Caricatures de Mahomet :Je ne crierai pas « Haro sur le baudet ! »

Caricatures de Mahomet :Je ne crierai pas « Haro sur le baudet ! »

La presse européenne n’en peut plus de se sentir menacée par "l’affaire des caricatures de Mahomet". Le terme "liberté d’expression" n’a, semble-t-il, jamais été aussi employé en si peu de temps.

Tout le monde se sent menacé, jusqu’au buraliste du coin qui regarde de travers ses clients maghrébins habituels en se demandant si, finalement, ils ne seraient pas islamistes quelque part. La paranoïa gagne, ravivant les peurs de se faire attaquer et attisant le brasier des haines entre individus différents, vivant sous des latitudes différentes et dans des cultures différentes.

Alors oui, les caricatures représentant Mahomet en poseur de bombes sont une forme de provocation pour les musulmans, car elles dénigrent leur foi et les traditions associées à celle-ci, de manière gratuite et insultante.

Oui au fait qu’elles font partie du genre de dessins fort appréciés d’une frange de lecteurs à sensibilité d’extrême droite.

Oui, elles n’auraient probablement pas dû être publiées, car elles mettent gratuitement de l’huile sur le feu, le feu d’une islamophobie présente partout en Europe, à commencer par la France où même l’Etat français reconnaît que les musulmans n’ont pas de lieux de cultes décents en raison des blocages de toutes les mairies ou presque.

Oui, pas mal de pays d’Europe ont des composantes xénophobes et cette affaire les attise.

Oui, le débat européen est instrumentalisé à des fins mercantiles (voir l’affaire France-Soir) et sert le combat de ceux qui veulent que la laïcité se confonde avec l’athéisme, soit que la liberté devienne interdiction.

Oui aussi pour dire que les réactions des pays du Moyen-Orient sont totalement disproportionnées et frisent l’absurdité sans nom.

Oui pour dire que les morts dans les manifestations ou les ambassades saccagées sont des pratiques honteuses, hors sujet, ineptes.

Oui pour condamner les débordements violents et faire le point sur les dictatures présentes dans ces états.

Oui pour s’insurger contre les manipulations et les manifestations organisées.

Oui, aussi, pour aborder le problème des politiques occidentales au Moyen-Orient.

Non à la haine.

Non à la haine. Ni en Occident, ni en Orient.

Je ne me sens pas solidaire d’une bêtise journalistique faite au Danemark. Je ne me sens pas solidaire des gens qui ont fait ce genre de caricatures. Je ne sens pas la liberté de la presse attaquée. Je ne me sens pas solidaire d’une forme de liberté d’expression qui insulte une partie de notre communauté nationale.

A l’inverse, je ne me sens pas solidaire des gens qui brisent ou tuent en prétextant cette affaire. Je ne me sens pas solidaire de certaines lectures absurdes du Coran. Je ne me sens pas solidaire des prétextes que trouvent les personnes belliqueuses pour agresser et tuer.
Je constate qu’une fois de plus, le pays des Lumières qu’est la France, berceau d’un vivier d’intellectuels concernés, ne vaut pas mieux que ceux qu’il attaque, que ce soit dans les méthodes utilisées ou dans la défense doctrinaire et absurde de principes appliqués de manière aveugle.

C’est pourquoi, je me sens bien seul dans cette affaire, seul dans cette démocratie où le moindre prétexte est utilisé pour un étripage collectif, ou pour dresser une partie des gens contre l’autre.

Messieurs les journalistes occidentaux, messieurs les intellectuels bien pensants, je ne crierai pas, comme vous, « Haro sur le baudet ».