Münich : vision du sexe et terrorisme chez Steven Spielberg

Münich : vision du sexe et terrorisme chez Steven Spielberg

J’ai fait ma bonne action universelle de l’année, je me suis rendu à une séance cinématographique projetant le dernier Spielberg : "Munich".

"Munich" raconte le parcours d’un groupe d’hommes remplis d’incertitudes, de culpabilités et de scrupules (dont un très bon Mathieu Kassovitz , formidable en fabricant de jouets reconverti malgré lui en spécialiste en explosifs ) qui fut chargé, en 1972, d’éliminer un à un, les commanditaires des meurtres perpétrés par des terroristes arabes lors des Jeux Olympiques de Munich, cette même année.

Le tristement célèbre commando de la nuit du 5 septembre 1972, appartenant au groupe baptisé "Septembre noir", est ainsi le sujet principal de ce "Munich", qui oblige les Israéliens, pour ne pas perdre la face aux yeux du reste du monde, à répondre de manière forte et sanglante à ce bain de sang olympique.

Dans la série "Spielberg continue à se réapproprier l’Histoire de l’humanité et tout ce qui concerne les drames de celle qui met en scène les Juifs", après "La liste de Schindler", ce brave Steven s’intéresse de très près à un petit commando d’hommes chargés d’exécuter des prétendus ennemis d’Israël. Des hommes sont pris en otage pour nettoyer le monde de ces assassins moustachus.

Pendant tout le film, Spielberg se flagelle et se donne du mal pour faire croire à son concept de départ auquel on a tout de même un peu de mal à adhérer malgré la surenchère de moyens : "l’impartialité critique" sur cette période et les actions meurtrières en charge d’une vengeance programmée. Volonté des plus louables, certes, sauf que certains éléments de ce film sont assez étranges à analyser et portent véritablement à polémique.

Plutôt que de critiquer le scénario, les dialogues ou le jeu des acteurs, j’ai choisi d’évoquer tout ce qui est sexuel, de près ou de loin, dans ce très long métrage, ainsi que la manière édifiante dont les auteurs ont rendu cela à l’image.

Il ne s’agit pas là d’un point de vue volontairement provocateur ou tendancieux mais, bel et bien à mon humble avis, ce qu’il y a de plus pertinent à commenter dans cette affaire-là.

Eric Bana, un comédien australien qui ressemble à une sorte de Jim Morrisson un peu moins rock and roll, joue un tout jeune père de famille qui est "choisi" par le Mossad pour aller faire le sale boulot. Avner préférait assister à la naissance de sa petite fille et passer du temps avec sa mère et son père malade. Oui mais voilà, il est l’élu, l’individu ordinaire qui va venger sa nation, devenir un héros anonyme (car les grands sacrifices pour son pays doivent rester muets, même si tout le monde sait sans le dire). Avner est beau, il est brun, musclé, héros malgré lui, qui ne trompe même pas sa femme pendant sa mission en Europe et ce malgré une grande tentation. Un héros qui doute, un héros qui reste digne malgré l’éloignement d’avec sa femme qui elle, trouve refuge aux Etats-Unis, dans un pays où il y a encore les tours jumelles, comme un symbole fort.

Avner fait beaucoup l’amour à sa femme, comme cela est sous-entendu. C’est un jeune homme sexuellement actif qui offre sa belle énergie à son pays. D’ailleurs on le dit dans le film, Avner est toujours dans l’action, ce type d’homme ne supporte aucun temps mort. L’énergie sexuelle se transformera par idéologie en force meurtrière.

Chose rare au cinéma, au début du film, on voit Avner faire l’amour à sa femme en levrette, alors que celle-ci est enceinte d’au moins sept mois. Un plan de demi ensemble montre cette scène explicitement avec, semble t-il, une actrice réellement enceinte lors du tournage. Vers la fin de l’intrigue, on verra ce même couple faire l’amour en missionnaire, avec, en parallèle, des images de la tuerie du Commando "Septembre noir", et étrangement, Avner atteint l’orgasme avec sa femme en même temps que l’explosion d’un hélicoptère, tuant juifs et arabes sur le tarmac.

Le reste des symboles sexuels du film est traité de manière très moralisatrice. La très jolie et pulpeuse prostituée brune, qui est en charge d’éliminer des membres de l’équipe d’Avner ou le chef lui-même, se fait descendre sur sa péniche et se trouve humiliée jusque dans sa mort ; elle restera nue, selon la volonté de ses assassins, criblée de balles, dans une position expiatoire, sa poitrine magnifique et aguicheuse montrée en pleine focale, sexe compris, le tout dans un fauteuil en osier.

De la même manière, le collègue d’Avner qui a succombé, dans tous les sens du terme, aux charmes de la belle pute d’Amsterdam, est retrouvé complètement nu dans son lit, comme pour accentuer son péché de chair qui l’a mené à une fin tragique.

Avner lui, n’ayant pas trompé sa femme avec la tentatrice, aura la vie sauve.

Le sexe est partout dans Munich, disséminé avec subtilité ; Avner se retrouve même confronté à son double, son « homologue » de l’autre camp, un bel ennemi arabe, avec lequel il cohabitera quelques heures par la force des choses, et qu’il verra finalement mourir sous les balles, avec douleur, dans une scène savamment dosée au fort pouvoir érotique qui ne ferait pas désordre dans un film gay. Avner rencontre son miroir inversé, un lien étrange se forme entre les ennemis, une gémellité chargée d’universalité. Les deux beaux guerriers s’aperçoivent en un éclair qu’ils n’étaient pas si différents et qu’ils auraient pu être des proches, ce juif et cet arabe... des frères, des amis, des amants peut-être même, si l’histoire avait été différente.

Happy end sexuel, Avner retrouve sa femme, les tours du World Trade Center sont en érection, la belle est comblée par son mari-amant triomphant, elle ne pose pas de questions sur ses exactions politiques, elle va encore pouvoir donner du plaisir et des enfants à son charmant mari...

Münich, de Steven Spielberg, adaptation du livre Vengeance, de George Jonas, en salles.

Münich, de Steven Spielberg, adaptation du livre Vengeance, de George Jonas, en salles.