Bunker et rédemption sous le Troisième Reich

Bunker et rédemption sous le Troisième Reich

Bernd Freytag von Loringhoven est un officier allemand, comme beaucoup d’autres, mais qui lui, a vécu un destin historique à plus d’un titre en assistant, en tant que militaire, aux derniers jours d’Hitler dans son célèbre bunker qui lui servira on le sait de tombeau.

Le film « La Chute » a, il y a quelques temps, magnifiquement conté ces instants particuliers et hautement dramatiques de la fin d’un homme et d’un régime qui ont fortement marqué leur siècle de leur violence et de leur sceau sanguinaire.

Ce témoignage écrit près de 60 ans après les évènements n’apporte rien de nouveau à ce qu’on a pu déjà lire et voir, mais est un ouvrage subjectif de premier choix, le travail de mémoire d’un homme qui réussit à expliquer son positionnement d’officier face à la folie meurtrière d’un chef mégalomane.
Militaire de carrière mais pas nazi, Bernd Freytag, sans aucune sorte de prosélytisme d’une politique ou apologie de son chef et de ses décisions, est l’observateur privilégié d’un moment qui compte parmi les plus troubles et les plus fascinants de cette époque : la mort piteuse du national socialisme. La fin d’une idéologie folle qui a trahi l’Allemagne et son peuple.

En avril 1945, on nous confirme ce que l’on savait déjà, à savoir qu’Hitler n’a plus sa superbe, ce charisme qui a envoûté tout un peuple et a fait espérer une nation en proie à une grande crise sociale et politique. Il est devenu un vieil homme de cinquante cinq ans, voûté, affaibli physiquement, déboussolé, et devant subir- en plus d’une lourde défaire guerrière - les fuites et les dernières trahisons de ses plus fidèles lieutenants prêts à tout pour quitter le navire et sauver ce qui peut encore l’être, avant qu’il ne soit trop tard. Les fins sont miséreuses même pour les plus grands dictateurs. L’épisode du retournement de veste de Himmler est parmi les instants les plus terribles et marquants de cette chute programmée.

Ce second rôle clef assiste pendant neuf fois aux derniers balbutiements d’un régime qui aura fait trembler son temps, bouleversé le monde entier.
On suit, comme un scénario désenchanté, ce récit qui ne fait en aucun cas dans la surenchère ou le sur-jeu romanesque. Derrière chaque mot on sent des sentiments justes et sincères, toute la dignité d’un homme partagé entre son devoir de militaire, son honnêteté intellectuelle et sa lucidité face à cette situation désespérée.

Au pied du mur, on quitte un Hitler complètement perdu, qui contre toute attente, épouse quelques temps avant sa mort sa compagne Eva Braun, et sombre dans une sorte d’autisme, de dépression, se préparant comme il le peut, tel un animal traqué, à un suicide inévitable.

Bernd Freytag montre un Hitler humain mais tout sauf attachant, ne faisant rien pour qu’un mythe cruel sorte de ce tableau de finitude qui se termine dans une terrible décadence, un lamentable camouflet. A lire en ces temps troublés, pour se rappeler que la violence et la haine ne peuvent en rien servir de modèles politiques ou d’exemples à suivre. Non vraiment, il n’y a rien eu d’admirable dans le nazisme, ni son début, ni ses mascarades propagandistes et encore moins sa fin.

"Dans le bunker de Hitler, 23 Juillet 1944- 24 avril 1945", Editions Perrin

"Dans le bunker de Hitler, 23 Juillet 1944- 24 avril 1945", Editions Perrin