Mizio, l’homo E-rictus

Mizio, l'homo E-rictus

Comment voulez-vous, lorsqu’un auteur jubile en écrivant un book « e-resistible » et croustillant à souhait, que nous, lecteurs dignes mais pas moins hommes modernes, restions de marbre, à le regarder prendre un plaisir solitaire indécent en le lisant consciemment des deux mains tremblantes ?

Surtout que le bougre met en scène avec une telle ardeur son récit que l’on a presque l’impression d’assister à un livre interactif. Mon Dieu, mais comment est-ce possible ? Mizio serait-il le nouveau gourou de l’hypertexte, aurait-il le don de parler en secret à l’oreille des chauffe-saucisses ?

Le site du beau Francis

« Domo dingo, la vie domotique » n’est pas un livre banal, n’est pas un livre classique, n’est pas un livre qui se lit à l’endroit du premier degré. C’est un bouquin ouvert sur l’e-monde, une farce facile à digérer, complètement déjantée qui fait du bien, ni ne lasse même pas, une joyeuse mélasse où la société Mixers hache menu-menu les pauvres êtres humains.

L’intrigue est un labyrinthe mouliné avec facétie et une foultitude de référents bien réels, un champ ininterrompu de mini-interrogations, un questionnement que la fiction nous permettrait de croiser au hasard d’une ligne électrique et qui finirait à la fin pour nous apporter la révélation finale. Oui, madame Denise, le mondo moderne est Dingo à cause de la domo ! Tic alors !

Vous imaginiez le pire et des lendemains numériques qui « Bug », Mizio a créé un univers digne de votre paranoïa. On vous aura prévenu, ce roman laisse des marques d’électroménager.

Un peu comme la banane de la publicité, cet ouvrage qui se lit sans décodeur se mange par les deux bouts, que l’on soit profane ou connaisseur en chef des nouvelles technologies.
Sur la bande FM, rien n’engendre la mélancolie, la cosmogonie miziotesque explore des mondes infinis, du ventilateur électrique au grille pain, en passant par la machine à café et la yaourtière..

Oui, messieurs dames, ce livre est e-novateur, la pagination elle-même est décomposée de manière extrêmement moderne ; en touches, ce qui est nettement plus « classieux » avouons-le et tellement « mieux ».

Bon c’est vrai, il y a quelques bricoles assez énervantes dans ce catalogue surréaliste en binaire majeur, par exemple la préface réalisée par cette sommité internationale de Olaüs Römer de l’institut de domotique de Copenhague que l’auteur a invité pour se faire mousser, pour se vanter au près des gens qui ne connaissent aucun people, et qui nous inonde de sa prose et de son érudition dès les premières pages. Il y a aussi ses références incessantes issues de la "sou" culture, comme l’oublié à raison « Capitain Cavern » ou encore à des clins d’yeux démagogiques à la presse branchouille nord américaine avec des entretiens dans le magazine très tendance « Wired ».

Mais passons ces détails égotistes pour conclure sur ce livre pas cher disponible dans la collection « J’ai lu » et qui réjouira le quatra qui peine avec son e-mail comme le « djeuns » qui joue en réseau. Merci à ce grand magazine de Gauche d’avoir « libéré » l’écrivain de ses chroniques techno dynamiques pour lui laisser du temps pour créer du beau sans fil.

Et surtout que le bon Francis ne fiche pas en l’air le précieux mode d’emploi de sa machine rigolarde à faire de bons livres, et que l’on pourra bientôt lire sur son frigo ohoho !

Domo Dingo, la vie domotique, Francis Mizio, J’ai lu, 2000.

Domo Dingo, la vie domotique, Francis Mizio, J’ai lu, 2000.