte que mes autres petits succès. C’était quelque chose de naïf et infantile. »